Plaignant
M. Denis Filion
Mis en cause
Photo Police
[Montréal] et M. Normand Maltais (journaliste)
Résumé de la plainte
Le journaliste
Normand Maltais de Photo Police rapporte que le plaignant est un délateur et un
informateur de la police dans deux articles publiés le 7 décembre 1989, ce qui
porte atteinte à sa réputation et compromet sa sécurité en milieu carcéral. Les
articles en question, parus sous les titres «La CPQ poursuit une enquête sur la
conduite de certains policiers!» et «Denis Filion, le requérant, était délateur
et l’informateur de police», traitent d’une enquête publique instituée par la
Commission de police du Québec au sujet de la conduite de quatre policiers lors
d’une affaire de meurtre pour laquelle le plaignant a été condamné. Photo
Police et son journaliste n’ont pas publié la version des faits du plaignant,
malgré les démarches que ce dernier et son procureur ont entreprises à cette
fin.
Faits
La plainte concerne
deux articles parus dans l’édition du 7 décembre 1989 de Photo Police au sujet
d’une enquête publique de la Commission de police du Québec. Celle-ci portait
sur la conduite de quatre policiers à l’égard de M. Denis Filion, le plaignant
dans le présent dossier, lors de l’enquête policière sur le meurtre de M.
Ramiro Melo survenu en 1986. M. Filion, qui a été condamné pour ce meurtre
formulait à la Commission de police, le 2 décembre 1988, une demande d’enquête
sur la conduite desdits policiers.
Les articles,
signés par le journaliste Normand Maltais, ont été publiés sous les titres «La
CPQ poursuit une enquête sur la conduite de certains policiers!» et «Denis
Filion, le requérant, était délateur et l’informateur de police».
Griefs du plaignant
M. Denis Filion
reproche au journaliste Normand Maltais d’avoir rapporté qu’il était un
délateur et un informateur de la police. Il indique que M. Maltais, de par son
expérience journalistique, n’était pas sans savoir que la publication d’une
telle nouvelle lui causerait des problèmes.
Il précise que
les articles ont porté atteinte à sa réputation et mis sérieusement sa vie en
danger en milieu carcéral. Il relate que, depuis la parution des articles, il
fait face à la haine, au mépris et aux injures; qu’il est privé de sa liberté,
devant être confiné dans sa cellule 24 heures sur 24 pour éviter des
agressions; qu’il a dû, lors d’une telle agression, par auto-défense, blesser
un codétenu au visage; qu’il ne peut intégrer aucune population carcérale; et
qu’il a subi de graves dommages psychologiques.
Le plaignant
reproche également à M. Maltais et à Photo Police de ne pas avoir publié sa
version des faits après la parution des articles en dépit de quatre démarches
que son procureur ou lui-même ont faites à cette fin. Le fait que sa version
des faits ou des correctifs n’aient été publiés ont pour effet, de souligner M.
Filion, d’empêcher que la paix se rétablisse entre lui et ses codétenus.
Le plaignant
estime enfin que le journaliste a outrepassé les limites du droit à la liberté
de presse en allant à l’encontre de ses droits fondamentaux, prévus à la Charte
canadienne des droits et libertés.
Commentaires du mis en cause
Invités à
répondre à cette plainte à plusieurs reprises, ni le journaliste Normand
Maltais ni le rédacteur en chef de Photo Police n’ont donné suite.
Analyse
Les médias et les journalistes doivent livrer au public une information complète et conforme aux faits et aux événements. Ils doivent également accorder un traitement impartial et équilibré aux parties en conflit dans une affaire rapportée. Partant, il est important d’obtenir la version des faits ou le point de vue des personnes ou des groupes mis en cause dans cette affaire.
Dans le cas présent, le Conseil considère que Photo Police et le journaliste Normand Maltais ont traité de façon incomplète le litige opposant le plaignant et quatre policiers devant la Commission de police du Québec (CPQ). Le Conseil estime que le journal et le journaliste auraient dû, notamment, faire état de la version des faits du plaignant. D’une part, ce dernier se trouvait directement mis en cause dans les articles, puisqu’il était la partie requérante dans l’enquête de la CPQ. D’autre part, de l’avis du Conseil, les lecteurs ne disposaient pas de toutes les informations nécessaires pour former leur propre opinion sur l’affaire rapportée.
Aussi, pour les raisons qui précèdent, le Conseil de presse accueille la plainte de M. Denis Filion et adresse un blâme au journaliste Normand Maltais et à l’hebdomadaire Photo Police.
Par ailleurs, en ce qui concerne le grief du plaignant, selon lequel les articles litigieux ont porté atteinte à sa réputation et mis sa vie en danger en milieu carcéral, le Conseil est enclin à croire qu’effectivement la publication d’informations, de la nature de celles qui ont été rapportées, pourrait causer des torts. Le Conseil n’est toutefois pas en mesure d’évaluer ces torts.
Le Conseil déplore enfin l’absence de collaboration du journaliste et de Photo Police dans le présent dossier, lesquels n’ont donné aucune suite aux invitations qui leur ont été faites de répondre à cette plainte.
Analyse de la décision
- C12B Information incomplète
- C12C Absence d’une version des faits
- C17D Discréditer/ridiculiser
- C24A Manque de collaboration