Plaignant
Mme Marie-Thésel
André
Mis en cause
CFJP-TV [TQS,
Montréal] et M. François Dallaire (journaliste)
Résumé de la plainte
Le 28 juin 1990,
à son bulletin de nouvelles de fin de soirée, Télévision Quatre-Saisons porte
atteinte à la réputation du fils de la plaignante en le montrant à l’intérieur
d’une arcade, dans un reportage qui porte sur une campagne de sensibilisation
des jeunes à l’usage du condom.
Griefs du plaignant
Mme Marie-Thésel
André reproche à Télévision Quatre Saisons d’avoir nui à la réputation de son
fils de 14 ans, en le montrant à l’intérieur d’une arcade, manipulant un jeu
électronique, dans le cadre d’un reportage portant sur une campagne de
sensibilisation des jeunes à l’usage du condom. Ce reportage a été diffusé en
soirée, au bulletin de nouvelles du 28 juin 1990.
Mme André
affirme qu’on a attiré son fils à l’intérieur, pour lui offrir une partie
gratuite et le filmer sans lui dire dans quel but on le faisait. Elle ajoute que
cette arcade était identifiée dans le reportage comme «étant le
quartier-général des délinquants» et que son fils s’est donc trouvé «catalogué
en tant que délinquant». Elle indique également, d’après ce que son fils lui a
dit, qu’il y avait d’autres habitués de l’arcade sur place. Elle se demande
pourquoi TQS ne les a pas filmés aux fins du reportage. Elle ajoute: «est-ce le
visage de mon fils, un charmant petit noir, qu’on voulait à tout prix pour
donner plus de poids à ce reportage?»
Commentaires du mis en cause
Télévision
Quatre Saisons a refusé de répondre à cette plainte, affirmant être sous la
juridiction du Conseil canadien des normes de la radiodiffusion.
Toutefois, le
journaliste-auteur du reportage, M. François Dallaire, a répliqué, réfutant les
affirmations de la plaignante. Il dit n’avoir jamais qualifié les arcades de
«quartier général de la délinquance» dans son reportage. Il affirme également
avoir expliqué au fils de Mme André qu’il allait le filmer dans le cadre d’un
reportage portant sur la promotion de l’usage du condom chez les jeunes
adolescents. Enfin, il ajoute que l’angle de prise de vue, le trois-quarts
arrière, rend très difficile l’identification de l’adolescent.
Analyse
Le reportage de M. Dallaire porte sur une campagne de sensibilisation des jeunes à l’usage du condom. On y explique qu’à cette fin une équipe de jeunes de la Rive-sud de Montréal a entrepris de faire le tour des arcades et dépanneurs du secteur, puisque ces lieux sont fréquentés par ceux qu’ils cherchent à rejoindre.
La plaignante reproche d’abord au journaliste d’avoir sollicité les services de son fils sans lui dire dans quel but il allait être filmé. Le journaliste indique pour sa part avoir expliqué au fils de Mme André le contexte dans lequel s’inscrivait le reportage, et que ce dernier, une fois averti, n’a pas hésité à se rendre disponible pour être filmé. Le Conseil n’est pas en mesure ici de trancher sur ce grief, étant placé devant des versions divergentes de la part des parties.
Mme André reproche également au reportage d’avoir identifié l’arcade où son fils a été filmé comme étant le «quartier général des délinquants», et partant, que son fils a été «catalogué en tant que délinquant». Le Conseil ne peut retenir ce grief de la plaignante. Le visionnement du reportage permet en effet de constater qu’il n’y a aucune référence à la délinquance dans celui-ci, et que les lieux dont il est question (dépanneurs, arcades) sont identifiés comme des lieux fréquentés par les jeunes.
Enfin, Mme André considère que son fils a subi un préjudice en apparaissant dans ce reportage. Ce dernier y apparaît deux fois, durant 3 et 4 secondes et vu de trois-quarts arrière. Il est évident ici, malgré l’angle de prise de vue par TQS, que le jeune André pouvait être reconnu par ses proches et son entourage. Le Conseil n’est toutefois pas en mesure d’évaluer si ce dernier a subi un préjudice du fait de son apparition à l’écran.
Le Conseil met cependant en garde les médias utilisateurs d’images: ceux-ci doivent toujours être extrêmement prudents lorsqu’ils ont à publier des photos ou des séquences représentant des personnes mineures afin d’éviter de leur porter préjudice. Les médias devraient idéalement obtenir le consentement des parents. S’ils ne peuvent le faire, ils doivent s’assurer de bien informer les jeunes de l’objet du reportage ou de l’émission, ne jamais insister pour obtenir leur participation, et faire preuve de rigueur, de prudence et de discernement afin de ne pas les associer à des sujets, des contextes, ou des milieux auxquels ils n’appartiennent pas.
Par ailleurs, le Conseil s’interroge ici sur le fait que TQS ait illustré la clientèle des lieux devant être visités durant la campagne de sensibilisation des jeunes à l’usage du condom par une seule personne, un adolescent noir. Un portrait plus juste de la clientèle fréquentant ces lieux aurait comporté des images présentant davantage la pluralité du monde adolescent.
Enfin, le Conseil déplore que la direction de Télévision Quatre Saisons ait refusé de collaborer à l’étude de la plainte de Mme André.
Analyse de la décision
- C16B Divulgation de l’identité/photo
- C17F Rapprochement tendancieux
- C18D Discrimination
- C23H Interview et images d’enfants
- C24A Manque de collaboration