Plaignant
Centre de santé
Aquathera
Représentant du plaignant
Mme Francine de Grave
(présidente, Centre de santé Aquathera)
Mis en cause
CIVM-TV
[Radio-Québec, Montréal] et Mme Josée Blanchette (chroniqueure)
Représentant du mis en cause
M. Bernard
Benoist (avocat-conseil, CIVM-TV [Radio-Québec, Montréal]) et M. Sylvain
Desjardins (rédacteur en chef, Consommaction, CIVM-TV [Radio-Québec, Montréal])
Résumé de la plainte
Dans un
reportage diffusé le 21 novembre 1990 à l’émission «Consommaction», sur les
ondes de Radio-Québec, la chroniqueure Josée Blanchette formule des commentaires
négatifs et destructeurs sur les services et les produits d’algothérapie. Ce
reportage utilise des images tournées au Centre de santé Aquathera de Montréal,
alors que la chroniqueure a reçu ses soins dans un établissement de Magog. Ses
commentaires ne peuvent donc pas s’appliquer au Centre que dirige la
plaignante.
Faits
La plainte a
trait à une séquence (10 minutes) de l’émission de télé Consommaction du 21
novembre 1990 portant sur l’algothérapie, ses coûts, des attitudes à son égard,
etc…, produite par la société Coscient et diffusée par la société
Radio-Québec.
Il s’agit d’une
chronique visant à renseigner les consommateurs relativement à un service
d’algothérapie et à des produits reliés à ce service.
La chroniqueure
Josée Blanchette a donné son point de vue après que le téléspectateur eut pu
constater, grâce à un reportage descriptif pré-enregistré chez Aquathera à
Montréal, de quel genre de produits et de service il s’agissait. Le reportage
était suivi d’une critique: la chroniqueure a trouvé l’expérience longue (5
heures), pénible (vous êtes dans une espèce de grande couche géante avec un
enrobage d’algues) et très coûteuse (250 $ à Montréal pour 1 personne et 115 $
par personne à Magog, pour une journée dans les deux cas).
La chroniqueure
souligne ensuite le peu d’effets qu’elle a ressentis. Elle signale aussi divers
produits reliés à l’algothérapie et leurs prix approximatifs.
Griefs du plaignant
La présidente du
centre de santé Aquathera, de Montréal, madame Francine de Grave, se plaint (le
12 décembre 1990) vis-à-vis «les commentaires négatifs et destructeurs de la
part de madame (Josée) Blanchette» et demande un droit de réponse avec un
chroniqueur autre que cette dernière.
La plaignante
précise que madame Blanchette n’avait pas pris de soins chez Aquathera et
n’avait pas donné suite, après la diffusion du 21 novembre, à son invitation de
venir prendre des soins dans son centre de santé. La présidente du centre de
santé dit «questionner» la recherche et l’objectivité de madame Blanchette
(lorsque cette dernière dit vouloir offrir des pistes de réflexion et susciter
une approche critique chez les consommateurs). Elle conteste que les
commentaires de la chroniqueure puissent s’appliquer à son centre de santé.
Commentaires du mis en cause
La présente
plainte met en cause la société Radio-Québec, mais elle touche aussi Mme Josée
Blanchette, journaliste, de la maison Coscient Inc., entreprise chargée de la
production de la série Consommaction.
Les commentaires
de la partie défenderesse sont en substance les suivants:
– le point de
vue de Josée Blanchette sur l’algothérapie ne concernait pas spécifiquement
l’entreprise Aquathera mais plutôt le type de soins en général (Josée
Blanchette, lettre du 1er février 1991);
– Radio-Québec,
tout en assumant sa responsabilité de radiodiffuseur, n’est pas à l’origine des
propos tenus par madame Josée Blanchette (Bernard Benoist, lettre du 29 mai
1991);
– Radio-Québec
s’en rapporte et souscrit à la teneur de la lettre que le rédacteur en chef de
Consommaction, M. Sylvain Desjardins, adressait au nom de Coscient Inc., à la
présidente du Centre de santé Aquathera, le 17 décembre 1990 (Bernard Benoist,
lettre du 24 juillet 1991);
– l’émission s’adressait
à une clientèle dans l’ensemble québécoise et non strictement montréalaise et
les soins ont été pris par la chroniqueure de l’émission dans un centre
d’algothérapie de la région de Magog (Sylvain Desjardins, lettre du 17 décembre
1990);
– le tournage
télévisuel au centre Aquathera de Montréal s’est fait avec le consentement de
la présidente du centre (Sylvain Desjardins, lettre du 17 décembre 1990);
– du fait que
les produits et techniques utilisées chez Aquathera et au centre de Magog sont
pratiquement en tous points identiques, il est logique et pertinent de faire
des recoupements entre les deux endroits pour asseoir les bases du jugement de
la chroniqueure de l’émission (Sylvain Desjardins, lettre du 17 décembre 1990);
– l’émission n’a
aucune prétention scientifique, les jugements portés sont d’ordre personnel et
la validité des commentaires repose sur la recherche d’une information complète
(Sylvain Desjardins, lettre du 17 décembre 1990);
– la pratique de
l’algothérapie n’a pas encore réussi à démontrer hors de tout doute ses effets
concrets sur le plan scientifique (Sylvain Desjardins, lettre du 17 décembre
1990);
– le mandat de
l’émission étant d’offrir des pistes de réflexion et de susciter une approche
critique chez les consommateurs, elle ne peut se limiter à offrir des contenus
strictement descriptifs des différentes pratiques sur le marché (Sylvain
Desjardins, lettre du 17 décembre 1990);
– l’émission
était conforme au mandat du diffuseur Radio-Québec (Sylvain Desjardins, lettre
du 17 décembre 1990).
Analyse
De façon globale, les médias et les journalistes doivent livrer au public une information complète et conforme aux faits et aux événements. La rigueur intellectuelle et professionnelle dont ils doivent faire preuve ne signifie aucunement restriction ou censure, mais est plutôt synonyme d’exactitude, de précision, d’intégrité et de respect des personnes, des événements et du public.
La chronique est un genre d’information qui laisse à ses auteurs une grande latitude dans l’expression de leurs points de vue et de leurs jugements. Toutefois, un chroniqueur ne saurait se soustraire aux exigences de rigueur et d’exactitude ni laisser planer des malentendus qui risquent de discréditer des personnes.
Relativement au droit de réponse demandé par la plaignante, le Conseil n’y donne pas suite: il n’appartient pas au Conseil d’obliger une entreprise de presse à accorder un droit de réplique, nul n’ayant accès de plein droit, selon le Conseil, aux pages d’un journal ou aux ondes des stations de radio et de télévision.
En ce qui concerne le reportage qui est l’objet de la plainte, la chroniqueure Josée Blanchette n’a pas pris de soins chez Aquathera à Montréal mais on y a tourné l’ensemble des images ayant servi à illustrer une expérience vécue dans la région de Magog. Le Conseil estime, à cet égard, que les téléspectateurs ont pu en conclure que les commentaires négatifs de la chroniqueure s’appliquaient au centre de santé Aquathera.
Le Conseil reproche donc à Radio-Québec, à la société de production Coscient Inc. et à Josée Blanchette une désinvolture trop grande dans le traitement journalistique et un manque évident de rigueur dans le cadre d’une émission d’information destinée aux consommateurs.
Analyse de la décision
- C09A Refus d’un droit de réponse
- C15A Manque de rigueur
Date de l’appel
3 May 1993
Appelant
CIVM-TV
[Radio-Québec, Montréal]
Décision en appel
Après étude du
dossier, les membres de la Commission d’appel ont convenu à l’unanimité de
maintenir intégralement la décision rendue par le Comité des cas.
Griefs pour l’appel
Radio-Québec
porte appel de la décision.