Plaignant
Mme Francine
Beaudet-Lemay
Mis en cause
Le Peuple de
Lotbinière [Laurier Station] et M. Alain Couillard (directeur de l’information)
Représentant du mis en cause
Mme Marie
Rodrigue (procureur, Le Peuple de Lotbinière [Laurier Station])
Résumé de la plainte
L’article «Rang
Leclerc de Saint-Edouard : Un face à face mortel», paru le 20 octobre 1991 dans
Le Peuple de Lotbinière, sous la signature de son directeur de l’information,
M. Alain Couillard, traite ce drame de manière inacceptable, en rapportant
certains commentaires sur la vie privée de la victime.
Faits
Il s’agit d’une
plainte portée contre l’hebdomadaire Le Peuple de Lotbinière et M. Alain
Couillard, directeur de l’information, concernant un article intitulé «Rang
Leclerc de Saint-Edouard: Un face à face mortel». L’article, paru le 20 octobre
1991, rapporte un accident d’automobiles dans lequel M. Guy Lemay, beau-frère
de la plaignante, a trouvé la mort et deux autres personnes ont subi des
blessures.
Griefs du plaignant
Mme Francine
Beaudet-Lemay reproche au journal et à son directeur de l’information d’avoir
relaté cet accident de façon inacceptable en publiant certains commentaires sur
la vie privée de la victime.
Dans une mise en
demeure signifiée au journal, par l’entremise de ses avocats, Mme Beaudet-Lemay
indique que:
1. la
description des faits est erronée: l’accident était un face à face. Or
l’article rapporte que les deux voitures roulaient en direction sud;
2. l’accident
s’est produit vers 17 heures et non pas à 19 heures 10 comme le relate
l’article;
3. le permis de
conduire de M. Lemay était suspendu jusqu’en juin 1992 et non jusqu’en décembre
1992 comme le rapporte l’article;
4. «certains
passages de l’article traitant des supposées acrobaties de Monsieur Lemay et de
sa conduite sans ménagement ne sont que des ragots sans aucun fondement».
Enfin, Mme
Beaudet-Lemay demandait une rectification des faits et la publication de la
version des faits de la famille. A défaut de le faire, elle entendait déposer
une plainte au Conseil de presse.
Le journal, par
l’entremise de ses procureurs, a répondu à cette mise en demeure par la
soumission d’une quittance, dont la plaignante joignait copie à sa plainte.
Cette quittance comprenait les termes suivants:
1. une
correction des faits par une mise au point;
2. une
indication que la famille se dissociait des commentaires émis par certains
citoyens relativement à la façon de conduire de M. Lemay;
3. une
renonciation de la succession Guy Lemay à toute poursuite quelle qu’elle soit;
4. aucune
admission de responsabilité ou de faute de la part du journal, mais uniquement
un règlement à l’amiable.
Mme
Beaudet-Lemay indique qu’elle a refusé de signer cette quittance, et que par
conséquent, il n’y a pas eu de suite à sa demande de correction.
Commentaires du mis en cause
M. Alain
Couillard, directeur de l’information, et Le Peuple de Lotbinière, par
l’entremise de leur procureur d’alors, Mme Marie Rodrigue, considèrent les
motifs au soutien de cette plainte comme étant non fondés.
Mme Rodrigue
fait valoir que M. Couillard a relaté de façon juste et de bonne foi les
événements survenus le 17 octobre 1991; et qu’il était justifié de «tenir pour avérés
les propos qui lui ont été tenus par les agents de la Sûreté du Québec ainsi
que par les citoyens de Saint-Edouard».
Elle souligne
que ce sont les membres de la Sûreté du Québec qui ont indiqué à M. Couillard que
le permis de conduire de M. Lemay était suspendu jusqu’en décembre 1992; et que
le fait que celui-ci ait été suspendu jusqu’en juin 1992 «n’est d’aucune
pertinence et ne change absolument rien au sens du reportage».
En ce qui
concerne les informations relatives à l’heure de l’accident et aux directions
des véhicules, Mme Rodrigue souligne que ce sont là des inexactitudes mineures,
et que le reportage est dans son ensemble exact.
Mme Rodrigue
remarque qu’il était d’intérêt public de rapporter la nouvelle de cet accident,
et de divulguer des renseignements concernant le conducteur Guy Lemay. Elle
considère également que le journal n’avait pas, dans le cadre de la rédaction
de cet article, à obtenir la version des faits de la famille, d’autant plus
qu’aucun de ses membres n’était présent lors de l’accident.
Enfin, Mme
Rodrigue fait part au Conseil que les discussions et les négociations qui ont
eu lieu entre les parties ne relèvent pas des questions à être tranchées par le
Conseil de presse, et sont par conséquent non pertinentes.
Analyse
Le Conseil de presse réitère le principe qu’il a toujours fait valoir, à savoir que le public a droit à une information juste et équitable. L’exactitude des faits demeure primordiale.
Dans le cas présent, le Conseil estime qu’il était du devoir du journal Le Peuple de Lotbinière d’apporter un rectificatif aux informations erronées qu’il avait publiées (direction des véhicules, heure de l’accident, durée de la suspension du permis de conduire de M. Lemay), d’autant plus qu’il a reconnu ces inexactitudes dans un projet de quittance. Le Conseil ne peut par ailleurs retenir les griefs de la plaignante eu égard à ce qui a été rapporté concernant la conduite automobile de M. Lemay, ainsi que les informations relatives à la suspension de son permis de conduire et aux résultats à venir des analyses de son sang. Il y a lieu de souligner que M. Lemay a été impliqué dans un accident alors qu’il était en infraction avec la loi (permis de conduire suspendu). En conséquence, les informations d’ordre privé qui ont été divulguées à son sujet devenaient d’intérêt public.
Analyse de la décision
- C16D Publication d’informations privées
- C19A Absence/refus de rectification