Plaignant
Moquin, Ménard,
Giroux et Associés, comptables agréés, et Gestion Giroux, du Temple Inc.
Représentant du plaignant
M. André Champagne
(avocat, Lapointe, Schachter, Champagne 1/4 Talbot)
Mis en cause
Le Journal de
Montréal et M. Jean Pelletier (journaliste)
Résumé de la plainte
Le journaliste
Jean Pelletier du Journal de Montréal rédige des articles diffamatoires à
l’égard des plaignants. Ainsi, les articles «Un notaire est poursuivi par la
CVMQ» et «Moquin Ménard Giroux et Associés : mise au point», parus les 19 et 24
décembre 1991, contiennent les mots «poursuite» et «arnaque», ainsi que des
affirmations fausses.
Faits
Il s’agit d’un
dossier comportant deux articles d’un quotidien traitant d’une promotion
immobilière. Les articles ont pour titres: «Un notaire est poursuivi par la
CVMQ» (19 décembre 1991) et «Moquin Ménard Giroux et Associés: mise au point»
(24 décembre 1991).
Griefs du plaignant
La plainte est logée
par les entreprises Moquin, Ménard, Giroux et Associés, comptables agréés, et
Gestion Giroux, Du Temple Inc., la première à titre de vérificateurs et la
seconde à titre de gestionnaires dans les sociétés en commandite du promoteur
immobilier Yves Foisy. Ces entreprises sont représentées par les avocats
Lapointe, Schachter, Champagne 1/4 Talbot.
La plainte
indique que le journaliste Jean Pelletier se plaît depuis le mois de mai 1991 à
écrire des articles que les entreprises plaignantes considèrent diffamatoires.
Elle précise que, soit que le journaliste Jean Pelletier écrit volontairement
des «menteries» pour leur causer des dommages ou bien il n’a pas la compétence
pour être journaliste en matière de transactions commerciales.
La plainte porte
sur le texte du journaliste, intitulé «Un notaire est poursuivi par la CVMQ»,
du 19 décembre 1991 et sur un autre texte, non signé, du 24 décembre 1991,
intitulé «Moquin, Ménard, Giroux et Associés: mise au point». Elle fait aussi
référence à d’autres articles sans les inclure.
Pour ce qui est
de l’article du 19 décembre 1991, la plainte dit que cet article avance que la
Commission des valeurs mobilières du Québec a déposé trois plaintes, comprenant
soixante-quatre chefs d’accusation, contre un promoteur immobilier.
Plus
spécifiquement, la plainte porte sur le titre de l’article publié par Le
Journal de Montréal le 19 décembre 1991, soit: «Un notaire est poursuivi par la
CVMQ», sur l’emploi du mot «arnaque», sur l’emploi du mot «poursuite», et sur
des affirmations que les plaignants disent fausses, notamment que «Aussi bien
Willie Morin que ses comptables ont choisi d’ignorer cette ordonnance (de la
CVMQ) et continuèrent la sollicitation d’investisseurs par voie de notices
d’offres…»
Commentaires du mis en cause
Le journaliste
Jean Pelletier n’est plus à l’emploi du quotidien Le Journal de Montréal.
Commentant la plainte, il affirme que les faits rapportés dans les articles
contestés l’ont été à la suite d’une longue et minutieuse recherche, qu’ils ont
été rédigés en toute bonne foi, et qu’ils ne sont pas le fruit d’une quelconque
vendetta.
Il explique que
l’article en litige a été écrit à la suite de poursuites entreprises par la
CVMQ contre MM. Willie Morin et Guy Berthiaume. Il explique en outre que le
choix du mot «arnaque» lui est inspiré par les documents et témoignages
recueillis dans le cadre de son enquête de plusieurs mois.
Il affirme, par
ailleurs, n’avoir écrit nulle part que la CVMQ avait intenté des poursuites
contre Moquin, Ménard, Giroux et Associés.
Enfin, il
affirme que c’est Moquin, Ménard, Giroux et Associés qui ont préparé le
prospectus, sur la foi duquel les épargnants ont investi dans le projet
immobilier en cause du promoteur Willie Morin.
Pour ce qui est
de l’emploi du mot «poursuite», Jean Pelletier signale que le représentant des
plaignants reconnaît lui-même, dans une lettre, que sur le plan juridique on
peut en matière civile utiliser le mot «poursuite».
Enfin, le
journaliste Jean Pelletier dit que l’article s’en tenait à rapporter
rigoureusement le témoignage d’investisseurs qui s’estiment avoir été arnaqués
par un promoteur immobilier et ses partenaires.
Réplique du plaignant
Les plaignants
ont répliqué aux commentaires du défendeur en affirmant qu’il n’y a jamais eu
de prospectus de préparé dans le dossier, mais que Moquin, Ménard, Giroux et
Associés avaient simplement préparé un bilan pro forma et des commentaires sur
les prévisions budgétaires, et que, au moment où eut lieu la présentation (5
septembre) aux futurs épargnants aucun interdit n’avait été prononcé par la
CVMQ (8 septembre 1991).
Analyse
Le tribunal d’honneur du Conseil de presse entend considérer ici le titre de l’article du 19 décembre publié par le quotidien, l’emploi des mots «arnaque» et «poursuite» dans le cadre de cet article et l’affirmation contenue dans ce même article et que les plaignants disent fausse.
A la lecture du titre publié le 19 décembre, on peut constater qu’il indique qu’un «notaire est poursuivi…» et que ce notaire est nommé dans l’introduction comme étant Guy Berthiaume. Le lien entre l’un des plaignants, Moquin, Ménard, Giroux et Associés et le notaire Berthiaume, pour ce qui est de la question d’une poursuite, n’est établi nulle part dans le titre ou dans l’introduction. Le Conseil ne retient donc pas cet aspect de la plainte, telle qu’elle est formulée. Le Conseil est même d’opinion que les journalistes et les médias ont le devoir de donner au public les éléments nécessaires pour éclairer son jugement sur les événements et les phénomènes sociaux et qu’ils ont aussi le devoir de ne négliger aucun aspect dont l’absence aurait pour effet de les travestir ou d’en déformer la signification.
Pour ce qui est de l’emploi du mot «arnaque», le Conseil n’a pas les éléments nécessaires pour se prononcer sur la justesse du terme utilisé. Quant au mot «poursuite», le Conseil a constaté que l’usage veut qu’il soit utilisé à la fois en matière criminelle et en matière civile, autant dans les milieux judiciaires que journalistiques.
Enfin, pour ce qui est de la fausseté ou de la véracité de l’affirmation du journaliste, à l’effet que le plaignant Moquin, Ménard, Giroux et Associés avait choisi d’ignorer une ordonnance de la CVMQ et avait continué sa sollicitation d’investisseurs par voie de notices d’offres, le Conseil de presse n’est pas en mesure de dire ce qui est vrai et ce qui est faux.
Le Conseil de presse a déjà affirmé que le droit du public à l’information serait compromis si les médias s’abstenaient de faire état de poursuites judiciaires d’intérêt public, même avant que les jugements des tribunaux n’aient été rendus; ils doivent toutefois faire preuve de rigueur, de prudence et de discernement, afin d’éviter de porter atteinte au droit des parties impliquées d’obtenir un procès juste et équitable. Dans le cas présent le Conseil ne retient pas le grief formulé.
Analyse de la décision
- C11B Information inexacte
- C11H Terme/expression impropre
- C17H Procès par les médias