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D1992-09-039; D1992-09-040

15 décembre 1993

Plaignant

Commission des
droits de la personne du Québec; Communauté urbaine de Montréal

Représentant du plaignant

M. Yves Lafontaine
(président, Commission des droits de la personne du Québec); M. Michel Hamelin
(président du Comité exécutif, Communauté urbaine de Montréal)

Mis en cause

Photo Police
[Montréal], M. Yves Mallette et Jean-Marc Provost (journalistes)

Représentant du mis en cause

M.Yvon Dubois
(président, Photo Police [Montréal])

Résumé de la plainte

Le 31 juillet
1992, Photo Police publie une série de reportages surtitrés «Les Blancs en ont
assez des Noirs!», comprenant 16 photos et 8 articles. Ces textes encouragent la
haine raciale et la violence. Photo Police bafoue une série de règles
déontologiques reconnues, comme en témoignent la confusion des genres au
soutien d’une thèse, l’adoption d’une vision manichéenne des choses, la
déformation des faits, les généralisation propres à alimenter les préjugés et
les insinuations visant à ridiculiser une personne ou un groupe.

Faits

L’hebdo Photo
Police publiait, durant la semaine du 31 juillet au 7 août l992 un texte de 7
pages surtitré: «Les Blancs en ont assez des Noirs!», et comportant 16 photos
et 8 articles ayant les titres suivants: «Trou-du-cul de la semaine/Dan Philip»
p. 2; «Héros de la semaine/Yves Prud’homme» p. 2; «La voix de la majorité
silencieuse» p. 2; «Une nouvelle criminalité fait son apparition/Les gangs de
Noirs sèment la terreur… et ce n’est pas fini!» p. 3; «Ils mettent en danger
la vie des innocents» p. 4; «L’héritage du crime et de la mort» p. 5; «Noirs et
policiers: qui sont les vrais racistes?» p. 6; «Dan Philip: un défenseur
aveugle des Noirs» p. 7.

La Commission
des droits de la personnne du Québec et la Communauté urbaine de Montréal ont
déposée une plainte à l’encontre de Photo Police eu égard à cette parution.

Griefs du plaignant

La plainte de la
Commission des droits de la personne du Québec, datée du 26 août 1992, vise
l’hebdo susmentionné et la série d’articles dont il est fait état ci-dessus.
Selon la Commission, «il existe un risque sérieux que la série d’articles
publiés par Photo Police rende légitime l’hostilité interraciale au sein de la
population québécoise et encourage la haine raciale et, partant, la violence.
Elle représente de ce fait, une menace à la paix sociale.»

La Commission
considère que Photo Police a, dans la publication de ses articles, bafoué toute
une série de règles de déontologie reconnues et partagées par la majorité des
journalistes et des entreprises de presse, savoir: (1) les médias ne doivent
pas confondre les genres, (2) les médias doivent fournir une information
équilibrée et conforme aux faits, (3) les médias doivent respecter les
personnes et ne pas entretenir les préjugés.

La Commission
des droits de la personne du Québec reproche à Photo Police les faits suivants:
(1) «la confusion des genres au soutien d’une thèse», (2) «une vision
manichéenne des choses», (3) «des informations non conformes aux faits», (4)
«des prophéties propres à encourager la violence», (5) «des généralisations
propres à alimenter les préjugés raciaux», et (6) «des termes et des
insinuations visant à ridiculiser et à discréditer une personne ou un groupe».

La Commission
des droits de la personne du Québec souhaite donc que le Conseil de presse
rappelle et explicite un certain nombre de principes d’éthique journalistique,
qu’il insiste sur la responsabilité sociale des organes d’information, et qu’il
blâme sévèrement MM. Yves Mallette et Jean-Marc Provost, pour ne pas avoir
respecté ces principes fondamentaux de la pratique journalistique.

Communauté
urbaine de Montréal:

La plainte de la
Communauté urbaine de Montréal, datée du 11 août 1992, vise aussi l’hebdo
susmentionné et la série d’articles dont il est fait état ci-dessus. Les
membres du comité exécutif de la Communauté ont déploré ce genre de publication
«irresponsable et incendiaire» et ils demandent que de tels écrits soient
sévèrement condamnés par les autorités compétentes.

La Communauté
considère que le Conseil de presse a les pouvoirs nécessaires pour imposer au
journal Photo Police un meilleur sens des responsabilités; elle souhaite que
l’action du Conseil fera en sorte que la publication de tels articles ne se
reproduise pas.

Commentaires du mis en cause

Le président de
Photo Police, M. Yvon Dubois, a transmis au Conseil de presse, le 22 septembre
l992, un document intitulé Position de la direction sur le dossier de la
criminalité chez les Noirs, par lequel il indique avoir fait connaître
publiquement la position de la direction de Photo Police dans l’affaire. Il y
est écrit: «Le journal reconnaît que si son titre de la page frontispice pouvait
être choquant et que les membres des communautés noires de Montréal pouvaient
se sentir indignés, le journal Photo Police n’avait pas l’intention de léser
Blancs ou Noirs qui n’ont rien à voir avec la criminalité que nous dénoncions».
Dans sa lettre du 22 septembre, M. Dubois précise que «depuis ces articles,
d’autres événements se sont produits, mais que le ton a maintenant changé: la
communauté noire reconnaît l’existence du problème, et la direction de la
police a décidé d’y faire face.»

Réplique du plaignant

Le président de
la Commission des droits de la personne, M. Yves Lafontaine, commente la
réponse des défendeurs dans une lettre datée du l9 janvier l993. Il rappelle
avoir mentionné dans sa plainte du 26 août 1992 qu’il avait pris connaissance
du texte intitulé: «Position de la direction sur le dossier de la criminalité
chez les Noirs», annexé à la réponse des défendeurs. Il rappelle également
avoir alors écrit: «On constatera que bien que Photo Police affirme ne pas
avoir eu l’intention de démontrer que tous les Noirs étaient des criminels, la
plupart de ses insinuations et de ses allégations s’y trouvent explicitement ou
implicitement réitérées, et qu’aucune reconnaissance que des fautes de
déontologie aient été commises n’y est faite. Quoi qu’il en soit, il nous
paraît douteux que la publication de cette mise au point bien timide, deux
semaines après la publication du dossier faisant l’objet de la présente
plainte, soit suffisante pour réparer le tort causé par celle-ci».

M. Lafontaine
ajoute, relativement à l’affirmation de M. Dubois, selon qui «le ton a
maintenant changé: la communauté noire reconnaît l’existence du problème
[…]», que «à l’époque où Photo Police a publié sa série d’articles, un
minimum de recherches et de rigueur, aurait permis à cet hebdomadaire de
constater la préoccupation manifeste des représentants de la communauté noire
face à la criminalité de quelques-uns de ses membres.» «En outre, écrit-il,
l’approche biaisée, utilisée pour rendre compte de l’entrevue faite avec le
président de La Ligue des Noirs du Québec semblait exclure que M. Jean-Marc
Provost entende véritablement les réponses que M. Dan Philip lui a fournies à
cet égard.»

Pour sa part, le
président du comité exécutif de la Communauté urbaine de Montréal, M. Michel
Hamelin, a signalé avoir pris connaissance de l’argumentation de la Commission
des droits de la personne; il a précisé que cette argumentation reflète les
préoccupations de la CUM.

Commentaires des tiers

Les groupes
suivants ont également fait connaître leur opinion par lettre à ce sujet: Le
regroupement des ressources alternatives en santé mentale du Québec (Mme
Lorraine Guay, coordonnatrice); Naissance Renaissance (Mme Jeanne Hubert,
agente de relations publiques et de liaison); La Bonne Etoile Joliette et Le
Centre d’aide et de prévention d’agressions à caractère sexuel.

Analyse

Le Conseil de presse reconnaît et affirme le droit à la presse et aux journalistes de transmettre l’information, ceci en vertu des libertés de pensée, de parole, d’expression et d’opinion. A ce titre, le reportage est destiné à informer le public, c’est-à-dire à lui rappeler et à lui expliquer les faits en les situant dans leur contexte, pour lui permettre de se faire, en toute connaissance de cause, une opinion sur les événements et sur l’actualité.

L’attention que les médias décident de porter à un sujet particulier relève de leur jugement rédactionnel. Le choix de ce sujet et sa pertinence, de même que la façon de le traiter dans le respect des règles journalistiques, leur appartient en propre.

Le Conseil de presse tient à souligner que, pour remplir véritablement leur rôle et informer la population de façon adéquate, les journalistes ont non seulement le droit mais le devoir d’aborder des sujets polémiques et souvent délicats.

Toutefois, la rigueur intellectuelle et professionnelle dont doivent faire preuve les médias et les journalistes constitue la garantie d’une information de qualité, complète et diversifiée, conforme aux faits et aux événements. Cette information doit répondre à un souci d’exactitude, de précision, d’intégrité et de respect des personnes et du public.

D’autre part, les médias et les journalistes doivent s’entourer de tout le professionnalisme nécessaire afin d’éviter les exagérations, les insinuations ou les généralisations qui conduiraient à rendre l’information inexacte ou partiale.

C’est donc la responsabilité des entreprises de presse et des journalistes que de se montrer prudents et attentifs aux dérives du traitement de l’information.

Dans le cas présent, le Conseil de presse relève un manque de rigueur dans les mises en association. Rien dans les textes, autre que l’affirmation du journaliste et celle du média, ne vient étayer de multiples rapprochements. Le Conseil considère être ici en présence d’un travail journalistique particulièrement déficient, où le raccourci tient lieu de recherche.

L’ensemble du reportage, en multipliant les insinuations, les exagérations et les généralisations, en recourant à des titres à caractère sensationnaliste, conduit, non seulement à rendre l’information inexacte et partiale, mais surtout à discréditer le groupe mis en cause et à entretenir les préjugés à son égard.

A ce titre, le Conseil de presse constate tout d’abord que les journalistes, par des rapprochements entre des événements, des drames, des crimes, des personnes et des organisations, ont laissé libre cours à des insinuations, telles que: – «[…] Dan Philip risque (sic) de provoquer de violents affrontements entre – Noirs et Blancs, […]» (page 2); – «[…] il met en danger les bonnes relations que devraient entretenir Noirs et Blancs.» (page 2); – «le racisme loge chez les Noirs» (page 7).

De plus, Photo Police et ses journalistes ont exagéré des faits au point de déformer la réalité, en affirmant entre autres que: – «chaque jour des centaines de manifestants Noirs prenaient d’assaut les rues de la métropole» (page 6); – «Contrôle de la drogue, émeutes, prostitution, guerre des clans, viols de fillettes, la violence qui sévit chez nos « frères » Noirs n’a plus de limites.» (page 3).

Enfin, par des généralisations sans fondement véritable, telles que: – le titre de la une répété sur toutes les pages «les Blancs en ont assez des Noirs»; – «Gangs de l’ouest, Jamaïcains, Haïtiens, Anglophones, Francophones, tous se tirent dessus, se battent, se menacent, se volent et s’entre-tuent.» (page 3);

les journalistes ont contribué à semer la confusion dans l’esprit des lecteurs par des commentaires qui n’ont pas pu être clairement établis ou démontrés, mais seulement présupposés par les auteurs.

En conclusion, Photo Police, sa direction et ses journalistes Yves Mallette et Jean-Marc Provost ont étendu à l’ensemble des Noirs de Montréal des fautes commises par des individus et par là, ont grossi et déformé la réalité de la criminalité chez ce groupe de la société.

De ce fait, ils ont contrevenu non seulement à une responsabilité professionnelle d’honnêteté envers le public, mais également à une responsabilité sociale des médias d’information et de leurs professionnels d’éviter d’entretenir ou de cultiver des préjugés racistes ou autres.

Le Conseil de presse blâme donc sévèrement l’hebdomadaire Photo Police et les journalistes Yves Mallette et Jean-Marc Provost pour leur manque de responsabilité, pour leur recherche de sensationnalisme, et pour leur choix de termes méprisants à l’égard de la communauté noire.

Rappelons que ce n’est pas le choix du sujet qui est ici mis en cause mais la manière dont il a été abordé.

Le Conseil de presse souhaite que ces principes d’éthique soient appliqués dans tous les cas où un article ou une série d’articles, en usant de sensationnalisme, d’insinuations, d’exagérations, et de généralisations, conduiraient à jeter le discrédit sur un groupe social, quel qu’il soit.

Analyse de la décision

  • C14A Sensationnalisme/exagération/insistance indue
  • C15C Information non établie
  • C15H Insinuations
  • C18B Généralisation/insistance indue
  • C18C Préjugés/stéréotypes
  • C18F Discrimination (couverture)

Tiers

Le regroupement
des ressources alternatives en santé mentale du Québec, Naissance Renaissance,
La Bonne Etoile Joliette et Le Centre d’aide et de prévention d’agressions à
caractère sexuel

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