Plaignant
M. Patrice
Drouin (neurologue)
Mis en cause
Le Journal de
Québec et M. François Bourque (journaliste)
Résumé de la plainte
Dans son reportage
«Les malades sont des menteurs», publié le 2 février 1994 par Le Journal du
Québec, le journaliste François Bourque déforme les propos du plaignant en le
citant hors contexte, ce qui confère aux extraits rapportés un caractère
sensationnaliste. Ce texte, qui traite des problèmes rencontrés par certaines
personnes dans leurs relations avec la Société d’assurance automobile du
Québec, ne renferme pas les nuances permettant de comprendre le point de vue du
plaignant, et son titre ne reflète pas la discussion de ce dernier avec le
journaliste.
Faits
La plainte
concerne un dossier composé d’une série d’articles parus dans Le Journal de
Québec en janvier et février 1994, et plus particulièrement l’article du 2
février portant le titre «Les malades sont des menteurs», sous la signature du
journaliste François Bourque. Il traite des problèmes auxquels se heurtent
certains bénéficiaires lorsqu’ils doivent transiger avec la Société d’assurance
automobile du Québec.
Griefs du plaignant
Le Dr Patrice
Drouin, neurologue, considère avoir été cité hors contexte par le journaliste.
Il fait
remarquer que François Bourque se serait uniquement servi d’une infime partie
de leur entretien d’une durée relativement importante, partie où le neurologue
mentionne que les malades sont tous des menteurs. De ce fait, le neurologue
accuse le journaliste d’avoir simplement voulu rendre sa phrase
sensationnaliste. Pour sa part, le Dr Drouin dit avoir voulu exprimer le fait
de façon générale dans le cadre de la pratique médicale, puisque les malades ne
sont pas objectifs lorsqu’il est question de leur santé.
Le Dr Drouin
croit que le titre de l’article, en plus de pouvoir signifier que le praticien
se méfie de tout le monde, le présente comme d’une façon qui ne reflète pas les
discussions qu’il a eues avec le journaliste. Il considère aussi que tout ceci
peut entacher sa réputation.
Il soutient
enfin que les nuances qui auraient pu permettre aux lecteurs de bien comprendre
le sens de ses propos sont inexistants, parce que le journaliste François
Bourque lui aurait dit que ce n’est pas là le genre de propos pour Le Journal
de Québec. Le médecin y a vu du mépris pour le lecteur.
Commentaires du mis en cause
M. Bourque
estime qu’il a rapporté la phrase telle que prononcée par le Dr Drouin; il fait
référence à la notion de menteur alors que le neurologue a utilisé le mot à
deux reprises, et ce même si le journaliste a vérifié auprès de lui si
l’utilisation du mot menteur était exacte, de façon à dissiper tout malentendu.
Le journaliste
juge avoir sélectionné les informations pertinentes, dans le contexte
approprié. Il s’était donné pour objectif de simplifier son texte, puisque le
domaine médical comporte parfois des termes complexes, et puisqu’il prenait
pour acquis qu’il ne s’adressait pas à des lecteurs spécialisés dans le domaine
du monde médical.
Réplique du plaignant
Le Dr Drouin
trouve insuffisants les détails et les explications ajoutés par M. Bourque. Il
n’est pas d’accord avec le titre et le premier paragraphe du texte où, selon
lui, la description que le journaliste fait de son travail fait en sorte que
son rôle de médecin serait lié à celui de démasquer les menteurs, un peu comme
s’il donnait une fausse représentation du rôle de l’expert.
Analyse
Le choix et le traitement de l’information relèvent du jugement rédactionnel des médias et des journalistes. Cela doit pourtant se faire en conformité avec les règles journalistiques. Ainsi, un journaliste a le droit de traiter l’information recueillie en résumant les propos de l’interviewé, sans dénaturer ou tronquer les faits.
Dans le cas présent, le Conseil de presse estime que M. Bourque a vulgarisé l’information de manière à la rendre accessible pour les lecteurs qui peuvent ne pas être familiers avec le domaine médical; et ceci en accord avec les politiques journalistiques du quotidien pour lequel il travaille.
Le Conseil de presse ne retient donc pas le grief du plaignant, à l’effet que le journaliste ait fait un traitement de la nouvelle au mépris des lecteurs, comme l’indique le plaignant.
Concernant l’expression «Les malades sont des menteurs», autant dans le titre que dans le corps de l’article, le Conseil constate que le plaignant reconnaît avoir utilisé cette expression et que le journaliste a vérifié la définition du mot «menteur» au cours de son entretien avec le docteur Drouin, ce que ce dernier ne nie pas.
Enfin, comme l’article traite de la perception qu’ont des médecins spécialistes à l’égard d’accidentés de la route, à titre de malades, le journaliste était, de l’avis du Conseil, en droit de rapporter les propos du docteur Drouin, puisqu’ils étaient pertinents, utiles et d’intérêt public.
Analyse de la décision
- C03A Angle de traitement
- C03C Sélection des faits rapportés
- C11D Propos/texte mal cités/attribués