Plaignant
Centre populaire
de documentation de l’Estrie
Représentant du plaignant
M. Armand Rosso
(représentant – Centre populaire de documentation de l’Estrie)
Mis en cause
La Tribune
[Sherbrooke] et M. François Gougeon (journaliste)
Représentant du mis en cause
M. Jacques
Pronovost (rédacteur en chef, La Tribune [Sherbrooke])
Résumé de la plainte
L’article du journaliste
François Gougeon titré «Tout est de bon goût, surtout pas vulgaire», paru à la
première page de l’édition du 3 février 1994 de La Tribune, s’apparente à un
publi-reportage puisqu’il vise principalement à faire connaître au public les
services offerts par ce nouveau salon érotique. Le choix et la dimension de la
photographie qui illustre l’article accentuent le caractère promotionnel de
celui-ci, en plus de constituer un exemple de l’exploitation du corps de la
femme par les médias.
Faits
La plainte
concerne un article du journaliste François Gougeon, ainsi que la photo
accompagnant celui-ci, publiés en première page de l’édition du 3 février 1994
du journal La Tribune. Cet article, titré «Tout est de bon goût, surtout pas
vulgaire», traite de l’ouverture d’un salon érotique à Sherbrooke.
Griefs du plaignant
M. Armand Rosso,
du Centre populaire de documentation de l’Estrie (CPDE), considère que cet
article s’apparente à un publi-reportage puisqu’il vise principalement à faire
connaître au public les services offerts par ce salon érotique. Il estime qu’en
mettant l’emphase sur les caractéristiques particulières de ce commerce,
l’article «relève davantage de l’optique du client d’un tel service, que de
l’approche journalistique».
Au soutien de
cet avis, M. Rosso souligne les nombreux détails sur les mérites de l’ambiance
et du décor intérieur, les services offerts, les heures d’ouverture, les
activités sexuelles auxquelles on peut se livrer et les tarifs pratiqués par la
maison.
Il considère
également que le contenu et la dimension de la photo, qui accompagne l’article,
viennent en renforcer le caractère promotionnel, car en montrant de manière
ostensible les jambes ainsi que l’épaule dénudée d’une femme, cette photo
présente en quelque sorte le «produit offert» dans ce salon. Egalement, selon
M. Rosso, le choix de cette photo constitue une utilisation du corps de la
femme par les médias.
Commentaires du mis en cause
M. Jacques
Pronovost, rédacteur en chef de La Tribune, souligne que cet article s’inscrit
dans le prolongement d’une série de textes visant à informer la population le
plus justement possible sur l’arrivée d’un tel commerce en Estrie, notamment
des articles sur la possibilité de l’implantation d’un salon érotique, la
pertinence ou non d’une telle entreprise au centre-ville de Sherbrooke, les
règlements municipaux afférents, les décisions de la Ville de Sherbrooke, etc.
Il fait remarquer également que La Tribune a publié plusieurs lettres d’opinion
des lecteurs ainsi qu’un éditorial titré «Haro sur les salons érotiques».
Quant à
l’article contesté par la partie plaignante, celui-ci se veut un texte
d’information permettant aux lecteurs de se faire une idée personnelle de
l’endroit, de ses objectifs et de sa valeur. M. Pronovost souligne que le
journaliste François Gougeon a par ailleurs choisi l’approche habituelle de la
couverture du lancement d’une entreprise et qu’il a pris soin de mentionner
dans son article le caractère controversé de cette entreprise.
En ce qui
concerne la photo, M. Pronovost remarque que celle-ci n’a pas de caractère
choquant même si elle peut être suggestive pour certains, du moins selon ce
qu’estime le Centre populaire de documentation de l’Estrie. Il indique que
cette photo traduit une visée éditoriale du journal qui aurait d’ailleurs pu se
prêter à plus de «sensationnalisme» visuel.
En conclusion,
M. Pronovost dit considérer que La Tribune a fait état de tous les faits et de
toutes les opinions permettant aux lecteurs de se faire une idée juste de la
valeur d’un tel commerce à Sherbrooke, et ce, en conformité avec la mission du
journal qui est de rendre compte des événements qui se déroulent dans la région
de Sherbrooke.
Analyse
Il serait contraire à l’éthique journalistique que les médias et les journalistes fassent de la publicité déguisée ou indirecte dans l’information qu’ils publient ou diffusent. C’est là une ligne de conduite que le Conseil de presse a fait valoir à plusieurs reprises dans des décisions qu’il a rendues.
Après étude de l’article titré «Tout est de bon goût, surtout pas vulgaire», le Conseil ne retient pas l’argument du Centre populaire de documentation de l’Estrie selon lequel celui-ci s’apparente au publi-reportage du fait qu’il présente une description détaillée des lieux, des services offerts et des tarifs pratiqués par le salon érotique en question; et qu’une telle description des caractéristiques de ce commerce relève davantage de l’optique du client utilisateur que d’une approche journalistique. Il y a lieu de considérer ici le contexte dans lequel cet article s’insère. D’une part, celui-ci informe le public de l’ouverture de cette entreprise dont la venue a suscité la controverse dans la région. D’autre part, cet article s’inscrit dans la continuité des différents textes que le journal La Tribune a publiés relativement à l’implantation d’un tel commerce à Sherbrooke.
En ce qui a trait à la photo qui accompagne l’article, le Conseil ne considère pas que le contenu, la dimension ou l’emplacement de celle-ci, si l’on tient compte du contexte de sa publication, constitue une exploitation du corps de la femme ou une forme de publicité visant à vendre le produit de ce commerce.
En conclusion, le Conseil de presse rejette la plainte du Centre populaire de documentation de l’Estrie reprochant le caractère promotionnel et sensationnel de cet article et de cette photo.
Analyse de la décision
- C18C Préjugés/stéréotypes
- C21C Traitement à caractère promotionnel