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D1994-08-042 (2)

12 juillet 1995

Plaignant

La Croix Brisée
du Québec et M. Gilles Cédillot (fondateur et administrateur)

Représentant du plaignant

M. Daniel
Descotes (avocat, Ogilvy Renault)

Mis en cause

TVA [Montréal]
et M. Gaétan Girouard, (journaliste)

Représentant du mis en cause

M. Bernard
Guérin (conseiller juridique, TVA [Montréal])

Résumé de la plainte

Le réseau TVA
diffuse des reportages biaisés du journaliste Gaétan Girouard dans le cadre de
l’émission J.E. du 28 novembre 1993, du 5 décembre 1993 et du 6 février 1994.
Le journaliste rapporte des informations et des témoignages erronés à propos de
la plaignante, en plus de laisser entendre que les certaines activités de
celle-ci sont frauduleuses. Les reportages en question relèvent d’une mise en
scène qui distille le parti pris et le préjugé.

Faits

La plainte
concerne trois reportages diffusés à l’émission J.E. du réseau TVA, les 28
novembre et 5 décembre 1993 et le 6 février 1994. Ces reportages font état
d’une enquête sur deux organismes de charité qui font de la sollicitation
téléphonique pour amasser des fonds: la Croix brisée du Québec (pour les
handicapés et les amputés) et la Fondation Tobie (pour les aveugles). Les
reportages enquêtent également sur l’entreprise de télémarketing, dirigée par
M. Martin Fluss, qui fait la sollicitation téléphonique pour le compte de ces
deux organismes.

Griefs du plaignant

La Croix Brisée
du Québec et son fondateur et administrateur, M. Gilles Cédillot, représentés
par M. Daniel Descotes, avocat, reprochent à TVA et au journaliste Gaétan
Girouard d’avoir diffusé des reportages faux et biaisés sur les activités de
cet organisme.

M. Descotes
indique que M. Girouard, malgré les explications que M. Cédillot lui a données
dans une entrevue, a présenté la situation de façon malicieuse afin de faire
croire au public qu’il y avait fraude de la part de la Croix Brisée; notamment
en mettant l’emphase dans le premier reportage sur le montant distribué aux
personnes handicapées (comparativement aux montants recueillis), alors que
cette activité n’est pas le but premier de la Croix Brisée.

M. Descotes
reproche également au journaliste de n’avoir fait aucune mention que la Croix
Brisée achetait et distribuait des chaises roulantes; d’avoir affirmé
faussement que ses clients n’ont jamais publié un livre sur la prévention de
l’amputation; et d’avoir mentionné faussement que TVA n’a jamais eu d’autres
nouvelles de la Croix Brisée après l’entrevue avec M. Cédillot malgré ses
demandes d’informations, alors que celle-ci a communiqué avec TVA pour faire
rectifier les faits.

M. Descotes
conteste également les assertions de certaines personnes interviewées dans les
reportages: l’affirmation du président du Centre québécois d’études en
philanthropie qui déclare que l’organisme Rêve spécial (une oeuvre charitable
dirigée par M. Cédillot) n’existe pas; l’affirmation d’un employé de la Croix
Brisée qui prétend avoir essuyé maints refus lors de la vente de porte-clefs
dans un centre d’achat après la diffusion du premier reportage, alors qu’il n’y
a eu aucune vente de porte-clefs ou d’épinglettes après ce reportage.

Selon M.
Descotes, tous les reportages relèvent d’une mise en scène qui distille le
parti pris et le préjugé. Il dénonce particulièrement la mise en scène d’un
appel téléphonique en République Dominicaine qui laisse entendre que M.
Cédillot se cache dans ce pays, alors qu’il n’a jamais habité le village pointé
sur la carte géographique montrée à l’écran, ni jamais eu de numéro de
téléphone à son nom dans ce pays.

Il souligne que
TVA et M. Girouard n’ont diffusé que des informations négatives sur la Croix
Brisée. Selon lui, ses clients étaient condamnés à l’avance, avant même que M.
Girouard ait débuté son enquête, ainsi que l’illustrent les commentaires
initiaux des reportages.

Commentaires du mis en cause

M. Bernard
Guérin, conseiller juridique du réseau TVA, réfute les allégations de la Croix
Brisée selon lesquelles les reportages mis en cause présentaient les activités
de cet organisme comme étant frauduleuses et malhonnêtes. Ces reportages ne
commentaient en aucune façon la situation et ne rapportaient que les faits,
lesquels ont été vérifiés auprès de témoins et à même des documents publics
dont plusieurs émanent de la Croix Brisée.

Concernant
l’emphase dans le premier reportage sur les montants distribués aux personnes
handicapées, M. Guérin souligne que c’est M. Cédillot lui-même qui a insisté
sur cet objectif lors de l’entrevue qu’il a accordée à M. Girouard. Concernant
l’achat de chaises roulantes, il est faux de dire que le reportage n’en fait
aucune mention. Quant au livre sur la prévention de l’amputation, M. Guérin
signale que la Croix Brisée n’a pu remettre aucun exemplaire de ce livre pour
démontrer qu’il avait effectivement été publié.

En ce qui
concerne l’organisme Rêve spécial, M. Guérin souligne que c’est le directeur du
Centre de philanthropie du Québec, maintes fois cités par les médias, qui a
affirmé que cet organisme n’existait pas. Le reportage mentionne par ailleurs
que cet organisme est bel et bien enregistré au fichier des entreprises. La
Croix Brisée n’a cependant pas collaboré lorsque TVA lui a demandé de lui
présenter des personnes ayant bénéficié des services de cet organisme. Donc,
contrairement aux prétentions de la Croix Brisée, il y a eu enquête et
vérification avec les moyens dont TVA et le journaliste disposaient.

Eu égard aux
allégations de mise en scène, M. Guérin insiste qu’elles sont sans fondement.
Il signale que TVA a offert à M. Martin Fluss, le propriétaire de l’entreprise
de télémarketing qui fait la collecte de fonds pour le compte de la Croix Brisée,
de donner son opinion sur les allégations de la police. Ce dernier a cependant
refusé. Il ajoute que la méfiance de cette entreprise, qui pourtant sollicite
le public, était manifeste (intervention des policiers, refus d’adresser la
parole au journaliste, etc.). Ce n’était pas là de la mise en scène, mais des
faits. Pour ce qui est de l’appel téléphonique en République Dominicaine, il
fait remarquer que M. Girouard n’était pas impliqué dans cette partie du
reportage.

M. Guérin estime
que TVA a offert l’occasion à M. Cédillot de fournir les explications et les
preuves sur les doutes qui étaient soulevés, mais que ce dernier, après avoir
accepté de collaborer, n’a pas donné suite et a préféré menacer TVA de
poursuites judiciaires. Il lui reconnaît le droit de refuser de parler à TVA,
mais considère que TVA a le droit de rapporter les faits sur un organisme qui
vit de la charité du public même si leur médiatisation déplaît à ses
dirigeants.

Analyse

Le Conseil reproche à TVA et au journaliste Gaétan Girouard d’avoir eu recours à une mise en scène abusive, ce qui a eu pour effet de créer un climat accusateur qui dépasse le questionnement légitime des faits et gestes rapportés dans une série de trois reportages sur La Croix Brisée du Québec.

Ainsi, dans un premier reportage diffusé le 28 novembre 1993, l’utilisation qu’on a faite du refus de M. Martin Fluss d’accorder une entrevue au journaliste et de sa fuite devant la caméra. D’abord, l’insistance sur les images de cette scène; des extraits ont été diffusés à neuf reprises dans les trois reportages. Ensuite, l’interprétation qu’on a donnée à ce refus dans le premier reportage. Il commence par le commentaire: «Cet homme qui fuit notre caméra s’appelle Martin Fluss. Il est à la tête d’une entreprise de télémarketing. Il amasse des milliers de dollars par année au nom d’une oeuvre de charité (la Croix Brisée)». Le reportage se termine par le commentaire: «Donc, malgré l’enquête policière, malgré la série de perquisitions, malgré les avis du Centre de philanthropie, la Croix Brisée est une organisation tout à fait légale et qui agit légalement. Jusqu’à preuve du contraire, ses dirigeants n’ont posé aucun geste répréhensible par la loi. Alors une question demeure. Pourquoi nous fuir? M. Fluss…».

La réponse à cette question réside bien davantage dans le fait que M. Martin Fluss a été harcelé par la caméra. Il est nécessaire ici de rappeler que tout individu a le droit de refuser une entrevue à un journaliste sans que l’on interprète ce refus comme l’illustration d’un comportement suspect ou la démonstration d’une culpabilité.

Il en va de même de l’entrevue avec le fondateur de la Croix Brisée, M. Gilles Cédillot. Tant par la façon dont le journaliste l’interviewe que par le traitement qui a été accordé à ses réponses. Telle que dirigée et diffusée, cette entrevue vise davantage à mettre en scène le propos du reportage qu’à interroger et confronter M. Cédillot sur les faits et lui permettre d’exprimer sa version. Notamment lorsque le journaliste lui dit à la fin du l’entrevue: «Si ça peut vous servir ce reportage là pour vous laver une fois pour toute».

Par ailleurs, dans le troisième reportage, diffusé le 6 février 1994, l’utilisation d’un témoignage de ouï-dire pour démontrer que la Croix Brisée use de procédés malhonnêtes pour solliciter l’argent du public relève également d’une mise en scène susceptible d’induire le public en erreur. Ainsi, on fait dire à une femme qui a vu le premier reportage et qui a été sollicitée par la Croix Brisée peu après la diffusion: «Je leur ai dit que j’avais entendu dire que justement que c’était pas tout à fait à cent pour cent honnête, et pi que qu’y avait une grosse partie de l’argent et des dons qui s’en allait dans les poches des responsables. Alors ils m’ont dit qu’ils étaient, que c’était qu’il fallait pas croire tout ce qui se dit à la télé, pi que ça allait être rétracté». Suivi de M. Girouard qui dit: «Or, TVA ne s’est jamais rétracté. Et la Croix Brisée ne nous l’a jamais demandé. Avant ce reportage, les affaires de la Croix Brisée allaient plutôt bien». Ce faisant, le journaliste se place dans une situation d’apparence de conflit d’intérêts, puisqu’il utilise le témoignage d’une personne qui a vu son premier reportage pour valider la thèse qu’il met de l’avant, procédé que le Conseil de presse condamne.

Finalement, le Conseil a relevé des erreurs de faits dans le premier reportage. Ainsi, le journaliste de l’émission J.E. a manqué de prudence lorsqu’il a mis en doute l’existence de l’organisme Rêve spécial, en s’appuyant sur le témoignage du président du Centre québécois d’études en philanthropie qui affirme que celui-ci n’existe pas, et sur le fait que M. Cédillot n’a pas fourni des noms de personnes qui auraient profité de ce programme. La même chose en ce qui concerne la publication par la Croix Brisée d’un livre sur la prévention de l’amputation. M. Cédillot n’ayant pas fourni un exemplaire du livre, le journaliste conclut et affirme dans le reportage que M. Cédillot «a aussi écrit un livre qu’il n’a jamais publié». Or, vérification faite, des personnes ont bénéficié du programme Rêve spécial et il y a eu publication du livre en 1992. Ces informations auraient dû faire l’objet d’une vérification rigoureuse. Elles ne pouvaient s’établir sur le seul témoignage du Centre d’études en philanthropie et sur le fait que la Croix Brisée n’ait pas donné suite aux demandes d’informations du journaliste. Lorsqu’un journaliste signe un texte, il en est responsable.

Si la presse a la liberté éditoriale de choisir les sujets auxquels elle s’intéresse, d’enquêter et de dénoncer des instances qui agissent à l’encontre de l’intérêt public, cette liberté comporte cependant la responsabilité de vérifier rigoureusement les faits et de traiter l’information recueillie sans déformation ou interprétation abusive.

Analyse de la décision

  • C11G Rapporter des propos/témoignages erronés
  • C13B Manipulation de l’information

Date de l’appel

5 March 1997

Appelant

TVA [Montréal]
et M. Gaétan Girouard, (journaliste)

Décision en appel

Les membres de
la commission d’appel ont siégé le 17 février 1997 et ont décidé de rejeter l’appel
et de maintenir la décision du tribunal d’honneur concernant la plainte
susmentionnée.

Le Conseil de
presse tient à préciser qu’il ne prend pas partie dans les événements. A son
avis, la commission d’appel aurait bien aimé lors du banc d’audition avoir le
point de vue journalistique, ce qui lui aurait peut-être permis d’avoir un
autre point de vue.

Par conséquent,
le banc d’audition n’ayant pas apporté d’éléments nouveaux, la commission
d’appel a decidé de maintenir la décision du tribunal d’honneur. La commission
d’appel aimerait préciser que c’est le «montage» de l’émission qui constitue ce
que le tribunal d’honneur appelait à juste titre une mise en scène

Griefs pour l’appel

Le réseau TVA a
interjeté appel de cette décision.

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