Plaignant
M. Louis
Rousseau (professeur au département des sciences religieuses, Université du
Québec à Montréal)
Mis en cause
Montréal Campus
et M. Jean-Sébastien Marsan (journaliste)
Représentant du mis en cause
Mme Julie
Tremblay (rédactrice en chef, Montréal Campus)
Résumé de la plainte
Le journaliste
Jean-Sébastien Marsan fait preuve de partialité et porte atteinte à la vie
privée du plaignant dans son article «Les Judas de l’UQAM?», en rapportant les
propos d’une source anonyme sans avoir cherché à obtenir la version des faits
du principal intéressé. L’article incriminé, paru dans le numéro du 8-21 mars
1995 de Montréal Campus, fait suite à un article de La Presse révélant
l’existence d’un compte secret au département de sciences religieuses de
l’UQAM. La publication de la lettre de mise au point du plaignant par La Presse
ne compense pas adéquatement les préjudices subis.
Faits
La plainte
concerne un article de M. Jean-Sébastien Marsan, publié par le Montréal Campus
dans son numéro du 8-21 mars 1995, intitulé: «Les Judas de l’UQAM?». Il fait
suite à un article de La Presse révélant l’existence d’un compte secret au
département de sciences religieuses de l’UQAM dont M. Rousseau aurait pu
bénéficier.
Griefs du plaignant
Le 10 avril
1995, M. Louis Rousseau porte plainte contre M. Jean-Sébastien Marsan pour
avoir porté atteinte à sa vie privée et fait preuve d’une partialité grave dans
le traitement de l’information en diffusant des informations sans prendre la
peine de l’interroger à propos des faits mentionnés.
En se basant sur
les révélations d’une source anonyme, M. Marsan affirme qu’il existe une
enquête interne des professeurs du département confirmant l’existence d’un
compte secret. Cette enquête a été tenue secrète par l’administration.
Le plaignant
mentionne que La Presse a publié sa lettre de mise au point qui l’a satisfait
partiellement parce que ce redressement est peu proportionné au préjudice subi
par lui même, ses collègues et sa famille.
Commentaires du mis en cause
Le 8 mai 1995,
M. Jean-Sébastien Marsan réplique que sa source d’information a voulu conserver
l’anonymat pour protéger son poste et parce que la vice-rectrice avait demandé
aux professeurs de garder le silence jusqu’à la mise sous tutelle du
département.
Le journaliste
estime ne pas avoir porté atteinte à la vie privée du plaignant: l’information
était d’intérêt public puisqu’elle concernait une institution publique.
En ce qui
concerne le processus de collecte d’information, M. Marsan n’a pas rejoint le
plaignant avant la diffusion de son premier article («Les Judas de l’UQAM?»).
Il a présumé que celui-ci ne ferait aucun commentaire puisqu’il lui était
imposé de garder le silence. Le journaliste ajoute qu’il ne pouvait «laisser
tomber l’opportunité de révéler des faits inédits parce que les gens impliqués
n’avaient pas eu de droit de réplique».
Avant la
publication de son second article: «Que le nouveau règne vienne» publié le 22
mars 1995, M. Marsan a rejoint le plaignant et lui a proposé de participer à
cet article mais M. Rousseau a refusé.
La rédactrice en
chef du Montréal Campus, Mme Julie Tremblay précise que si le journaliste n’a
pas contacté M. Rousseau c’est parce qu’il a appris que «les membres du
département avaient reçu la consigne de ne faire aucun commentaire».
Réplique du plaignant
Le 31 mai 1995,
M. Rousseau réitère les mêmes reproches. Il nie qu’on lui ait offert de
présenter sa version des faits à la suite du premier article. Le plaignant
précise que si le journal l’avait fait, il aurait évidemment accepté.
Analyse
Le Conseil de presse rejette la plainte de M. Louis Rousseau pour atteinte à la vie privée. A la lecture des deux articles parus dans le Montréal Campus, il apparaît au Conseil que le journaliste Jean-Sébastien Marsan a publié des informations d’intérêt public ne mettant pas en cause la vie privée du plaignant. Par ailleurs, en ce qui concerne le traitement de l’information, le Conseil de presse rappelle que le journaliste qui dévoile à l’attention du public une information mettant en cause une personne ou un groupe se doit de répondre à certains principes.
Le journaliste a la responsabilité de vérifier l’information auprès de sources différentes, de s’assurer de la crédibilité de ces sources et d’effectuer une mise en contexte de l’information. Dans l’article «Les Judas de l’UQAM?», l’existence de l’enquête menée par des professeurs du département est confirmée par la vice-rectrice à l’enseignement et à la recherche. Les affirmations de la source anonyme sont appuyées par des extraits de lettres des professeurs du département destinées à l’administration.
Cependant, le Conseil de presse déplore que M. Jean-Sébastien Marsan n’ait pas tenté de rejoindre M. Louis Rousseau pour obtenir sa version des faits. L’exigence d’équité oblige à faire une démarche auprès des personnes mises en cause pour leur permettre de donner leur version des faits. La démarche effectuée auprès de M. Rousseau, avant la parution du second article, ne dégage pas le journaliste de ce principe.
Analyse de la décision
- C12C Absence d’une version des faits
- C15D Manque de vérification
- C16D Publication d’informations privées
Réplique du mis en cause
Le 4 juillet
1995, la rédactrice en chef du Montréal Campus affirme que M. Rousseau a bien
été contacté par le journaliste pour participer au second article.
M.
Jean-Sébastien Marsan affirme avoir eu une conversation téléphonique avec le
plaignant. Celui-ci lui a strictement défendu de publier ses propos en
déclarant que leur conversation devait demeurer «off the record».