Plaignant
L’Association
des journaux régionaux du Québec
Représentant du plaignant
M. Allan Davis
(directeur général, Association des journaux régionaux du Québec)
Mis en cause
La Presse
[Montréal] et M. Gilles Paquin (journaliste)
Représentant du mis en cause
M. Claude Masson
(vice-président et éditeur adjoint, La Presse [Montréal])
Résumé de la plainte
L’article
«Ottawa propose douze millions à quinze organismes anglophones du Québec»,
publié par La Presse le 3 juillet 1995, sous la signature du journaliste Gilles
Paquin, exacerbe les tensions entre les communautés anglophone et francophone
en faussant le sens d’un accord entre le ministère du Patrimoine et les
organismes cités. Le journaliste néglige de vérifier ses informations auprès
des personnes concernées.
Faits
La plainte
concerne un article du journaliste Gilles Paquin, intitulé «Ottawa propose
douze millions à quinze organismes anglophones du Québec», paru le 3 juillet
1995 dans La Presse.
Griefs du plaignant
M. Allan Davis, directeur
général de l’Association des journaux régionaux du Québec (AJRQ) porte plainte
contre M. Gilles Paquin pour erreurs de faits et quiproquo général dans son
article.
Il reproche au
journaliste de ne pas avoir respecté les principes les plus fondamentaux du
journalisme en omettant de vérifier «l’authenticité des informations auprès des
personnes concernées».
Le plaignant
considère que l’article a donné «l’occasion de pointer du doigt» en faussant la
thèse centrale du reportage c’est-à-dire que «le fédéral s’est servi de ses
énormes ressources pour diminuer les moins nantis aux dépens des grands».
Il ajoute que
l’article a eu de graves répercussions sur les relations entre les communautés
linguistiques françaises et anglaises du Québec.
Commentaires du mis en cause
Le 10 juin 1996,
le journaliste Gilles Paquin répond à M. Allan Davis.
Il précise que
son article s’appuyait sur l’accord de principes intervenu entre le ministère
du Patrimoine et les représentants des divers organismes en cause.
Les accusations
de M. Davis relèvent de son imagination; l’authenticité de ses informations n’a
pas à être remise en cause car il «cite longuement le texte de l’accord et
plusieurs des personnes impliquées».
Selon lui, le
plaignant a été agacé par l’importance accordée à cette nouvelle par La Presse.
Il rappelle que le journal avait déjà fait état d’informations relatives à ce
sujet.
Le 13 juin 1996,
M. Claude Masson, vice-président et éditeur adjoint de La Presse, soutient la
réponse de Gilles Paquin.
Dans cette
dernière, M. Claude Masson donne sa version des faits en huit points
argumentaires:
– la nouvelle
s’appuyait sur l’accord de principe susmentionné;
– le document a
été officiellement transmis au ministère du Patrimoine sans être encore ratifié
par les membres;
– les
négociations ont été «discrètes» car les membres de l’organisation n’en ont pas
été informés;
– les autres
objectifs ont été énumérés dans l’article;
– une lettre
ouverte dans Le Devoir, du directeur général des programmes d’appui aux langues
officielles, a reconnu que la politique gouvernementale favorisait la formation
de tels groupements;
– le titre de
l’article se réfère à une télécopie du président, M. Maynard, et à des
témoignages de certains participants;
– deux participants
ont rapporté que des pressions auraient été exercées pour en finir avec les
négociations;
– la direction
de l’Association des anglophones de la Vallée de la Châteauguay (CVESPA) a fait
savoir que son groupe recevait moins d’argent qu’Alliance Québec en comptant
plus de membres.
Il s’excuse
d’avoir mal traduit le nom de l’Association des journaux régionaux du Québec en
se référant aux documents anglais.
Réplique du plaignant
Le 31 juillet
1996, M. Allan Davis use de son droit de réplique pour rappeler que l’article a
causé des dommages importants.
Il reproche au
journaliste de ne pas avoir fait ressortir que les subventions fédérales ne
sont pas des fonds nouveaux.
Selon le
plaignant, l’article ne fait qu’accentuer l’impression d’une «ingérence du fédéral
dans ces associations» en faisant de l’argent un instrument de pression.
Il considère que
la crédibilité des quatorze autres groupes a été mise en cause en accordant
trop d’importance à Alliance Québec.
Analyse
Le choix et le traitement de l’information relèvent du jugement rédactionnel des journalistes, lesquels doivent, ce faisant, se conformer à leur devoir et à leur obligation de renseigner adéquatement la population sur les questions d’intérêt public.
Bien que les journalistes ne soient pas tenus de traiter de façon exhaustive tous les aspects d’une question qu’ils ont choisi de traiter, dans le cas présent, le Conseil reproche à Gilles Paquin de ne pas avoir fait état de l’avis de quelques représentants du gouvernement ou de groupes non dissidents. Partant, le public aurait été mieux informé et aurait pu se faire une opinion en toute connaissance de cause.
Par ailleurs, le Conseil déplore l’utilisation du terme «propose» mentionné dans le titre, qui laisse penser que l’initiative d’une subvention de douze millions de dollars vient d’Ottawa. Le journaliste aurait dû mentionner clairement, dans son article, que le Fédéral, à la demande du Réseau, a accepté d’accorder une subvention dont le montant fixé est de douze millions sur 4 ans et que ces 12 M ne représentaient rien de nouveau dans l’argent versé par le fédéral. Au contraire, il aurait dû mentionner qu’il s’agissait plutôt d’une diminution du budget par rapport aux années antérieures. Le Conseil de presse reproche donc au journaliste de ne pas l’avoir noté.
Quant à l’emplacement accordé à l’article par La Presse, que le plaignant juge proéminent par rapport aux faits, le Conseil ne saurait adresser de reproche au journal à cet égard. En vertu de leur liberté rédactionnelle, les médias sont libres de leurs choix en la matière.
Analyse de la décision
- C03D Emplacement/visibilité de l’information
- C11F Titre/présentation de l’information
- C12B Information incomplète
- C12C Absence d’une version des faits