Plaignant
Mme Anne
Thibaudeau (avocate)
Mis en cause
Le Guide de Cowansville
et M. Claude Hébert (journaliste)
Résumé de la plainte
Le 14 mars 1998,
Le Guide de Cowansville publie un article dans lequel le journaliste Claude
Hébert reprend, sans les vérifier, les propos farfelus d’un homme contre son
ex-épouse. Ces propos poursuivent sur la place publique un procès pour divorce;
ils risquent de porter atteinte à la santé et à la réputation de la personne
concernée, qui demeure identifiable même si elle n’est pas nommée.
Faits
Anne Thibaudeau
porte plainte contre Claude Hébert et Le Guide de Cowansville à la suite d’un
article publié dans l’édition du samedi 14 mars 1998. La plaignante reproche au
journaliste d’avoir repris, sans les vérifier, des propos susceptibles de nuire
à la réputation et à la santé de sa cliente.
Griefs du plaignant
La plaignante
reproche aux mis-en-cause d’avoir repris, sans vérification, les propos
«farfelus de monsieur Dalpé» sans «s’assurer d’un minimum de crédibilité du
personnage et de sa nouvelle conjointe». La plaignante, qui est avocate, a agi
à titre de représentante dans la cause de divorce impliquant l’ex-épouse de M.
Dalpé.
Elle considère
que le journaliste «semble prendre pour acquis que les faits relatés par Gérard
Dalpé et Marjolaine Pinard sont vrais alors que la lecture du jugement de
divorce (document public) […] aurait fait comprendre à ce journaliste qu’il
avait affaire à des fumistes dont le seul objectif était de continuer sur la
place publique un procès qui n’avait pas été à leur avantage devant les
Tribunaux».
La ville de
Cowansville étant petite, l’identification de la cliente de Me Thibaudeau est
facile, et l’impact de cet article sur sa réputation et sa santé peut être
considérable. Pour ces raisons, la plaignante demande au Conseil de sanctionner
Le Guide de Cowansville et son journaliste de façon à s’assurer qu’à l’avenir,
ils feront «preuve de discernement dans le choix de leurs reportages et qu’ils
ne laisseront pas n’importe quel manipulateur dire n’importe quelle sottise sur
des personnes vulnérables».
Commentaires du mis en cause
Le journaliste
Claude Hébert rappelle que l’article faisant l’objet de la plainte porte sur
les revendications de l’Association des secondes épouses et conjointes du
Québec telles qu’endossées par Marjolaine Pinard. L’article souligne le fait
que le regroupement est déjà implanté dans plusieurs régions du Québec et qu’un
chapitre est en formation au niveau local.
Claude Hébert
affirme qu’il ne prend pas position dans le dossier et se limite à rapporter
les propos de Marjolaine Pinard et Gérard Dalpé sur la situation des secondes
épouses ou conjointes de fait, et les «injustices» qui, selon eux, seraient
commises à leurs égards. De plus il précise «qu’aucun détail sur la vie privée,
personnelle ou sentimentale des personnes en cause n’apparaît dans le texte».
Le journaliste
dit ne pas connaître l’ex-épouse de Gérard Dalpé, et souligne que l’article ne
mentionne aucune donnée susceptible d’identifier cette personne. Finalement,
Claude Hébert reconnaît avoir pris pour acquis que les motifs ayant amené
Marjolaine Pinard à militer au sein d’une association de défense des intérêts
des secondes épouses ou conjointes de fait étaient honorables. Pour les mêmes
raisons, il estime ne pas être en mesure de déterminer si l’on est en présence
ici d’un «manipulateur» ou de «fumistes» comme le prétend la plaignante.
Réplique du plaignant
La plaignante rappelle
que le journal Le Guide de Cowansville dessert une petite population et qu’il
n’était pas difficile d’identifier l’ex-épouse de M. Dalpé, même si l’article
ne mentionnait pas son nom. Pour ces raisons, le journaliste aurait dû faire
preuve de plus de discernement «ou au moins inviter le lecteur à la prudence».
Finalement, la plaignante considère toujours que, dans son article, le
journaliste Claude Hébert fait sien le message apporté par Gérard Dalpé et
Marjolaine Pinard.
Analyse
Après étude des éléments soumis à son attention par la plaignante et le mis-en-cause, le Conseil de presse rejette la plainte.
Claude Hébert et Le Guide de Cowansville pouvaient traiter, comme ils l’ont fait, de la tentative de mise sur pied d’une section locale de l’Association des secondes épouses et conjointes du Québec. La jurisprudence du Conseil dira à cet égard:
«Le Conseil de presse reconnaît aux médias et aux journalistes la liberté de traiter d’un sujet ou d’une situation en privilégiant un angle particulier. Les informations qu’ils choisissent de rapporter dans ce cadre font nécessairement l’objet de choix, lesquels doivent être faits en fonction du degré d’intérêt public, dans le respect des personnes et avec le souci de transmettre une information juste et équilibrée.» (199606-044)
Aux yeux du Conseil, l’article incriminé est factuel. Il porte sur la situation de M. Dalpé en tant que divorcé et sur les responsabilités de Mme Pinard comme seconde épouse ou conjointe, non sur le divorce de monsieur d’avec son ex-épouse. De plus, l’article en question ne donne aucune information susceptible de permettre à ceux qui ne la connaîtraient pas déjà d’identifier l’ex-épouse de M. Dalpé.
Cependant, compte tenu de la proximité qui caractérise une municipalité de la taille de Cowansville, le Conseil estime que le traitement de la nouvelle n’a pas fait preuve de délicatesse à l’égard de l’ex-épouse de M. Dalpé.
Cela dit, le Conseil de presse rejette sur le fond la plainte de Me Anne Thibaudeau à l’endroit de de Claude Hébert et du Guide de Cowansville.
Analyse de la décision
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