Plaignant
L’Association des pompiers de
Montréal (Gaston Fauvel, président)
Mis en cause
Kathleen Lévesque du journal Le
Devoir (Claude Beauregard, rédacteur en chef)
Résumé de la plainte
L’Association des pompiers de
Montréal porte plainte devant le Conseil de presse du Québec contre la journaliste
Kathleen Lévesque, suite à son article intitulé » La ville et ses
pompiers. Une sentence arbitrale vient alimenter le conflit « , paru dans
l’édition du 27 janvier 1999.
Le 26 janvier 1999, l’Association
des pompiers de Montréal (APM) tient une conférence de presse afin de rendre
publique une sentence arbitrale portant sur le conflit les opposant au Service
de prévention des incendies de Montréal (SPIM). Au cours de cette conférence de
presse, les journalistes reçoivent le texte intégral de la décision ainsi qu’un
communiqué de presse. Le litige porte sur le traitement de cet événement par le
journal Le Devoir.
Griefs du plaignant
Gaston Fauvel, président de
l’Association des pompiers de Montréal, reproche à Kathleen Lévesque d’avoir
» rédigé un texte tendancieux, négatif « . La journaliste aurait
laissé entendre que l’APM » donnait une toute autre signification à la
sentence arbitrale en ce qui a trait au plancher d’emploi « . Les
plaignants affirment, pour leur part, avoir avancé » des faits réels et
objectifs tels qu’énoncés par l’arbitre « .
La journaliste est accusée d’avoir
» fait fi, fautivement, de citer ou de référer les lecteurs aux passages
pertinents de la sentence arbitrale « . Les plaignants font ainsi référence
à l’article 8 d’une entente signée entre eux et la Ville, intégrée à la
convention collective, et qui se trouve au centre de la plainte. Kathleen
Lévesque cite le commentaire de l’arbitre sur l’article 8 et rapporte que l’APM
en a tiré des conclusions hors de propos quant à » leur revendication
concernant les modalités d’embauche « .
Or, Gaston Fauvel, dans la présente
plainte, nie toute interprétation illégitime et rappelle à son tour le
commentaire sur l’article 8 en tentant de prouver la légitimité de ses propos.
Il revendique un verbatim là où la journaliste aurait parlé
d’interprétation.
Enfin, il est reproché à Kathleen
Lévesque d’avoir écrit » un article, coiffé d’un titre on ne peut plus
négatif [qui] ne répond certainement pas aux critères requis usuellement «
et qui tend » à mettre en doute la crédibilité de l’Association des
pompiers de Montréal Inc « . Il signale que les autres médias ont rapporté
l’événement de façon différente.
Commentaires du mis en cause
Le directeur de l’information,
Claude Beauregard, conteste les allégations des plaignants. Il affirme que la
» journaliste a parfaitement accompli son travail « . Il revient sur
le comportement de l’APM durant le long conflit l’opposant à la Ville de
Montréal puis, plus précisément, sur la conférence de presse du 26 janvier. A
nouveau, il cite le commentaire de l’arbitre sur l’article 8 et explique la
contradiction entre celui-ci et le fait que l’APM le considère comme «
ayant une grande portée face à son employeur » dans ses revendications sur
le plancher d’emploi permanent. Il reprend le même type d’analyse que celle
développée par sa journaliste, tendant à prouver à nouveau que l’APM a
interprété la décision de manière exagérée, par une extrapolation.
Claude Beauregard s’appuie sur le
Guide de déontologie de la Fédération professionnelle des journalistes du
Québec pour défendre sa journaliste. Il cite le guide de la manière suivante :
» les journalistes basent leur travail sur des valeurs fondamentales
telles que l’esprit critique qui leur impose de douter méthodiquement de tout « .
Il ajoute : » un journaliste n’est pas un haut-parleur, ni un
relationniste « . Enfin, il regrette les propos des plaignants qui accusent
le journal de tenter » d’atteindre la crédibilité des organismes tels que
l’Association des pompiers de Montréal « .
Par ailleurs, il joint à sa
réplique deux articles de presse; il s’agit de l’article de Gilles Gauthier
dans le journal La Presse daté du 27 janvier et de l’article de David
Johnston et Michelle Lalonde dans le journal The Gazette daté du même
jour. Ces coupures de journaux tendent à illustrer l’idée que, selon Claude
Beauregard, » la couverture journalistique fut beaucoup plus
« uniforme » que le président de l’Association des pompiers le décrit
« .
Réplique du plaignant
Le plaignant n’en a formulé aucune.
Analyse
La nouvelle, le reportage et l’analyse sont destinés à informer le public, c’est-à-dire à lui rappeler et à lui expliquer les faits en les situant dans leur contexte pour lui permettre de se faire, en toute connaissance de cause, une opinion sur les événements et l’actualité.
Dans le présent cas, le Conseil de presse a été en mesure de constater que le conflit entre l’Association des pompiers de Montréal (APM) et le Service de prévention des incendies municipal a été largement rapporté par les médias d’information, dont le journal Le Devoir. L’examen approfondi de l’article de Kathleen Lévesque montre que ce texte va au-delà du point de presse de l’APM, rapportant non seulement le point de vue des pompiers de Montréal mais également celui de la Ville.
De l’avis du Conseil, l’article de Mme Lévesque démontre qu’elle a agi avec un réel souci d’informer le public, en présentant les tenants et les aboutissants de relations de travail conflictuelles. Dans leurs commentaires, les mis-en-cause soulignent avec pertinence » qu’un journaliste n’est pas un haut-parleur, ni un relationniste « .
Le Conseil de presse estime que le rôle d’éclaireur que la presse est appelée à jouer est parfois mal perçu par les acteurs de l’événement. Il tient à rappeler qu’un(e) journaliste ne saurait être la courroie de transmission d’un quelconque groupe d’intérêt, organisme ou pouvoir.
Aussi, en regard de ces considérations, le Conseil rejette-t-il la plainte à l’encontre de Kathleen Lévesque et du quotidien Le Devoir.
Analyse de la décision
- C03C Sélection des faits rapportés
- C11F Titre/présentation de l’information
- C17D Discréditer/ridiculiser