Plaignant
Georgette Lalonde
Mis en cause
CHOT-TV, Réseau TVA
(Jean-Claude Surprenant, directeur de l’information)
Résumé de la plainte
Georgette Lalonde porte plainte
contre CHOT-TV, pour le traitement d’une nouvelle diffusée par cette
station du réseau TVA concernant son fils Paul. La plaignante dénonce la
façon dont CHOT-TV relate les accusations de fraude qui pèsent contre
son fils, et la répétition excessive de la nouvelle par TVA.
Griefs du plaignant
La plaignante reproche à CHOT-TV
d’avoir pris des images de son fils sans sa permission afin d’illustrer la
nouvelle de sa comparution devant le Tribunal sous une accusation de fraude. De
plus, elle souligne que confronté par le fils qui lui demandait ce qu’il
faisait, le caméraman de TVA a menti, en prétendant photographier
« les maisons de la rue ». Selon la plaignante, il s’agit
là d’un cas de « fausses représentations ».
Par ailleurs, Georgette Lalonde
déplore le nombre de diffusions de cette nouvelle et de l’image de son fils le
jour et le lendemain de sa première comparution le 25 février, et lors de sa
seconde comparution à la Cour, le 3 mars 1999. En tout, la plaignante note que CHOT-TV
a fait état de l’inculpation de Paul Lalonde pour fraude à chacune des
manchettes de la station et aux bulletins de nouvelles, c’est-à-dire, douze
fois sur trois jours!
« Je voudrais porter
plainte pour l’acharnement, harcèlement et cruauté mentale fait à cette famille
par TVA ». D’autant plus ajoute-t-elle, que « le
contenu de cette diffusion n’est pas exact, il y a beaucoup d’ouï-dire, on
termine le reportage en disant que trouvé coupable il est passible de 10 ans de
prison ».
La plaignante affirme avoir fait
part de ses doléances au directeur de l’information de CHOT-TV,
Jean-Claude Surprenant, qui aurait reconnu « qu’il aurait pu être
plus sobre dans ses commentaires, mais qu’il ne peut rien faire pour ça « .
» Mon fils (dit-elle) a communiqué avec lui le lendemain, le 26 février au
matin, pour lui dire qu’on avait pris sa photo sans sa permission et que le
procès est à venir ».
Pour ces raisons, Georgette Lalonde
demande au Conseil de presse de blâmer CHOT-TV et le réseau TVA.
Commentaires du mis en cause
Le directeur de l’information de CHOT-TV,
Jean-Claude Surprenant, rappelle que la fraude dont est accusé Paul Lalonde est
importante: 600 000 $ sur une période qui va de 1993 à 1998.
« Ces incidents se seraient produits… alors que Monsieur Lalonde
occupait la fonction de superviseur des livraisons pour Natrel. Ces accusations
sont graves et clairement d’intérêt public ».
Reprenant point par point les
reproches de la plaignante, M. Surprenant rejette d’abord l’accusation
d’acharnement formulée par Georgette Lalonde. Au sujet de l’utilisation de
l’image de Paul Lalonde et de la fréquence de sa diffusion, le directeur de
l’information de CHOT-TV rappelle que: « comme nous
n’avions que quelques secondes d’images, nous l’avons diffusé au ralenti et à
deux reprises. Cette technique est une pratique courante dans de tels
cas ».
Quant au reproche d’avoir diffusé
plusieurs fois l’information, Jean-Claude Surprenant ajoute qu’il n’a fait que
suivre » les procédures habituelles selon l’intérêt de la nouvelle. […]
l’information a été diffusée à plusieurs reprises sur une période de 24 heures,
mais ni plus ni moins qu’une autre nouvelle de pareille importance ».
Pour ce qui est de l’accusation de
« fausses représentations » portée par la plaignante à
l’endroit du caméraman de TVA, Jean-Claude Surprenant ne la retient pas
d’avantage. Selon lui, « M. Lalonde savait très bien pourquoi il
avait été filmé puisqu’il a téléphoné à la salle des nouvelles après le passage
de la caméra. Il a parlé avec notre chef de pupitre […] qui n’a pas eu à lui
expliquer la situation très longtemps. Paul Lalonde, qui est accusé
relativement à une fraude importante, devait s’attendre à ce que les médias
s’intéressent à l’affaire ».
Par ailleurs, le mis-en-cause
rejette totalement les griefs de la plaignante selon lesquels la nouvelle
aurait été inexacte et entachée d’ouï-dire. « Les informations que
nous avons utilisées ont toutes été confirmées par la police
d’Ottawa-Carleton ». Pour ce qui est de la mention de la peine
potentielle dans ce genre de cause, Jean-Claude Surprenant considère qu’elle
» est clairement justifiée dans le contexte et sanctionnée par les
règles et pratiques journalistiques courantes ».
Finalement, bien que le
mis-en-cause reconnaisse avoir parlé avec Mme Lalonde, il nie avoir utilisé le
mot « plus sobre » dans le sens que lui donne la
plaignante. Selon lui, il ne s’excusait en rien du traitement fait de la
nouvelle par TVA, mais il expliquait tout au plus à la plaignante que si
une information peut être traitée de plusieurs façons, « … la
nouvelle demeurait la même, à savoir que M. Lalonde était accusé relativement à
une fraude. Ainsi, avoir diffusé les images de l’accusé au début ou à la fin
n’aurait rien changé à la teneur de la nouvelle, ni à la rigueur de notre
travail ».
Réplique du plaignant
La plaignante dit être
« partiellement d’accord avec certains points apportés par M. Surprenant
« . Par contre, elle soutient » qu’il y avait acharnement et
harcèlement contre son fils, étant donné le nombre de diffusions de reportages
et aussi les moyens truqués utilisés par le caméraman pour la prise
d’images ».
Madame Lalonde n’est pas satisfaite
non plus de l’explication de Jean-Claude Surprenant concernant la conversation
qu’aurait eu son fils avec le chef de pupitre Jean Lemay. Dans ce contexte,
Georgette Lalonde maintient sa plainte.
Analyse
L’information communiquée au public fait nécessairement l’objet de choix rédactionnels et subit un traitement journalistique suivant divers modes appelés genres journalistiques. Ces genres, de même que la façon de présenter l’information, relèvent du jugement et des prérogatives des médias et des professionnels de l’information, qui sont par ailleurs tenus de respecter les faits en tout temps.
Dans le cadre de ces balises, le Conseil de presse est d’avis que CHOT-TV était justifié de considérer l’information concernant l’accusation de fraude à l’encontre de Paul Lalonde, comme étant d’intérêt public. Le montant de la fraude et la période de temps sur laquelle elle s’échelonne en faisaient une affaire criminelle importante dans la région et, dans ce contexte, la pratique de la station de rediffuser l’information sur une ou deux journées n’est ni exagérée, ni assimilable à de l’acharnement.
Par ailleurs, le Conseil n’a pas d’éléments lui permettant d’apprécier le contenu exact des propos échangés entre le caméraman de CHOT-TV et Paul Lalonde dans l’après-midi du 25 février 1999, soit le jour de la comparution en Cour de M. Lalonde.
Cependant, rien n’indique que le caméraman de TVA n’était pas identifiable et qu’il ait été ailleurs que sur la voie publique pour prendre ses images. Pour sa part, Paul Lalonde était dehors, sur le terrain de sa résidence. Or, M. Lalonde ayant comparu en Cour le matin même, sa cause était du domaine public, et les images le représentant étaient pertinentes pour l’illustration de la nouvelle le concernant.
Pour les raisons évoquées précédemment, le Conseil considère que CHOT-TV n’avait pas, dans les circonstances, à demander ou à obtenir la permission de M. Lalonde pour le filmer.
L’existence d’une presse libre et le droit à l’information seraient gravement compromis s’il était interdit aux médias de prendre et de diffuser les photos ou images qu’ils jugent d’intérêt public.
Pour tous ces motifs, le Conseil de presse rejette la plainte de Mme Georgette Lalonde à l’endroit de la station CHOT-TV.
Analyse de la décision
- C03A Angle de traitement
- C03C Sélection des faits rapportés
- C03D Emplacement/visibilité de l’information
- C14A Sensationnalisme/exagération/insistance indue
- C15A Manque de rigueur
- C23C Recours à une fausse identité
- C23D Tromper sur ses intentions