Plaignant
Syndicat des employés de La
Tribune de Sherbrooke
Mis en cause
Jacques Pronovost, le rédacteur en
chef de La Tribune de Sherbrooke
Résumé de la plainte
Les journalistes syndiqués de La
Tribune de Sherbrooke portent plainte contre leur rédacteur en chef, M.
Jacques Pronovost. La plainte porte sur l’attitude de J. Pronovost vis-à-vis de
la couverture d’une affaire judiciaire mettant en cause la directrice générale
de la Commission scolaire de la région de Sherbrooke (CSRS), Louise Boisvert.
Griefs du plaignant
Les journalistes syndiqués
reprochent à leur rédacteur en chef d’avoir avantagé Mme Louise Boisvert et
d’avoir » eu un comportement répréhensible […] en faisant en sorte que
soit biaisée la couverture journalistique du jugement rendu par le Tribunal du
travail » à son endroit.
Mme Boisvert aurait appelé Jacques
Pronovost afin de choisir le journaliste qui rendrait compte du jugement, en
l’occurrence Michel Rondeau, affecté aux affaires scolaires. Ce dernier avait
évoqué, dans une conversation téléphonique avec Mme Boisvert, la possibilité
que le journaliste affecté aux affaires judiciaires traite le dossier. Or,
l’insistance de Jacques Pronovost pour que ce soit Michel Rondeau qui signe
l’article et ce, à la demande même de la personne concernée par le jugement,
représente une première faute aux yeux du syndicat. Il s’agirait d’une
collusion d’autant plus grave que M. Pronovost serait coutumier des petits
arrangements avec les » détenteurs de pouvoir de la région « .
La seconde faute, plus gravement
dénoncée par les plaignants est encore la conséquence d’un éventuel arrangement
entre Mme Boisvert et le rédacteur en chef de La Tribune de Sherbrooke.
Il s’agit de » sa décision de préparer et d’imposer un titre qui […] vient
biaiser la lecture que l’on peut faire de cette nouvelle « . L’intervention
de M. Pronovost aurait pour but de » diminuer l’importance » de
la condamnation.
Enfin, cette intervention aurait
aussi conduit à prendre du retard dans la publication du jugement, l’entrevue
avec les parties concernées n’étant même pas indispensable selon les
plaignants.
Commentaires du mis en cause
M. Pronovost justifie le choix du
journaliste Michel Rondeau pour traiter du sujet au nom du respect du suivi apporté
à un dossier, M. Rondeau ayant déjà consacré un article aux plaidoyers des
parties mises en cause dans cette affaire.
Lorsqu’il s’explique sur le retard
de publication, Jacques Pronovost évoque son entente avec Louise Boisvert sur
le principe d’un article qui justifiait selon lui d’attendre une journée. Quant
au fait qu’il a voulu recueillir la réaction des parties au jugement, il le
revendique comme un devoir du journal: » La Tribune s’efforce
de livrer l’information la plus complète possible et de permettre aux
différentes parties concernées de faire part de leurs commentaires sur les
sujets litigieux « .
Jacques Pronovost répond ensuite du
principal reproche d’avoir imposé un titre qui biaise le contenu de
l’information. Il attire l’attention sur le fait que les propos contenus dans
le titre sont en conformité avec le jugement rendu. Jacques Pronovost se défend
d’avoir voulu innocenter Mme Boisvert. Il s’agit, selon lui, » de nuances
et de choix « . Son intervention est motivée par le fait que les titres
» doivent […] respecter […] le style et les orientations données par la
direction afin de garder une uniformité dans la ligne de pensée du journal
« .
Enfin Jacques Pronovost conclut sur
les interactions qui peuvent exister entre tous les acteurs sociaux d’une
petite ville. De son avis, » cela ne fait pas en sorte que ni les
journalistes, ni les directions d’entreprises de presse ne puissent conserver
la distance nécessaire à l’exercice de leurs fonctions « .
Réplique du plaignant
Les plaignants tiennent à expliciter
leur plainte suite aux commentaires présentés par Jacques Pronovost. Ils jugent
que l’interaction évoquée par le rédacteur en chef de La Tribune «
a dépassé la mesure habituelle et raisonnable « . Cette attitude l’aurait
conduit à » poser des gestes inusités et inacceptables, compte tenu du
droit du public à une information libre et impartiale « .
Ils reviennent ensuite sur la
question du titre en ajoutant à leur plainte une remarque sur la place très
importante qui lui est consacrée.
Les journalistes syndiqués de La
Tribune de Sherbrooke retiennent également des commentaires de leur
rédacteur en chef que celui-ci » ne nie nulle part l’intervention de
Louise Boisvert « .
Analyse
Le Conseil de presse du Québec est d’avis que le rédacteur en chef d’un journal dispose d’un certain nombre de prérogatives vis-à-vis de ses journalistes.
Dans le cas soulevé par la présente plainte, il apparaît que le rédacteur en chef de La Tribune de Sherbrooke, Jacques Pronovost n’a pas outrepassé ses droits. À aucun moment, il n’a essayé d’imposer à son journaliste Michel Rondeau un point de vue non conforme à la réalité. Le fait qu’il ait proposé un titre à l’article en cause n’est pas en soi condamnable.
Par ailleurs, la plainte attirait l’attention sur d’éventuelles interactions entre les détenteurs de pouvoir de la région et le rédacteur en chef de La Tribune de Sherbrooke. Or, si le Conseil de presse recommande aux entreprises de presse et aux journalistes de se montrer prudents et attentifs aux tentatives de manipulation de l’information, il ne dispose pas, dans le présent cas d’éléments tangibles pour se prononcer, sans tomber dans le procès d’intention.
Pour toutes ces raisons, le Conseil de presse rejette sur le fond la présente plainte à l’endroit de Jacques Pronovost.
Analyse de la décision
- C11F Titre/présentation de l’information
- C13B Manipulation de l’information
Date de l’appel
31 August 2000
Décision en appel
Les membres de la Commission,
présidée par M. Michel Roy, ont conclu à l’unanimité de maintenir la décision
rendue en première instance et ainsi rejeté l’appel.
Griefs pour l’appel
Syndicat des employés de La
Tribune