Plaignant
Valérie Caron
Mis en cause
Anne-Marie Panasuk, journaliste, et
Radio-Canada / émission « Zone libre » (Claude
Saint-Laurent, directeur général des programmes Information TV – SRC-RDI)
Résumé de la plainte
Mme Valérie Caron porte plainte
contre la journaliste Anne-Marie Panasuk et l’émission « Zone
libre » pour leur reportage sur les maisons de naissance diffusé le
11 juin 1999.
La plaignante a elle-même accouché
dans une maison de naissance et a eu en main le rapport final produit par le
Conseil d’évaluation des projets-pilotes; elle considère que « ce
reportage […] jette un grave discrédit sur la profession de
sage-femme ».
Griefs du plaignant
La plaignante qualifie le reportage
mis en cause de « véritable pièce montée ». Selon elle, la
journaliste Anne-Marie Panasuk a utilisé des « mauvais
procédés » pour réaliser « un reportage
tendancieux ».
Valérie Caron conteste la qualité
des statistiques révélées dans le reportage, entre autres le fait que l’on
annonce « d’un ton dramatique qu’il y a deux fois plus de bébés
morts-nés chez les clientes des sages-femmes que chez les clientes des
médecins ». Elle cite à l’appui le rapport du Conseil d’évaluation
des projets-pilotes: « une telle différence pourrait aussi
s’observer dans une sélection au hasard de 1 000 dossiers de naissances parmi
les 90 000 naissances annuelles au Québec ».
Elle déplore également l’omission
de points de vue favorables aux maisons de santé ainsi que les allusions à une
éventuelle « magouille politique ».
Enfin, la plaignante estime que
« le plus grave est de passer sous silence tous les bénéfices pour la
santé de la mère et de l’enfant reliés à un suivi avec la
sage-femme ».
Commentaires du mis en cause
Commentaires de Claude
Saint-Laurent, directeur général des programmes Information TV :
M. Claude Saint-Laurent précise
quel était le dessein de ce reportage en reconnaissant « ne pas avoir
traité l’ensemble de la question »; « tel n’était pas notre
but » dit-il. La date de l’adoption de la loi sur la légalisation des
sages-femmes approchant, l’équipe de » Zone libre » a voulu
« voir sur quelles bases elle allait être votée ». Il
rappelle que de nombreux reportages ont déjà été réalisés sur la naissance en
général et les sages-femmes en particulier.
Claude Saint-Laurent témoigne du
fait qu’en suivant la perspective initialement définie, leurs recherches les
ont conduit vers des « documents et témoignages » qui les
ont « alarmés ».
Concernant l’équilibre des points
de vue, il rappelle que le reportage commençait « en expliquant que
dans la plupart des cas tout se passe bien lors des accouchements en maisons de
naissance ». De plus, il mentionne que « plusieurs
sages-femmes étaient interviewées » ainsi que des « médecins
qui ont accepté de participer avec les sages-femmes aux
projets-pilotes ». Claude Saint-Laurent se prononce ensuite sur la
pertinence des statistiques. Il cite un des intervenants du reportage:
« lorsqu’il s’agit d’incidents graves comme les mortinaissances ou
les cas de détresse respiratoire, nul n’est besoin d’attendre une différence
statistiquement significative pour se poser des questions ».
Pour conclure, M. Saint-Laurent
affirme que ce reportage a consisté à « mettre de côté la rectitude
politique pour plutôt regarder la question froidement et montrer que même avec
l’adoption de la loi qui légalise la pratique des sages-femmes, il reste encore
de sérieux doutes qui demandent à être éclaircis ».
Réplique du plaignant
La plaignante n’a pas répliqué aux
commentaires.
Analyse
L’information livrée par les médias d’information fait nécessairement l’objet de choix. Ces choix doivent être faits dans un esprit d’équité et de justice. Ils ne se mesurent pas seulement de façon quantitative, sur la base d’une seule émission non plus qu’au nombre de lignes ou au temps d’antenne, mais aussi de façon qualitative, tout étant fonction de l’importance de l’information et de son degré d’intérêt public.
L’analyse du reportage en cause effectuée par le Conseil fait apparaître que la journaliste Anne-Marie Panasuk a choisi un angle de traitement justifié par un intérêt de santé publique. Le but du reportage était de mettre l’accent sur les problèmes et dysfonctionnements majeurs subsistant à la veille de la légalisation de la pratique de sage-femme au Québec. Cet angle de traitement a été clairement énoncé en présentation et en cours de reportage.
De l’avis du Conseil, ce questionnement critique était légitime compte tenu du haut degré d’intérêt public des thèmes abordés. La journaliste s’est gardée de faire des généralisations abusives sur l’ensemble de la profession de sage-femme et son reportage a donné la parole à des représentantes de maisons de naissance.
Dans son examen, le Conseil de presse a également tenu compte du fait que des reportages antérieurs de Radio-Canada ont mis en valeur l’importance de ces maisons de naissance au cours des dernières années, contribuant alors à leur reconnaissance.
Aussi, pour tous ces motifs, le Conseil rejette la plainte à l’endroit de la journaliste Anne-Marie Panasuk et de l’émission » Zone libre « .
Analyse de la décision
- C11B Information inexacte
- C12B Information incomplète
- C12C Absence d’une version des faits
- C13A Partialité
- C17D Discréditer/ridiculiser