Plaignant
Gilles Rhéaume,
président du Mouvement souverainiste du Québec; Manon Berthelet; Muguette
Gratton; Yves Sabourin; MarcelleVézina
Mis en cause
Diane Francis,
journaliste et The National Post
(Kenneth Whyte, rédacteur en chef )
Résumé de la plainte
Les plaintes portent sur
un article publié le 11 avril 2000 dans le quotidien
The National Post en page C-2 sous la
plume de la journaliste Diane Francis et intitulé « Quebec language policy
isn’t funny ». Les cinq plaignants ont
adressé une plainte individuelle, dans une présentation personnelle et
différenciée.
Griefs du plaignant
Gilles Rhéaume reproche aux
mis-en-cause de semer la haine du Québec, de sa langue et de ses institutions par
des écarts de langage contrevenant à l’éthique journalistique et incompatibles
avec le droit à une information juste et de qualité. Le plaignant reproche
également à Mme Francis et à son quotidien d’entretenir des préjugés contre le
Québec. Il considère que « les injures et les attaques venant d’une certaine
presse anglophone ont assez duré ». Il souhaite qu’on arrive
« à ce que des articles aussi ignobles ne
continuent pas à détériorer impunément le climat social en présentant tout ce
qui vient du Québec comme étant déficient et débile », ce qui s’appelle, selon
lui, du «racisme ».
Manon
Berthelet se dit « abasourdie » par un article aussi « haineux ». Bien que ce
journal tienne souvent des propos malveillants envers les Québécois, il a
rarement atteint cette apogée raciste. La plaignante trouve ces propos
totalement inacceptables et l’article ne sert qu’à attiser la haine d’un peuple
envers l’autre. « Je ne consens pas à ce que mon peuple et mon gouvernement
soient insultés de si répugnante façon », conclut-elle.
Muguette Gratton considère que Diane Francis insulte tous les Québécois de
façon intolérable, en utilisant des mots comme « brown shirts », « pur laine
Super Race » et « bigots ». La plaignante considère que lorsqu’on exerce le
métier de journaliste, il faut savoir peser ses mots.
Yves Sabourin ne voit dans
l’article dénoncé qu’un racisme primaire de première classe et pense que la
haine de la journaliste à l’endroit des Québécois n’a plus de fin. Il considère
que le quotidien et sa journaliste contreviennent à l’éthique journalistique.
Diane Francis ne cesse de pourfendre les
Québécois avec tant de préjugés que le tout dégénère en attaques maladives.
L’article en question n’est, selon lui, qu’une suite d’injures et de haine à
l’égard des francophones de ce coin de terre.
Marcelle
Vézina affirme que ce genre d’article est inacceptable pour le peuple québécois
et que s’il avait été écrit contre les Juifs, il y aurait eu des tollés de
partout, obligeant Diane Francis à se rétracter et à s’excuser. Elle se demande
pourquoi cela est différent pour les Québécois.
Commentaires du mis en cause
Les mis-en-cause
n’ont fourni aucune réponse.
Réplique du plaignant
Aucune réplique.
Analyse
À titre de tribunal d’honneur de la presse québécoise, le Conseil examine les plaintes qu’il reçoit que sous un angle déontologique en regard de la qualité du travail journalistique. L’examen de toute plainte ne peut donc être en aucune manière associé à quelque cause que défendrait un plaignant.
La chronique et la critique sont des genres d’information qui laissent à leurs auteurs une grande latitude dans l’expression de leurs points de vue et de leurs jugements. Le Conseil tient à souligner cependant que la latitude reconnue aux chroniqueurs n’est pas sans limite. Ceux-ci doivent éviter, tant par le ton que par le vocabulaire qu’ils emploient, de donner aux événements une signification qu’ils n’ont pas ou de laisser planer des malentendus qui risquent de discréditer des personnes ou des groupes.
Or l’examen de l’article dénoncé par les plaignants révèle que la journaliste Diane Francis y transgresse les limites déontologiques par des entorses à la réalité des faits et par plusieurs affirmations ou accusations non démontrées. La journaliste, par exemple, affirme qu’il y a eu accentuation des mesures coercitives de la part des responsables de l’application de la loi. Cependant, tout en donnant des exemples récents, Mme Francis ne démontre pas qu’il y ait eu escalade «escalated the harassment » des vérifications et elle déforme les faits en ne précisant pas que les contrevenants ont été rappelés à l’ordre non pas parce qu’ils utilisaient trop l’anglais mais parce qu’ils n’utilisaient pas le français. Enfin, elle retourne l’information et transforme ces contrevenants en victimes du Parti Québécois.
D’autres transgressions sont également observées en regard du ton et de la langue de l’article. Le texte incriminé contenait certaines phrases comme « This is brown shirts a la Quebec who hope to fan fears about the future of the pur laine Super Race ». Pour le Conseil, il ne s’agit plus d’information ou de satire, mais d’une opinion non démontrée, à connotation haineuse et raciste qui ne peut avoir pour fin ultime d’informer mais de discréditer les personnes visées. Il s’agit donc d’abus de langage inadmissibles qui ne devraient pas être tolérés dans les pages d’un grand quotidien national. Le Conseil voit difficilement que la direction du National Post puisse les endosser, fussent-ils l’expression de la pensée de certains Canadiens.
Pour ces raisons le Conseil de presse du Québec ne peut que retenir la plainte contre la journaliste Diane Francis et le quotidien National Post.
Analyse de la décision
- C01C Opinion non appuyée sur des faits
- C11B Information inexacte
- C11C Déformation des faits
- C11H Terme/expression impropre
- C13A Partialité
- C13B Manipulation de l’information
- C15I Propos irresponsable
- C17C Injure
- C17D Discréditer/ridiculiser
- C17E Attaques personnelles
- C17G Atteinte à l’image
- C18B Généralisation/insistance indue
- C18C Préjugés/stéréotypes