Plaignant
Gilles Baril, Céline Tremblay et Pierre Grandchamp
Mis en cause
Valérie Schmaltz,
journaliste et Le Partenaire de Matawinie
(Alain Vaillancourt, éditeur)
Résumé de la plainte
Gilles
Baril, Céline Tremblay et Pierre Grandchamp portent plainte contre la
journaliste Valérie Schmaltz et son article paru dans le journal
Le Partenaire de la
Matawinie en date du 18 juillet 2000,
sous le titre « À cause d’un pompier volontaire quatre conseillers municipaux
s’enflamment ». La plainte vise principalement l’exactitude et la rigueur de
l’information. L’article rapporte une séance régulière du Conseil municipal de
St-Damien-de-Brandon tenue le 14 juillet 2000.
Lors de l’assemblée du
14 juillet 2000, il y a eu dissension entre les membres du Conseil. La réunion
s’est terminée abruptement avec le départ de 4 conseillers indépendants dont
Gilles Baril et Céline Tremblay, les plaignants. Là-dessus, deux
interprétations différentes : celle du maire Doré reproduite dans le journal et
celle des conseillers. À l’élection de novembre 1999, le maire Doré n’avait pu
faire élire qu’un seul conseiller de son équipe, soit M. Guy Lorrain, également
président de la corporation Multimédia Matawinie qui administre le journal en
question. Tous les autres conseillers dont Gilles Baril et Céline Tremblay
furent élus à titre d’indépendants.
Quant à M. Pierre Grandchamp, il est citoyen de la ville de St-Damien.
Griefs du plaignant
Ils reprochent à l’article de laisser le lecteur sous
l’impression que la journaliste était présente à la séance. Les plaignants
estiment que Mme Schmaltz aurait dû préciser qu’elle n’était pas présente à la
réunion. Les plaignants expliquent qu’étant donné la situation tendue entre
d’une part, le maire Doré et son conseiller M. Lorrain et, d’autre part, la «
bande des quatre », la journaliste aurait dû aussi contacter les quatre
conseillers pour une autre version des faits et laisser le soin aux lecteurs de
juger par eux-mêmes. Dans l’article, la journaliste induirait les lecteurs en
erreur en écrivant « pour des dommages qu’il aurait supposément infliger
(sic)… ». Les plaignants trouvent que le mot « supposément » induit en
erreur. De plus, ils mentionnent deux appels faits à la journaliste. Le premier
par M. Baril où celui-ci exprimait à Mme Schmaltz son désaccord avec l’article.
Le deuxième où Mme Schmaltz lui aurait déclaré tenir ses informations du maire
Doré. Les plaignants déplorent que le journal n’ait pas fait de rectification.
Les conseillers estiment que l’information devrait être véhiculée avec le plus
de prudence et d’objectivité possible compte tenu de l’implication de
M.Guy Lorrain et de son président, M.Doré, dans le journal.
Commentaires du mis en cause
Commentaires de la journaliste Mme Valérie
Schmaltz
Mme Schmaltz estime qu’il n’y a rien de
reprochable dans son article. Elle soutient que l’article explique son refus de
divulguer ses sources à M. Grandchamp en raison du caractère politique du
dossier. M. Grandchamp se trouverait en
conflit direct avec M. Doré puisqu’il est un ex-maire de St-Damien. Elle
soutient que l’article montrait bien qu’elle n’y avait pas assistée puisque son
texte commence par « il semblerait que ». La journaliste aurait
indiqué à M. Grandchamp que lorsqu’elle veut
de l’information, elle s’adresse au porte-parole de la municipalité qui est
dans ce cas M. Doré. Pour ce qui est du mot « supposément », Mme Schmaltz
l’aurait utilisé car il n’y avait aucune explication connue concernant
l’origine du méfait. Selon elle, le but de l’article était plutôt d’informer
les lecteurs du départ précipité des quatre conseillers municipaux.
Commentaires de M. Alain Vaillancourt
(éditeur du journal)
Tout d’abord,
M.Vaillancourt précise que le journal est publié par Corporation
Multimédia de la Matawinie (OSBL) dont
le président est M. Guy Lorrain. Il
reconnaît que la situation est délicate,
c’est pourquoi ni lui ni sa journaliste ne communiquent avec M. Lorrain.
Il confirme la position de sa journaliste selon laquelle le journal ne
communique qu’avec les maires. En ce qui a trait à l’impression laissée aux
lecteurs que la journaliste avait assistée à la séance régulière, M.
Vaillancourt affirme que si elle avait été présente, elle n’aurait certes pas
utilisé le conditionnel « il semblerait ». Il soutient également les propos de
sa journaliste en ce qui concerne l’utilisation du terme « supposément ».
Réplique du plaignant
Réplique de M.
Gilles Baril (conseiller municipal)
Selon M. Baril,
l’article du 18 juillet est erroné et même tendancieux. Il se sent profondément
lésé et affirme que les quatre conseillers sont sortis parce que le maire
M. Doré n’a pas rappelé à l’ordre le contribuable
qui avait été impoli envers Mme Tremblay. De plus, le journal savait que les
conseillers étaient en désaccord avec l’article mais n’est jamais revenu sur
l’affaire. Selon lui, l’intérêt public exigeait
que le point de vue des quatre conseillers soit présenté aux
lecteurs. Il soutient aussi que Mme
Schmaltz a écrit des propos complètement erronés sans vérifier le tout et sans
présenter leur point de vue. Il ajoute que la journaliste doit aller chercher
ses informations là où elles se trouvent, surtout quand il y a divergence des
points de vue. M. Baril conclut en mentionnant que Mme Schmaltz aurait dû
préciser qu’elle n’avait pas assisté à l’assemblée. Il reproche enfin qu’une
fois informés de leur point de vue, la journaliste et son éditeur l’aient
ignoré.
Réplique de Mme Céline Tremblay (conseillère
municipale)
Mme Tremblay se dit en désaccord avec le
traitement de l’information et qu’en aucun cas la journaliste ne l’a
contactée. Elle trouve incorrect que Le
Partenaire de la Matawinie ne présente uniquement le point de vue minoritaire
de M. Doré. Selon elle, Mme Schmaltz aurait dû aller aux sources et présenter
les deux versions. Celle-ci s’appuie
sur deux autres articles parus les 15 et 22 août 2000 au sujet du barrage du
lac Noir où une seule version des faits y est également présentée. Concernant
le citoyen qui l’avait apostrophée impoliment, elle précise que celui-ci est
venu s’excuser devant témoins, lors de l’assemblée subséquente.
Replique de M. Pierre Grandchamp (citoyen)
M. Grandchamp allègue que
Le Partenaire a publié un article contesté par plusieurs Damienois
et par la majorité des conseillers puisqu’une seule version des faits y est
exposée. En ce qui concerne l’argument de la journaliste à l’effet qu’il est
lui-même l’ex-maire de la ville de St-Damien, il explique que le maire actuel
occupe la fonction depuis 1995. Il rappelle
qu’il fût maire de 1973 à 1975. Il affirme que la journaliste n’a jamais
communiqué avec lui. Il admet que le maire de St-Damien ait une opinion donnée
et que le journal en fasse écho, mais reproche que la version de la journaliste
ne tienne pas compte du fait qu’il y ait une version complètement différente,
et que le journal se contente de présenter une version sans la vérifier. En
cela, l’intérêt public ne serait pas servi. Ainsi, il précise qu’il n’est pas
en conflit avec le maire actuel mais bien avec le journal qui, selon lui, ne
respecte pas la rigueur et l’exactitude de l’information. M. Grandchamp ressent
de l’injustice. Pour lui, le journal a retenu l’information au détriment de
l’intérêt du public.
Analyse
Les médias et les journalistes doivent, de façon générale, mentionner la source ou la provenance de leurs informations et prendre tous les moyens à leur disposition pour s’assurer de leur crédibilité et pour vérifier l’authenticité de l’information qu’ils en tirent. Ils doivent éviter de s’en remettre à des sources anonymes pour diffuser n’importe quelle information.
L’article en cause de la journaliste Valérie Schmaltz apparaît reposer exclusivement sur la version des faits d’une source unique à propos de la réunion du conseil municipal de St-Damien, soit celle du maire de la municipalité, M. Doré; une réunion à laquelle la journaliste n’a pas assisté. Si Mme Schmaltz avait pleinement le droit de rapporter la version d’une source aussi officielle que le maire de St-Damien, elle avait le devoir en revanche de signaler clairement à ses lecteurs son absence de la réunion du conseil municipal, et le fait que l’ensemble de son texte ne faisait que rapporter les propos du maire Doré. Par surcroît, aux yeux du Conseil le maire Doré et son conseiller Guy Lorain se trouvent en situation d’apparence de conflit d’intérêts dans ce dossier, compte tenu du lien administratif liant M. Lorain au journal Le Partenaire de Matawinie.
Une fois au courant de la version contradictoire de trois conseillers municipaux quant au déroulement exact de la réunion du conseil de St-Damien, la journaliste et son éditeur avaient alors l’obligation de permettre l’expression de cette divergence d’opinions dans une édition subséquente, soit par le biais d’un article complémentaire de Mme Schmaltz, soit en ouvrant leur page du courrier des lecteurs aux conseillers dissidents.
En ce qui a trait au grief sur le mot « supposément » qu’a utilisé Mme Schmaltz, il apparaît au Conseil que celui-ci induit en erreur. Il aurait été préférable que la journaliste vérifie ses sources; alors elle n’aurait pu que constater, suite à un jugement de la Cour, qu’il y avait vraiment eu méfait.
Par conséquent, après l’examen des documents le Conseil de Presse retient la plainte contre Le Journal de la Matawinie et sa journaliste Valérie Schmaltz.
Analyse de la décision
- C02A Choix et importance de la couverture
- C11A Erreur
- C15A Manque de rigueur