Plaignant
Ferdinand Lavoie
Mis en cause
Le Cercle de Presse du Saguenay,
(M. Carol Néron, président) Carol Néron, adjoint au rédacteur en chef,
chef éditorialiste Journal le Quotidien (Bertrand Genest, rédacteur en
chef et éditeur adjoint)
Résumé de la plainte
M. Ferdinand Lavoie estime que M.
Carol Néron, qui détient un poste de direction au sein du journal saguenéen le
Quotidien, occupe des fonctions incompatibles entre elles, soit celle de
« journaliste » et celle » d’éditorialiste en chef « .
Par ailleurs M. Lavoie considère également comme incompatibles avec son statut
professionnel d’éditorialiste les nouvelles fonctions de M.Néron comme
président du Cercle de Presse du Saguenay. Enfin, il reproche aux mis-en-cause
d’avoir modifié une lettre aux lecteurs. Pour ces raisons, M. Lavoie dépose
successivement trois plaintes devant le Conseil de presse du Québec.
Griefs du plaignant
La première plainte de M. Lavoie
vise le Cercle de Presse du Saguenay ainsi que son nouveau conseil
d’administration, incluant son président, Carol Néron, qui est aussi
éditorialiste en chef au Quotidien. Le plaignant considère que la
fonction d’éditorialiste de M. Néron est incompatible avec ses fonctions de
président du Cercle de Presse. Le plaignant demande donc au Conseil d’exiger du
conseil d’administration du Cercle de Presse du Saguenay la démission de leur
nouveau président, en invoquant que ce cercle de presse » fait partie
intégrante de cet ensemble de la presse » sur lequel s’étend l’action du
Conseil de presse. Le Conseil de presse a estimé, dès le départ, que cet
organisme n’entrait pas dans son champ de juridiction déontologique, n’étant
pas une entreprise de presse mais une association de personnes.
La seconde plainte est déposée
contre Carol Néron, » commentateur » au journal le Quotidien à
qui M.Lavoie demande des comptes pour avoir » modifié, écourté,
falsifié, altéré et dénaturé » sa lettre du 11 août destinée à la rubrique
» Votre opinion « .
Dans sa troisième plainte, M.
Lavoie demande au Conseil de presse » d’obliger l’éditeur du journal le
Quotidien (Bertrand Genest, éditeur adjoint) à identifier l’article
écrit par l’éditorialiste de ce journal, M. Carol Néron, par le nom que lui
reconnaît le dictionnaire Petit Larousse, soit « Éditorial » […]
« . Le plaignant accuse les mis-en-cause de camoufler la fonction M. Néron
en titrant ses articles » commentaire » et » clin d’œil «
au lieu du titre » éditorial » et il lui reproche de mélanger les
deux produits que sont l’éditorial et le commentaire.
Commentaires du mis en cause
Les commentaires des mis-en-cause
ne portent que sur la partie de la plainte concernant la lettre d’opinion que
M. Lavoie avait fait parvenir au journal et qui avait été publiée par le
Quotidien.
En fait, en guise de commentaires,
M. Néron a acheminé au Conseil copie de la lettre de réponse qu’il a adressée à
M. Lavoie le 28 août 2000 et qui contient les explications données au plaignant
relativement à sa lettre d’opinion. Cette lettre constitue le résumé de la
position des mis-en-cause dans le dossier. M. Néron y indique notamment qu’il
comprend l’agacement du plaignant à la suite de la publication de la lettre
d’opinion qui contenait deux erreurs de retranscription et il mentionne que son
journal a publié un erratum dans son édition du 28 août 2000.
Réplique du plaignant
M. Lavoie n’a pas inscrit de
réplique formelle mais a multiplié les lettres explicatives concernant la
recevabilité de sa première plainte, la compréhension différente que donnait le
Conseil à ses affirmations et les modifications, nécessaires à ses yeux, aux
titres portés par M.Néron, titres incompatibles avec ses différentes
fonctions. Il a rappelé au Conseil de presse les définitions des mots «
journaliste « , » éditeur » et » rédacteur » pour
ensuite exposer les distinctions à faire entre le monde de la rédaction et
celui de l’édition. Pour lui » ces deux mondes doivent demeurer
indépendants l’un de l’autre! Les nécessités de l’un sont incompatibles avec les
nécessités de l’autre! L’essentiel de chacun de ces deux mondes ne peuvent être
réunies aux mains d’une même personne « .
Dans une lettre datée du 24 janvier
2001, il rappelle également qu’il a déposé trois plaintes, et il reprend son
argumentation sur les titres de M. Néron. Le plaignant insiste : » Je
redemande au Conseil de presse du Québec d’identifier mon dossier comme il doit
être et comme il est inscrit en entête de ma présente lettre à l’item objet
« . Il exige » qu’un numéro de dossier soit attribué à chacune d’entre
elles « .
Analyse
Le Conseil a jugé dès le départ que la plainte visant le Cercle de Presse du Saguenay n’entrait pas dans son champ de juridiction déontologique puisqu’il ne s’agit pas d’une entreprise de presse mais bien d’une association de personnes. M. Lavoie avait demandé si le Cercle de Presse du Saguenay ne faisait pas partie de l’ensemble de la presse et s’il n’était pas ainsi une activité du monde journalistique, le faisant par le fait même relever de l’autorité du Conseil de presse.
Pour le Conseil, de même qu’une activité du Collège des médecins est une activité du monde médical sans être un » acte médical « , une activité d’un cercle de presse constitue une activité du monde journalistique sans être pour autant un » acte journalistique « . En ce sens, le Conseil de presse n’encadre pas les activités d’un tel organisme. Tout au plus le Conseil se serait-il penché sur cette association, ou tout autre organisation similaire, s’il s’était avéré que celle-ci avait porté atteinte à la liberté de presse ou au droit du public à l’information. Or, dans le présent dossier, le Conseil ne voit aucune atteinte à ces principes.
Le Conseil a de plus considéré que s’il y avait éventuellement conflit d’intérêts, cette matière relèverait du conseil d’administration de l’organisme privé que constitue le Cercle de Presse. La décision d’élire M. Carol Néron à titre de président était de l’ordre de la régie interne de l’organisme et partant, le Conseil de presse a estimé qu’il appartenait à ses membres d’en vérifier le bien-fondé.
Les deux autres plaintes dirigées contre M.Carol Néron et la direction de son journal ont été traitées dans le cadre du même dossier puisque celles-ci concernaient le même objet.
Dans le premier cas, les mis-en-cause ont reconnu deux erreurs mineures dans la retranscription de la lettre aux lecteurs du plaignant, erreurs qui ne changeaient pas, sur le fond, la portée des informations. De plus, ils ont publié un erratum, ce qui apparaît, aux yeux du Conseil, une mesure de réparation acceptable dans les circonstances.
Dans l’autre cas, le plaignant alléguait que les différents titres portés par M. Néron au sein du journal le Quotidien étaient incompatibles entre eux.
Tout en reconnaissant que les titres attachés aux fonctions de M.Néron pourraient prendre, aux yeux de certains, l’apparence d’un conflit d’intérêts, le Conseil de presse considère que le plaignant n’a pas fait la preuve de faits, de comportements, d’actions ou de produit journalistique contraire aux principes déontologiques. En outre, les titres et les activités de M. Néron au sein du journal relèvent davantage du domaine des relations de travail et de la gestion d’entreprise que de celui de l’éthique journalistique.
Dans une de ses plaintes, le plaignant émettait deux suggestions au Conseil concernant l’obligation « d’identifier son article par le titre qui lui est propre, celui d’Éditorial » et concernant le fait de porter le titre » d’éditorialiste « au lieu de celui de » journaliste « .
Le Conseil fait observer à ce propos que la fonction d’éditorialiste fait partie intégrante de la profession de journaliste. Au surplus, cette fonction relève du journalisme d’opinion, tout comme celle du commentateur et du chroniqueur; il s’agit donc ici d’un même genre journalistique. Or, dans cet esprit, rien n’interdit à un éditorialiste de signer un jour un commentaire et le lendemain un éditorial, ou le surlendemain un billet, pour autant que le genre soit clairement identifié dans le journal.
Aussi, compte tenu de l’ensemble de ces considérations, le Conseil de presse rejette-il les plaintes de M. Ferdinand Lavoie contre M.Carol Néron et le Quotidien.
Analyse de la décision
- C09B Droit de réponse insatisfaisant
- C09C Modification du texte
- C20A Identification/confusion des genres
- C22B Engagement politique
- C22D Engagement social
- C22G Appartenance du journaliste
Date de l’appel
7 September 2001
Décision en appel
Les membres de la Commission ont conclu
à l’unanimité de maintenir la décision rendue en première instance.
Griefs pour l’appel
M. Ferdinand Lavoie interjette
appel à la décision du Conseil de presse.