Plaignant
Jean-Luc Dion
Mis en cause
Jean-Marc Beaudoin,
journaliste, et Le Nouvelliste (Christiane St-Pierre, rédactrice en chef)
Résumé de la plainte
M. Jean-Luc Dion porte plainte contre
Le Nouvelliste au sujet d’une chronique du journaliste Jean-Marc
Beaudoin intitulée « Bonjour Popo!
» et parue dans l’édition du jeudi 27 septembre 2001. Le plaignant reproche au
journaliste d’avoir gratuitement dénigré le candidat péquiste Yves Demers dans
une chronique portant sur les élections partielles dans la circonscription de
Laviolette.
Griefs du plaignant
Le plaignant soutient que le chroniqueur Jean-Marc Beaudoin
n’a pas respecté les principes déontologiques d’objectivité et d’impartialité
de l’information, en attaquant de façon virulente le candidat du Parti
Québécois, M. Yves Demers.
M. Dion dénonce en premier lieu les propos virulents du
chroniqueur, lorsque celui-ci affirme que: « Parce que Yves Demers ne
passe pas la rampe, on a recentré la campagne péquiste sur Jean-Pierre Jolivet
qui se fait plus visible ». Il dénonce également l’allusion faite à «
l’épaisseur du portefeuille » de M. Demers, « victime » de « ses déboires
financiers ». Le plaignant juge par ailleurs déplacé et sans intérêt aucun
l’évocation du « look » du candidat, ainsi que l’analogie métaphorique entre «
la blonde et le chauve ». Il réprouve enfin la comparaison faite entre la
couleur des affiches, propre à ridiculiser le Parti Québécois: « les
affiches libérales, conçues par le national, sont beaucoup plus percutantes que
les affiches péquistes, aussi conçues au national. Les péquistes ont adopté un
jaune-vert ambigu qui tire parfois sur le caca de bébé. C’est quand même mieux
que le noir et blanc économique du couple de l’ADQ (…). C’est mieux aussi que
les affiches d’un bleu délavé du candidat du parti indépendant, Christian
Flamand ».
Au total, le
plaignant indique que le journaliste a fait preuve de bassesse intellectuelle
et d’insignifiance: «Remarquons que rien n’est dit du programme
politique de l’un ou l’autre des candidats, avec ou sans humour».
Commentaires du mis en cause
Commentaires de M. Jean-Marc Beaudoin, journaliste :
Le journaliste précise de prime abord qu’au moment où il a
rédigé sa chronique, la campagne électorale dans la circonscription de
Laviolette était déjà très avancée et que la perspective d’une défaite
souverainiste s’imposait de plus en plus dans les sondages.
M. Jean-Marc Beaudoin affirme avoir fait son travail en
vérifiant et en analysant l’esprit des différentes troupes électorales, en
faisant des commentaires et en tirant des conclusions. Concernant les propos à
l’égard du candidat péquiste Yves Demers, le chroniqueur précise que
«s’il y avait un doute sur la justesse de mon analyse, les résultats du
vote doivent l’avoir dissipé». En ce qui a trait à l’évocation des «
déboires financiers » de M. Demers, le journaliste indique qu’il était tout à
fait pertinent qu’il évoque la chose, puisqu’elle avait pris une dimension
électorale.
M. Beaudoin soutient que « Le Nouvelliste a consacré des
pages entières à la présentation des candidats et à leurs programmes. Il n’y
avait aucune obligation de ma part d’y revenir dans ma chronique ». Il affirme
enfin que « Les faits rapportés étaient exacts et connus… Il n’y a pas non plus
de propos qui soient de nature haineuse, diffamatoire ou simplement mesquine.
Il n’y a pas d’interdit à rapporter par moment les choses avec « couleur », ce
qui est tout à fait indiqué dans le journalisme de colonne » et qu’il a fait
son travail avec honnêteté et professionnalisme.
Commentaires de Mme Christiane St-Pierre, rédactrice en chef
:
En référant au genre journalistique de la chronique mise en
cause, Mme St-Pierre rappelle qu’une chronique permet des prises de position et
des avis très personnels du rédacteur. Ce genre d’article repose, selon elle,
sur une vision subjective de la réalité et suppose que son auteur livre une
lecture strictement personnelle: « La chronique est un lieu par
excellence où le rédacteur peut prendre un peu de distance qui manque tant à
ses confrères qui couvrent l’actualité ».
En ce qui a trait au ton employé, Mme St-Pierre précise que
M. Beaudoin a emprunté un ton humoristique: « Dans le texte « Bonjour
Popo! », monsieur Beaudoin badine et évoque avec humour et mordant,
quelques traits des candidats du comté de Laviolette ».
Au total, Mme Christiane St-Pierre appuie pleinement le
travail du journaliste Jean-Marc Beaudoin et souligne que ce dernier est un «
chroniqueur respecté et rigoureux » possédant des qualités indéniables de
rédacteur.
Réplique du plaignant
Le plaignant ne présente pas de réplique.
Analyse
Le Conseil de presse a voulu établir si le mis-en-cause avait outrepassé les limites déontologiques de sa profession, dans le cadre de son travail de chroniqueur.
Le Conseil rappelle que la chronique est un genre journalistique qui laisse à son auteur une grande latitude dans l’expression de ses points de vue et de ses jugements, en autant qu’il n’y ait pas dénaturation des faits. La chronique permet aux journalistes qui la pratiquent d’adopter un ton polémiste pour prendre parti et exprimer leurs critiques, ce qu’ils peuvent faire dans le style qui leur est propre, même par le biais de l’humour ou de la satire.
Dans le cas précité, le plaignant reprochait au journaliste Jean-Marc Beaudoin d’avoir attenté à la réputation du candidat péquiste de la circonscription de Laviolette, M. Yves Demers, en publiant dans une chronique des informations qu’il jugeait non pertinentes et inopportunes pour l’argumentation du sujet traité. Le plaignant déplorait également un parti pris de la part du journaliste Jean-Marc Beaudoin, en faveur de la candidate libérale Mme Julie Boulet.
Au regard des principes déontologiques que promeut le Conseil de presse, le journaliste Jean-Marc Beaudoin pouvait bien exprimer son opinion sur les différents candidats en présence, quitte à évoquer sur un ton badin, des éléments qui ne touchaient pas leur programme politique.
Le principe de la latitude du chroniqueur lui permettait donc d’évoquer avec humour la couleur des affiches des candidats, voire de faire allusion aux dépenses électorales de ces derniers.
En regard de ce qui précède, le Conseil de presse rejette la plainte contre Jean-Marc Beaudoin et Le Nouvelliste.
Analyse de la décision
- C17A Diffamation
- C17D Discréditer/ridiculiser