Plaignant
Linda
et Richard Germain
Mis en cause
Joël
Goulet, journaliste, et Télévision Quatre
Saisons (Bernard Guérin, directeur général, affaires juridiques)
Résumé de la plainte
Linda Germain porte plainte contre
Télévision Quatre Saisons pour la diffusion d’un reportage diffusé
le 17 avril 2001 au sujet de l’accusation de meurtre portée contre son fils,
Richard Germain.
Elle considère que ce reportage violerait
la présomption d’innocence de son fils et qu’il ne respecterait pas
l’ordonnance de non-publication émise par le juge, notamment en ce qui concerne
le rapport médico-légal au sujet de la victime.
Griefs du plaignant
La plaignante estime que le reportage porte
atteinte au droit de son fils à un procès juste et équitable.
Elle explique que lors du début de
l’enquête préliminaire de Richard Germain, le 17 avril 2001 au Palais de
justice de Laval, le pathologiste a présenté son rapport d’autopsie de la
victime comme élément de preuve devant le juge Jean R. Beaulieu.
La journée même, au réseau
TQS, le journaliste Joël Goulet aurait
diffusé une partie de ce rapport d’autopsie. Elle considère que le journaliste
n’a pas respecté l’ordonnance de non-publication émise par le juge.
Elle ajoute que le réseau
TQS insinue dans ce reportage que
Richard Germain est coupable de meurtre au premier degré et ceci, avant même le
déroulement de son procès devant juge et jurés.
Commentaires du mis en cause
Bernard Guérin explique que le
journaliste aurait obtenu le rapport médico-légal, auquel il réfère dans son
reportage, auprès d’une source indépendante dans les jours précédents
l’audition et il ne constituerait donc pas un élément de preuve, au sens d’une
preuve ayant été déposée devant le tribunal. La diffusion de ce rapport ne
serait donc pas interdite en vertu de l’ordonnance de non-publication.
Il ajoute que la plaignante n’a fourni
aucune preuve quant au contenu et à la portée de l’ordonnance de
non-publication et cela ne permettrait donc pas à
TQS de répondre aux allégations.
Par ailleurs, Bernard Guérin ajoute que le
journaliste n’aurait appris l’existence de l’ordonnance de non-publication
qu’après avoir fait son reportage.
Réplique du plaignant
La plaignante estime que le fait de « ne
pas avoir eu connaissance de l’ordonnance de non- publication»ne
constitue pas une défense. Elle explique qu’il fait partie du travail de
journaliste d’avoir pris connaissance de tous les faits avant de présenter un
reportage.
Elle ajoute que même si le rapport médico-légal
auquel se réfère le journaliste avait été obtenu d’une source indépendante dans
les jours précédents l’audition, il n’aurait pas été inclus, par hasard, dans
le reportage sur l’enquête préliminaire.
En ce qui concerne la preuve du contenu et de
la portée de l’ordonnance de non-publication, la plaignante indique qu’elle est
disponible au Palais de Justice de Laval.
Analyse
Le Conseil de presse rappelle que le droit à un procès juste et impartial est un principe fondamental de justice; et la presse, en assurant le droit à l’information sur les aspects d’intérêt public qu’offre l’actualité judiciaire, doit le respecter d’une façon scrupuleuse. Une personne est présumée innocente tant que sa culpabilité n’a pas été reconnue par un tribunal compétent.
Le reportage du journaliste s’est effectué au début de l’enquête préliminaire de Richard Germain, c’est-à-dire le 17 avril 2001. Le procès devait avoir lieu, selon la plaignante, en mai ou septembre 2002. Son fils devait donc bénéficier du principe de présomption d’innocence. Or, le journaliste affirmait dans son reportage que «Richard Germain ne s’est pas contenté de l’assassiner […] il s’est acharné sur elle.» Le journaliste a donc bien contrevenu au principe de présomption d’innocence, dont Richard Germain devait bénéficier. En agissant ainsi, le mis-en-cause s’est exposé à faire prématurément du jeune homme, un coupable aux yeux de l’opinion publique.
Concernant le grief du non respect de l’ordonnance émise par le juge Jean R. Beaulieu, le Conseil de presse précise qu’il ne lui appartient pas de statuer sur la question du respect ou du non-respect d’une interdiction de publication. C’est aux tribunaux qu’il revient de déterminer s’il y a eu ou non violation de l’interdit de publication des informations divulguées lors d’une enquête préliminaire.
Au regard de ce qui précède, le Conseil retient la plainte et blâme le journaliste Joël Goulet et Télévision Quatre Saisons pour avoir violé le principe fondamental de la présomption d’innocence.
Analyse de la décision
- C17H Procès par les médias
- C23M Violation d’un interdit de publication