Plaignant
Eric
Poirier
Mis en cause
Le Journal de Montréal
(Bernard Brisset, rédacteur en
chef)
Résumé de la plainte
M. Eric Poirier porte plainte contre le
quotidien Le Journal de Montréal concernant
la publication de deux sujets le 20 août 2002. Le plaignant estime que la
publication simultanée d’un des sujets, un reportage sur le tourisme sexuel à
Montréal, ne respecte pas la portée dramatique de l’autre: l’assassinat
d’une mère de famille.
Griefs du plaignant
Dans un premier temps, le plaignant précise
le but de sa plainte: prévenir de tels incidents et mieux éduquer le
public.
M. Poirier relate ensuite le contenu des
articles et émet son opinion quant à la valeur d’une vie humaine et considère
que la femme ne doit pas être traitée comme un objet sexuel. Il
prend parti pour que la société dénonce
cette ligne de pensée et punisse sévèrement tout acte portant atteinte à la vie
humaine.
Le plaignant dénonce l’importance du
traitement du phénomène social qu’est l’industrie du sexe combinée à une
analyse financière de cette réalité. Selon lui,
Le Journal de Montréal a fait preuve d’indécence puisque cette
analyse ne respecte pas le drame humain rapporté dans la même édition.
Le plaignant considère que
Le Journal
de Montréal a manqué de jugement et que le rédacteur en chef aurait dû
décider de retarder la parution du reportage. Pour cette raison, le plaignant
demande que le rédacteur en chef publie une réponse pour réparer son geste
qu’il qualifie de «maladroit».
Commentaires du mis en cause
M. Bernard Brisset amorce sa réponse en
indiquant que les deux sujets publiés simultanément sont deux sujets bien
distincts.
Le rédacteur en chef affirme qu’il est
erroné de lier les deux reportages. «L’un est un phénomène social et
humain analysé quant à sa réalité quotidienne tandis que l’autre est un drame
terrible ». Le fait divers ne peut être rattaché au phénomène du tourisme
sexuel. M. Brisset énonce ensuite une série d’exemples de sujets qui ne
pourraient être publiés parce qu’ayant un lien avec d’autres sujets: «
C’est comme si on devait éviter de faire un reportage sur les armes parce qu’un
vol à main armée a eu lieu».
Pour le rédacteur en chef, les deux
reportages ont été effectués selon les «règles de l’art» et ajoute
que le fait qu’ils soient tous les deux coiffés d’un titre de première page ne
signifie pas qu’il y ait un lien entre eux.
Le rédacteur en chef termine en demandant
au Conseil de presse de ne pas retenir la plainte de M. Poirier.
Réplique du plaignant
Aucune réplique du plaignant.
Analyse
Le rôle du Conseil de presse du Québec est non seulement de promouvoir le droit du public à l’information et l’accès des citoyens aux médias, mais également de veiller à la liberté de la presse.
Le Conseil de presse rappelle que les médias et les professionnels de l’information doivent être libres de relater les événements et de les commenter sans entrave ni menace ou représailles. L’attention qu’ils décident de porter à un sujet particulier relève de leur jugement rédactionnel. Le choix de ce sujet et sa pertinence, de même que la façon de le traiter, leur appartiennent en propre. Nul ne peut dicter à la presse le contenu de l’information sans s’exposer à faire de la censure ou à orienter l’information.
Or, le reproche invoqué par le plaignant dans le présent cas vise un manque de jugement et de respect ainsi qu’un angle de traitement du sujet jugé indécent. De l’analyse de la plainte, il appert que les deux sujets traités sont distincts et que les attentes exprimées par le plaignant concernant la première page du journal, la simultanéité de la publication et le traitement de l’information traduisent une méconnaissance du rôle de la presse.
Il appartient aux journalistes de sélectionner et de traiter professionnellement les informations qu’ils considèrent comme pertinentes. Nul ne peut dicter aux journalistes le traitement de l’information et encore moins le moment de sa publication.
Après étude des documents soumis par M. Poirier, le Conseil de presse n’a pas constaté de manquements aux chapitres du choix de contenu et de la discrétion rédactionnelle.
Pour ces raisons, le Conseil rejette la plainte contre le Journal de Montréal ainsi que la demande faite par le plaignant d’une réponse publique du rédacteur en chef du journal pour réparer un geste prétendument maladroit.
Analyse de la décision
- C02B Moment de publication/diffusion
- C03A Angle de traitement
- C03C Sélection des faits rapportés