Plaignant
Mouvement
souverainiste du Québec (M. Gilles Rhéaume)
Mis en cause
Tribune Juive
(Mme Gila B. Sroka, directrice)
Résumé de la plainte
M. Gilles Rhéaume porte
plainte contre un éditorial signé Ghila Sroka et paru dans le numéro de
novembre 2002 de la revue Tribune juive.
Selon le plaignant, dans ce texte largement diffusé par les médias,
l’auteure estime, entre autres, que Montréal est une « ville fasciste et
totalitaire ».
Griefs du plaignant
Le plaignant, M. Gilles Rhéaume,
porte plainte contre un éditorial de la journaliste Ghila Sroka publié dans
l’édition de novembre 2002 de la revue bimestrielle Tribune
juive. Le plaignant reproche à
Mme Sroka d’y avoir affirmé, notamment, que Montréal
est une « ville fasciste et totalitaire ». Pour lui, de tels propos sont non
seulement contraires à la vérité mais ils constituent une atteinte grave à la
réputation de la première ville du Québec, à ses dirigeants, à ses
représentants politiques et à ses habitants. De plus, l
a journaliste en a remis, lors de commentaires
parus dans le quotidien LaPresse du 1er février 2003,
en affirmant qu’il y a au Québec « un antisémitisme inconscient ».
Le plaignant explique son
intervention par son désir que de telles allégations ne soient plus répandues
comme autant de vérités. Un texte éditorial comporte aussi, selon lui, des
limites à ne pas franchir. Dans le présent cas, l’auteure a outrepassé non
seulement ses compétences mais elle a, de surcroît, injurié injustement et sans
fondement toute la communauté métropolitaine. Selon M.Rhéaume, ce n’est
pas la première fois que le Québec est ainsi pris à partie. Un certain
esprit règne dans certaines officines qui se croient tout permis, drapées
qu’elles sont dans le voile d’une soi-disant liberté de presse. Cette liberté
de presse que les Québécois chérissent est tout autre chose que le droit au
mensonge, aux attaques malicieuses et à la désinformation.
Le plaignant termine en
réaffirmant son accord avec la liberté de l’information et à la plus large
diffusion des idées, et en même temps son désaccord « avec la dérive et les
bavures du genre que vient de nous servir la Tribune juive ».
Commentaires du mis en cause
Les mis-en-cause ont fait part qu’ils
n’entendaient pas faire de commentaires.
Réplique du plaignant
Aucune réplique.
Analyse
Dans une décision rendue en 1996, le Conseil de presse reconnaissait au magazine Tribune juive « une vocation distincte de celle d’un journal d’information conventionnel» ce qui en faisait « un journal engagé, qui publie une information orientée par la thèse qu’il entend défendre ».
À ce moment, le Conseil se disait conscient que certains critères éthiques qu’il utilise communément dans le cadre de l’analyse du journalisme conventionnel ne s’appliquent plus et que le lecteur, connaissant la particularité du contrat qui le lie implicitement au journalisme de ce type de publication sait qu’il ne doit pas en attendre une information objective et équilibrée.
Cette prise de position de la part du Conseil de presse du Québec accordait, en pratique, au magazine Tribune juive et à ses journalistes une latitude de large envergure.
Par ailleurs, dans une décision rendue en avril 2000 dans un cas analogue, la Commission d’appel du Conseil de presse précisait également que même si une journaliste peut, dans certaines conditions, porter des jugements en toute liberté, elle n’a cependant pas le pouvoir d’ignorer ou d’altérer les faits pour justifier l’interprétation qu’elle en tire. Cette décision venait en quelque sorte baliser la première en confirmant à nouveau le principe que la liberté rédactionnelle reconnue aux médias et aux journalistes n’est pas absolue.
Après examen de l’ensemble du dossier le Conseil de presse en arrive aux conclusions suivantes.
Il est d’abord admis que la journaliste disposait d’une fort grande liberté pour exprimer ses opinions, même dans une approche qui risquait de déplaire à un grand nombre de ses lecteurs.
Cependant, en vertu des principes évoqués plus haut, Mme Sroka ne pouvait pas travestir les faits ou leur donner une signification qu’ils n’ont pas.
Or, l’examen du dossier révèle qu’à partir de certains faits observés et en s’appuyant sur des exemples, la journaliste a utilisé à plusieurs reprises un processus de généralisation équivalant à une argumentation fallacieuse.
Ce faisant, elle a dépeint un portrait profondément inexact de la situation montréalaise et québécoise et elle a tiré de ses observations des conclusions qui ne correspondent pas à la réalité quotidienne.
L’examen du Conseil de presse a notamment permis de relever à plusieurs occasions des affirmations inexactes et grossières, sinon insultantes pour les citoyens montréalais et pour tous les Québécois, dont celle voulant que Montréal soit une ville « fasciste et totalitaire ». Dans un autre cas, relatif cette fois-ci à un média, la journaliste ne s’est même pas donné la peine d’exposer les faits avant de rendre un jugement définitif.
De plus, les titres et l’illustration photographique accompagnant l’éditorial de Mme Sroka étaient non seulement hors contexte mais contribuaient à donner à l’ensemble un sens déformant et erroné de la réalité concrète vécue à Montréal par les différentes communautés qui l’habitent.
Décision
À la lumière de ces observations, le Conseil de presse déplore ces manquements aux règles déontologiques de la profession de la part de l’éditorialiste dans son traitement de l’information et adresse un blâme à la journaliste Ghila Sroka et le magazine La Tribune Juive qu’elle dirige.
Analyse de la décision
- C11B Information inexacte
- C12B Information incomplète
- C13B Manipulation de l’information
- C14A Sensationnalisme/exagération/insistance indue
- C17D Discréditer/ridiculiser
- C17F Rapprochement tendancieux
- C17G Atteinte à l’image