Plaignant
M. François Perrier
Mis en cause
M. Jean Vigneault, rédacteur en chef , M.
Benoît Chartier, éditeur, et l’hebdomadaire Le
Courrier de Saint-Hyacinthe
Résumé de la plainte
M. Perrier porte plainte contre
Le Courrier de Saint-Hyacinthe à propos
de trois chroniques «anonymes » publiées les 5 mars, 9 avril et 16 avril
2003.
Il estime que le journal a porté atteinte à
sa réputation, lui a manqué de respect et a faussé la réalité des propos qu’il
a tenus lors de différentes assemblées du conseil municipal de Saint-Hyacinthe.
Griefs du plaignant
M. François Perrier présente sa plainte en
trois temps, en fonction de chacune des chroniques mises en cause. Incidemment,
il relève, pour l’ensemble de ces textes,l’anonymat de l’auteur.
En ce qui concerne la chronique
«Rumeurs et indiscrétions» publiée le 5 mars 2003, le plaignant
accuse le journal d’avoir atteint à sa réputation, d’avoir essayé de le
ridiculiser suite à sa présence et à ses propos lors de l’assemblée du conseil
municipal du 3 mars 2003. En outre, il reproche au journal d’avoir «caché
l’information aux lecteurs» en ne mentionnant pas les questions qu’il
avait soulevées au conseil municipal sur la future salle de spectacle.
Ensuite, il met en cause la chronique
«Rumeurs et indiscrétions» du 9 avril 2003 pour «avoir manqué
de respect et d’éthique envers un contribuable, qui se présente au conseil
municipal, en le traitant de Tata». Le plaignant estime que le journal a
«faussé la réalité » en prétendant qu’il «improvisait [ses]
questions ». Il assure, au contraire, avoir lu minutieusement chaque question
qu’il avait préalablement préparée par écrit.
Sa plainte porte, enfin, sur l’«
ex-chroniqueanonyme créée dans l’édition du 16 avril 2003, »les
brèves du conseil »». Le journal n’aurait pas, selon le plaignant,
respecté les faits, tels qu’ils se sont réellement produits lors de l’assemblée
du conseil municipal du 7 avril 2003. Il aurait, en effet, prêté des propos au
conseiller Ray Marc Dumoulin que ce dernier n’aurait pas eus. M. Perrier
prétend que le conseiller n’a pas parlé de Charles Dutoit, ni d’autres choses
d’ailleurs, puisque le maire Bernier a coupé la parole au plaignant pour parler
de l’Orchestre symphonique.
Le plaignant invite le Conseil de presse à
visionner la séance du conseil municipal diffusé par Cogéco Câble, pour pouvoir
constater que «l’article de journal sert seulement à [le]
discréditer», au profit du conseiller. Il considère que l’«on
a arrangé la vérité de façon partisane pour mieux faire paraître le conseiller
Dumoulin».
Il précise, ensuite, qu’avant de porter
plainte, il avait essayé d’avoir la tribune du journal pour se défendre des
«jugements et accusations» portés à son égard et pour mieux
informer les citoyens sur le projet de la salle de spectacle et ses lacunes. Il
a, d’ailleurs, joint à sa plainte une copie de sa lettre.
Sans nouvelles, le plaignant aurait
contacté le rédacteur en chef, M. Jean Vigneault, qui lui «indiqua que
[sa] lettre n’avait pas de bon sens». Et lorsqu’il lui demanda de publier
une lettre d’excuses publiques à la place, il prétend que M. Vigneault l’aurait
«envoyé paître».
En «nota bene», il déclare
vouloir dénoncer qu’à Saint-Hyacinthe, les habitants font face à un monopole de
l’information locale. «M. Vigneault, étant éditorialiste du journal
Le Courrier de Saint-Hyacinthe et de la
radio 106.5 FM, contrôle, modère et filtre, de façon partisane, l’information
locale, ce qui a comme inconvénients, d’avoir l’opinion d’une seule personne et
de priver les Maskoutains d’informations et de débats d’idées»,
affirme-t-il.
Commentaires du mis en cause
M. Jean Vigneault ne souhaite pas répondre
point par point aux arguments de M. Perrier. Tout d’abord, il dit que la lettre
que le plaignant voulait faire publier dans le courrier des lecteurs était
d’une longueur démesurée et qu’elle devait être réduite pour paraître.
Il affirme, par ailleurs, que le journal a
écrit qu’un citoyen avait agi en tata, pas qu’il était tata. En ce sens, le mot
serait caricatural. Et d’ajouter qu’«il faut voir ce monsieur dans
une assemblée publique du conseil pour comprendre que le respect, la logique et
la clarté ne font pas partie de son arsenal de persuasion».
Il déclare qu’il y a une différence entre
être menteur et conter un mensonge, entre être paresseux et avoir un moment de
paresse et que l’expression «agissait en tata» allait en ce sens.
M.Vigneault affirme que «ce soir-là, au micro, la personne non
identifiée dans toute cette édition du journal, s’est effectivement conduite
en…».
Alors que le plaignant remet en cause la
qualité de couverture du journal sur toute la question de la salle de
spectacle, M. Vigneault atteste que les
opposants au projet du conseil municipal ont eu maintes occasions de faire
valoir leur opinion, mais que M. Perrier n’a commencé à intervenir qu’une fois
la décision connue, l’architecte embauché et les dates retenues. « Ça en dit
long sur la qualité et l’à-propos de ses interventions», ajoute-t-il.
Réplique du plaignant
Aucune réplique du plaignant.
Analyse
La chronique, le billet et la critique sont des genres journalistiques qui laissent à leurs auteurs une grande latitude dans le traitement d’un sujet d’information. Ils permettent aux journalistes qui le pratiquent d’adopter un ton polémiste pour prendre parti et exprimer leurs critiques, dans le style qui leur est propre, même par le biais de l’humour et de la satire.
En premier lieu, le plaignant estime que le journal lui a manqué de respect dans les trois chroniques. Sur ce point, le Conseil considère que la latitude accordée aux auteurs de ce genre journalistique permettait au chroniqueur de se montrer sarcastique, d’autant que, pour deux des textes mis en cause, l’anonymat de la personne visée par la critique a été préservé. Le manquement au respect de la réputation n’a, de ce fait, plus lieu d’être.
M. Perrier reproche également au journaliste de ne pas avoir rapporté aux lecteurs les questions qu’il avait soulevées au conseil municipal à propos de la future salle de spectacle. Or, il est nécessaire, ici, de rappeler que le choix de traitement d’un sujet relève de la seule compétence du journal, et qu’en ce sens, le chroniqueur avait le droit de ne pas faire état des propos du plaignant. En outre, si, comme l’atteste le mis-en-cause, M. Perrier n’a fait valoir son point de vue qu’une fois la décision prise, le débat étant clos, publier le contenu des interventions du plaignant avait alors perdu de son actualité.
Par ailleurs, M. Perrier reproche au chroniqueur d’avoir «faussé la réalité» en prétendant qu’il improvisait ses questions. Après analyse, le Conseil estime qu’il s’agissait, plus d’un jugement critique à l’égard de l’intervention du plaignant, que d’une affirmation selon laquelle le plaignant improvisait. Quant aux autres inexactitudes que le plaignant a relevées, le Conseil regrette qu’il n’en ait pas fait la démonstration.
En revanche, le Conseil de presse tient à émettre une réserve sur le genre journalistique de « Rumeurs et indiscrétions », qui entretient, à ses yeux, une certaine confusion. Le Courrier de Saint-Hyacinthe trouverait sans doute avantage à opter plutôt pour le billet ou la chronique personnalisée.
Enfin, le plaignant mentionne avoir envoyé une lettre au journal à des fins de publication et se serait fait repousser sans ménagement. Le Conseil estime que le journal pouvait refuser de publier la lettre, car le public n’a pas accès de plein droit aux pages d’un journal. Toutefois, il rappelle qu’il relève de la responsabilité des médias d’être courtois et ouverts envers leurs usagers.
Décision
Au-delà des réserves exprimées, le Conseil rejette sur le fond la plainte à l’encontre du journal Le Courrier de Saint-Hyacinthe et de son rédacteur en chef, Jean Vigneault.
Analyse de la décision
- C03C Sélection des faits rapportés
- C11B Information inexacte
- C17D Discréditer/ridiculiser