Plaignant
Mme Marie-Claire Piché
Mis en cause
Mme Denyse Roberge, éditrice et
l’hebdomadaire le Courrier de Malartic
Résumé de la plainte
Mme Marie-Claire Piché porte plainte contre
l’hebdomadaire le Courrier de Malartic
pour dénoncer ce qui constitue, selon elle, un conflit d’intérêts. Elle affirme
que les citoyens de la ville de Malartic, en pleine période d’élections
municipales, ont reçu dans le publi-sac de circulaires du samedi 1er
novembre, la reproduction intégrale des pages couvertures de l’édition du 28
octobre 2003 du Courrier de Malartic,
avec, plié à l’intérieur, un «feuillet de propagande» pour l’une
des deux équipes en concurrence électorale.
Griefs du plaignant
Tout d’abord, Mme Piché situe le
contexte: la ville de Malartic venait de vivre des élections municipales.
Elle ajoute que les deux partis politiques en présence avaient largement
utilisé l’hebdomadaire local, le Courrier
de Malartic, pour publiciser leurs programmes.
La plaignante estime que «là où le
bât blesse, c’est que les citoyens ont reçu, dans le publi-sac de circulaires
du samedi 1er novembre, une publicité plutôt
« spéciale »»: la reproduction intégrale des pages
couverture de l’édition du 28 octobre 2003 du
Courrier de Malartic, accompagnée d’un «feuillet (plié à
l’intérieur) de propagande» en faveur de l’une des équipes. Et de
remarquer que les pages couverture avaient été réservées exclusivement à cette
équipe.
Conséquemment, elle estime que le conflit
d’intérêts est évident.
Elle dit joindre à sa plainte l’édition
complète du journal, la reproduction des pages couverture et le feuillet
l’accompagnant.
Commentaires du mis en cause
Mme Denyse Roberge prétend que (vers) le 14
mai,l’équipe Desjardins a réservé d’avance, à des fins publicitaires, les
espaces disponibles aux pages 1 et 2, ainsi que les deux dernières pages de
l’édition du 28 octobre 2003 du Courrier
de Malartic, en prévision des élections municipales du 2 novembre 2003.
Elle joint à ses commentaires les factures de vente de publicités.
Elle affirme que la semaine précédant
l’édition du 28 octobre, l’équipe Desjardins lui a commandé 1 700 copies de
leurs publicités à paraître dans l’édition du 28 octobre. Elle précise que le
tout a été vendu en surnuméraire du tirage régulier pour une économie à 100 $
pour mille exemplaires (facture jointe).
Selon Mme Roberge, ces publicités (pages
1-2-15-16), toutes retenues et payées par l’équipe Desjardins, de même que le
feuillet partisan dont il est fait mention dans la plainte de Mme Piché, ont été
placés par l’équipe Desjardins dans la publi-sac du samedi 1er
novembre 2003. Mme Roberge atteste que l’édition du 28 octobre 2003 ne
contenait aucun feuillet politique ni autre encart partisan. Elle assure aussi
que le Courrier de Malartic n’a pas
été consulté ni n’a autorisé l’insertion dudit feuillet dans cette publicité.
De toute façon, elle considère que cette publicité ne peut être confondue avec
l’édition du 28 octobre, dans la mesure où il y manque toutes les pages
intérieures (soit un total de 12 pages que la mise-en-cause a aussi joint à ses
commentaires).
Mme Roberge certifie que, durant toute la
campagne électorale, son journal est «demeuré neutre et impartial en
offrant une couverture équitable de tous les partis politiques en cause:
présentation des équipes, entrevues avec les candidats à la mairie,
présentation de tous les candidats avec leur photo». Elle invite le
Conseil à consulter les autres éditions du journal.
Ainsi, le
Courrier de Malartic ne croit pas s’être placé en situation de conflit
d’intérêts, et de souligner enfin que Mme Piché serait partisane de l’équipe
Carpentier, celle qui a remporté la victoire.
Réplique du plaignant
La plaignante considère que Mme Roberge n’a
pas répondu à son interrogation principale, à savoir: «Pourquoi
a-t-elle associé le logo de son journal à une publicité, de surcroît
politique?»
Selon elle, la mise-en-cause prétend que la
publicité a bel et bien été payée, tout en certifiant qu’elle n’a exercé aucun
contrôle sur la diffusion des dites copies. La plaignante considère qu’avoir
vendu des tirés à part de son journal eut été acceptable si la mise-en-cause
eut pris soin d’y retirer son logo. En ce sens, elle estime qu’il y a eu un
regrettable manquement à l’éthique.
Elle dit ensuite n’avoir jamais allégué que
Mme Roberge ait offert une couverture inéquitable aux équipes en présence dans
cette campagne «en ce qui concerne les articles consentis aux deux
groupes», précise-t-elle, ni même que cette publicité fut confondue avec
l’édition intégrale du journal du 28 octobre. Elle ne comprend donc pas le but
de l’argumentation de MmeRoberge, qu’elle considère sans rapport avec sa
plainte.
Enfin, elle estime que la mise-en-cause se
permet d’insulter son intelligence, «en tentant, sans la moindre
subtilité de ramener [sa] plainte à un règlement de compte politicard».
Elle entend à ce que les citoyens de Malartic soient traités avec respect par
les médias locaux, au même titre que les autres Québécois.
COMMENTAIRES À LA RÉPLIQUE
Mme Roberge précise dans une brève missive
que le journal ne voit aucun élément nouveau susceptible de justifier une
intervention écrite additionnelle.
Analyse
Il relève de la prérogative de l’éditeur d’établir la politique d’un organe d’information en matière de publicité. Toutefois, les médias doivent établir une distinction nette entre l’information et la publicité sur tous les plans: contenu, présentation, illustration. Tout manquement à cet égard est porteur de confusion auprès du public quant à la nature de l’information qu’il croit recevoir.
Dans le cas présent, Mme Piché porte plainte contre le Courrier de Malartic qu’elle estime en conflit d’intérêts. Selon elle, le journal a associé son nom à une publicité à caractère politique, mettant en avant une des deux équipes en concurrence aux élections municipales. Pour sa défense, Mme Roberge, la propriétaire du journal, atteste, à l’appui de factures, que l’équipe en question lui a acheté 1 700 copies des pages de son journal où apparaissaient leurs publicités.
Après analyse, le Conseil de presse en est arrivé aux conclusions suivantes:
–
il reconnaît tout d’abord le plein droit de l’éditrice de vendre de l’espace publicitaire dans les pages de son journal à quelque parti politique municipal que ce soit;
–
en revanche, le procédé qui consiste à associer le logo du journal à une publicité partisane lui apparaît plus que discutable, en raison de la confusion que cela risque de provoquer à propos des réelles intentions du journal.
Décision
Aussi, compte tenu de ces considérations, le Conseil retient-il la plainte à l’encontre du Courrier de Malartic.
Analyse de la décision
- C10A Choix de la publicité
- C10B Composante publicitaire d’un journal
- C21G Indépendance des services d’information et de publicité
- C22B Engagement politique
- C22H Détourner la presse de ses fins