Plaignant
Conseil pour la Condition Masculine
– Canada (William Levy, Comité d’éthique)
Mis en cause
M. Jack Todd, journaliste, M. Peter Stockland, rédacteur en
chef ,M. Raymond Brassard, rédacteur en chef exécutif et le quotidien,
The Gazette
Résumé de la plainte
À la suite d’un article dont il conteste le bien-fondé, M.
William Levy, membre du comité d’éthique du Conseil pour la Condition Masculine
– Canada, a adressé une lettre au quotidien The
Gazette. Le chroniqueur Jack Todd, auteur de l’article lui a répondu par
les mots «
you, sir, are a sexist pig ».
Insatisfait des excuses reçues ultérieurement du journaliste et de la direction
du média, M. William Levy porte plainte au Conseil de presse du Québec.
Griefs du plaignant
M. Levy porte plainte contre le quotidien montréalais
The Gazette, son rédacteur en chef Peter
Stockland et le chroniqueur (columnist)
Jack Todd. Il précise d’entrée de jeu que sa plainte est déposée en langue
anglaise pour conserver l’unité avec son autre plainte à la Commission
canadienne des droits de la personne.
Pour motiver sa plainte, le plaignant explique qu’un membre
de son conseil d’administration s’est fait traiter de «
Sexist Pig ». Cette expression a par la suite a été modifiée pour «
Sexist Woman Hater (Misogynist) »,
dans le document d’excuses que le plaignant a reçu des mis-en-cause.
Le plaignant fonde sa plainte en citant un extrait du
chapitre des Droits et responsabilités de la presse du Conseil de presse
du Québec relatif à « l’attitude de la presse à l’égard des personnes et des
groupes», plus précisément les paragraphes relatifs à la discrimination,
à la vie privée et aux drames humains de même qu’au libelle et à la
diffamation. Selon M. Levy, cette plainte comprendrait des manquements à
l’éthique en matière de respect de la réputation, de respect des groupes
sociaux, de rectification de l’information et d’impartialité de l’information.
M. Levy termine en ajoutant qu’il ne faut pas un long examen
pour s’apercevoir que le quotidien The
Gazette est devenu un journal présentant les visions les plus négatives
possibles sur les hommes, sans égard aux règles de l’équilibre journalistique.
À sa plainte, sont annexés plusieurs documents:
– copie de sa plainte à la
Commission des droits de la personne;
– copie de sa lettre à l’éditeur
de The Gazette;
– copie du courriel contesté de
Jack Todd;
– copie de sa réponse par
courriel à Jack Todd;
– copie du courriel d’excuses de
Jack Todd;
– courriel de Peter Stockland au
sujet de l’insatisfaction de M. Levy;
– courriel réponse de M. Levy à
Peter Stockland (plaintes formelles au CPQ et à la CCDP);
– réponse de Peter Stockland à M.
Levy à la suite de ses plaintes;
– réponse de M. Levy à Peter
Stockland demandant rétractation;
– invitation de M. Levy à Peter
Stockland, à faire un débat public sur la question;
– copie de l’article de Jack Todd à l’origine des
différends.
Commentaires du mis en cause
Commentaires du rédacteur en chef exécutif, Raymond Brassard:
M.Brassard répond que quoique non approprié, le commentaire
de M. Todd a été fait lors d’une conversation privée avec le plaignant.
Il ajoute que les remarques de M. Levy à l’égard de M. Todd
étaient également non appropriées, tel qu’on peut le constater dans son
courriel du 8 décembre 2003.
Cependant, le 11 décembre, M. Todd lui a présenté des
excuses pour sa remarque non appropriée. Le lendemain, M. Stockland a assuré M.
Levy que toute discussion ultérieure se déroulerait avec respect.
Le rédacteur en chef exécutif indique que
The Gazette tient à ce que « toute
communication avec ses lecteurs soit civile et respectueuse, même si cette
communication est tout à fait privée. » Il ajoute qu’étant du même avis, M.
Todd s’est excusé aussitôt, malgré sa position ferme quant à la crédibilité du
Conseil pour la Condition Masculine – Canada. Son journal regrette donc que les
convictions de M. Levy l’empêchent d’accepter ses excuses.
Réplique du plaignant
Le plaignant dit s’inquiéter à
l’idée que le quotidien The Gazette,
son rédacteur en chef et M.Todd pensent que le Conseil pour la Condition
Masculine et le Conseil de presse du Québec sont composés de personnes qui ne
comprennent pas l’anglais. Ainsi, les mis-en-cause estimeraient que le Conseil
de presse n’a personne d’assez compétent en anglais pour comprendre les
insultes de M.Todd déguisées en excuses (
newly disguised as an apology) et qu’ils penseraient que ces
excuses vont abuser non seulement le Conseil de presse du Québec mais également
le plaignant, M. Levy.
Ces excuses simulées, qui
incidemment sont de nature publique, selon lui, ne s’adresseraient pas au
plaignant mais plutôt aux « Pigs ».
Pour le plaignant, il s’agit d’une sorte de dissertation où M.Todd expose
comment il a été élevé avec les porcs et son profond respect pour ces animaux.
En suggérant que les porcs sont de nobles créatures, M.Todd laisse
entendre que M.Levy appartient à une forme de vie inférieure. M. Todd
affirme donc qu’au lieu d’être traité de porc, le plaignant devrait plutôt être
traité de «misogyne sexiste (sexist
Mysogynist i.e. woman hater) ».
Selon M. Levy, leur réponse
démontre comment The Gazette et M.
Todd ne craignent pas une réprimande du Conseil de presse, sans égard aux
circonstances. De plus, ils n’ont, selon lui, aucun respect pour le Conseil et
pour les Québécois.
Le plaignant explique que
l’incapacité de M. Todd à accepter les faits à l’encontre de ses perceptions
mythiques indéfendables sur la violence ne l’autorise pas à insulter et à
diminuer ceux qui, au moyen d’une lettre à l’éditeur, expriment une opinion reposant
sur la vérité.
Le pire, c’est qu’il a commis ces
gestes à partir de sa fonction dans un quotidien québécois.
M. William Levy termine en
réaffirmant qu’une lettre à l’éditeur n’est pas une correspondance privée et
qu’il n’accepte pas les excuses de M. Todd et du quotidien
The Gazette.
Analyse
Le droit de réponse des journalistes aux commentaires des lecteurs, auditeurs ou téléspectateurs est une pratique reconnue dans la presse. Ce droit de réponse doit cependant être exercé avec discernement et dans le plein respect des personnes. Les journalistes doivent agir promptement pour que leurs commentaires soient efficaces. Ils ne doivent pas se prévaloir de ce droit pour dénigrer, insulter ou discréditer les lecteurs, auditeurs ou téléspectateurs.
En vertu de ces principes inscrits en toutes lettres dans le guide déontologique du Conseil de presse du Québec, le journaliste Jack Todd avait le droit de donner la réplique à son interlocuteur M. Levy, à la condition de le faire dans le respect.
Or le journaliste M. Todd a réagi en qualifiant le plaignant de «sexist pig», un qualificatif qui n’apparaît nullement conforme aux principes cités en préambule.
Il s’agit donc de propos que le Conseil ne peut que déplorer. Toutefois, une fois sa faute admise, le journaliste a présenté des excuses qui n’ont pas eu le bonheur de plaire au plaignant, ces excuses lui réservant notamment le qualificatif de « mysogyne ».
Cependant, l’examen par le Conseil de la correspondance de M. Levy avec le journaliste a permis de découvrir que le plaignant a utilisé dans sa première réaction à l’article décrié un vocabulaire équivalent à celui qu’il dénonce chez M.Todd.
Le plaignant n’a pas obtenu gain de cause et aurait sans doute désiré des excuses complètes plus satisfaisantes. Mais le Conseil a estimé que dans les circonstances, le journaliste et la direction du quotidien The Gazette avaient agi de façon à remédier à la situation.
Par ailleurs, le Conseil aimerait faire observer que même s’ils étaient provocateurs, les premiers propos de M. Todd n’étaient pas publics avant que M. Levy ne les révèle lui-même au grand jour en les communiquant à la Commission des droits de la personne et au Conseil de presse du Québec. Par conséquent, le Conseil ne peut imputer au plaignant un grief d’atteinte à la réputation pour ce motif.
Décision
Pour ces raisons, au-delà de la réserve déjà exprimée sur les propos initiaux du journaliste, et en considérant les circonstances de l’ensemble des faits exposés, le Conseil de presse du Québec rejette la plainte contre le journaliste Jack Todd et le quotidien The Gazette.
Analyse de la décision
- C05A Réplique abusive
- C09B Droit de réponse insatisfaisant
- C17C Injure
- C17D Discréditer/ridiculiser
- C17G Atteinte à l’image