Plaignant
Le Réseau québécois contre la francophobie au Canada et M.
Gilles Rhéaume
Mis en cause
M. Don Cherry, commentateur, M. Joel Darling,
réalisateur-coordonnateur, M. Harold Redekopp, vice-président principal et
Canadian Broadcasting Corporation – CBC
Television
Résumé de la plainte
Gilles Rhéaume, au nom du Réseau québécois contre la
francophobie au Canada, porte plainte contre Don Cherry pour avoir tenu des
propos inexacts et irrespectueux envers un groupe social pendant l’émission
«Hockey Night in Canada» sur les ondes de
CBC Television le 24 janvier 2004.
Griefs du plaignant
Don Cherry, commentateur dans la section «Coach’s
Corner» de l’émission «Hockey Night in Canada», aurait
affirmé avec mépris que seuls les Européens et les francophones portent la
visière pour se protéger contre les coups en laissant entendre qu’ils manquent
de courage. Selon le plaignant, la Société
Radio-Canada aurait diffusé des statistiques qui permettraient de constater
que les affirmations de M. Cherry sont fausses.
Le plaignant accuse M. Cherry et la
CBC de francophobie et de racisme. M. Cherry tiendrait de tels
propos depuis des années et bénéficierait de la protection de son employeur.
Commentaires du mis en cause
En réponse à la plainte, M. Harold Redekopp soutient que les
commentaires que Don Cherry a faits le 24 janvier 2004 sont inappropriés et
répréhensibles.
Il assure le Conseil que de tels propos ne peuvent être
excusés ni tolérés et précise que les commentaires de M. Cherry, ainsi que ceux
de tous ses commentateurs invités de la CBC, ne reflètent pas l’opinion
de la Société.
Selon M. Redekopp, M. Cherry a été engagé par
CBC à titre de commentateur à
«Coach’s Corner» pour son expertise et ses connaissances sur le
hockey, ce que ses admirateurs apprécieraient depuis des années.
L’émission «Coach’s Corner» serait un forum où
M. Cherry aborde des questions reliées au hockey, et où le sujet du port de la
visière est souvent abordé. Selon M. Redekopp, Don Cherry n’est pas d’accord
avec le port de la visière parce qu’il prétend que les joueurs seront
possiblement moins prudents avec leur bâton en raison du sentiment de sécurité
que leur procure la visière. Il précise que les commentaires de M. Cherry sont
souvent colorés, spontanés et même choquants et qu’il doit se garder de tenir
des propos inappropriés ou offensants pour les téléspectateurs.
M. Redekopp informe le Conseil qu’une responsable de
CBC
Sports a rencontré M. Cherry et lui a demandé de ne plus tenir
de propos de cette nature et ce dernier l’aurait assurée que cela ne se
reproduirait plus. Harold Redekopp tient aussi à mentionner que dans le cadre
de l’émission «Enjeux – Don
Cherry: portrait d’une grande gueule», diffusée sur les ondes de
Radio-Canada le 17 février 2004, M. Cherry
aurait remis ses commentaires en contexte et aurait affirmé qu’il avait été mal
compris et n’avait pas l’intention de blesser qui que ce soit.
CBC Television se
dit responsable de la gestion du contenu qu’elle diffuse et c’est pour cette
raison que M. Redekopp a demandé à CBC
Sports de diffuser «Coach’s
Corner» avec un délai de sept secondes.
Réplique du plaignant
Le plaignant n’a fourni aucune réplique.
Analyse
La chronique que fait Don Cherry dans le segment «Coach’s Corner» de l’émission «Hockey Night in Canada» fait partie du journalisme d’opinion qui laisse à son auteur une grande latitude dans l’expression de ses points de vue. Cependant, peu importe le genre journalistique employé, l’information diffusée doit être synonyme d’exactitude, de précision, d’intégrité, de respect des personnes et des groupes, des faits et des événements.
De l’avis du Conseil, Don Cherry n’était pas nécessairement dans l’erreur lorsqu’il a affirmé le 24 janvier 2004, à l’antenne de la CBC, que le la majeure partie des joueurs de hockey qui portent une visière sont des joueurs européens ou francophones.
En effet, selon des statistiques du Globe and Mail, du National Post et de la Ligue nationale de hockey qui ont été diffusées sur le site Internet de Radio-Canada le 12 février 2004, les joueurs européens seraient plus nombreux que les autres joueurs à porter une visière à leur casque. Il semble toutefois hasardeux de faire la même déduction en ce qui concerne les joueurs de hockey francophones.
En effet, si cette affirmation peut apparaître gratuite et non fondée sur aucun fait connu, son inexactitude n’est pas pour autant démontrée par le plaignant. Le Conseil ne peut donc retenir le grief pour manque d’exactitude dans l’information diffusée.
Par ailleurs, le plaignant faisait observer que quelques secondes après avoir affirmé que la plupart de ceux qui portent une visière sont des joueurs européens ou francophones, Don Cherry a affirmé que la plupart des joueurs robustes ( the tough guys) ne voulaient pas la porter, insinuant ainsi que les joueurs européens et francophones ne sont pas aussi robustes ou courageux que les autres.
Après examen des arguments des parties et visionnement de l’extrait sonore en question, le Conseil déplore qu’une telle affirmation ait été faite, mais ne peut soutenir que l’insinuation est suffisamment claire pour conclure qu’elle discrédite un groupe de personnes. Par conséquent, le Conseil n’a pas non plus retenu le grief en question.
Le Conseil a également relevé que la CBC Television avait exprimé plus que des réserves sur les propos tenus par son commentateur. Dans ce contexte, le Conseil tient à rappeler que la présente décision ne porte que sur les griefs exprimés par le plaignant et ne constitue en aucune façon un jugement global sur la pratique professionnelle de M. Cherry dans son ensemble, sur laquelle le Conseil a antérieurement exprimé des réserves.
Décision
Enfin, ces précisions étant faites, pour ces raisons le Conseil de presse du Québec rejette la plainte contre l’animateur Don Cherry et la CBC Television.
Analyse de la décision
- C11A Erreur
- C11B Information inexacte
- C18B Généralisation/insistance indue
- C18C Préjugés/stéréotypes