Plaignant
Le Réseau d’aide aux personnes
seules et itinérantes de Montréal inc. et M. Pierre
Gaudreau, coordonnateur
Mis en cause
Mme Mélanie Brisson, journaliste, M. Serge
Labrosse, directeur général de la rédaction et le quotidien
Le Journal de Montréal
Résumé de la plainte
Le Réseau d’aide aux personnes seules et itinérantes de
Montréal, appuyé par la Table de concertation jeunesse/itinérance du
centre-ville, porte plainte contre Le Journal de Montréal et sa
journaliste Mélanie Brisson. L’organisme reproche à l’article paru le 26 août
2004, d’être sensationnaliste et de manquer de respect envers la vie privée et
la réputation des prostituées mises en cause.
Griefs du plaignant
Le Réseau d’aide aux personnes seules et itinérantes de
Montréal (RAPSIM) a été choqué de voir la photo de huit des vingt personnes
arrêtées lors d’une opération policière. L’organisme croit qu’il n’était pas
d’intérêt public de connaître l’identité de ces personnes. La diffusion des
photos appert n’être qu’un effet de sensationnalisme. Cette publication de
photos risque également de porter atteinte à la dignité et à la sécurité de ces
personnes ainsi qu’à celle de leurs enfants. Le plaignant blâme l’éditeur pour
son manque de pondération de l’information.
La plainte envoyée par le RAPSIM est appuyée par la Table de
concertation jeunesse/itinérance du centre-ville. Celle-ci croit que la
décision du Journal de Montréal de solliciter et publier ces photos est
hautement questionnable.
Commentaires du mis en cause
M. Serge
Labrosse n’est pas d’accord avec ce que le plaignant
affirme; il croit qu’il est effectivement d’intérêt public de publier ces
photos. L’opération de la police de Montréal s’inscrit dans un contexte où le
phénomène de la prostitution dans certains quartiers de Montréal fait l’objet
d’un débat public. Or, l’identité des personnes arrêtées par le Service de
police est une information publique et par le fait même, le journal n’aurait
pas porté atteinte à leur vie privée. M. Labrosse
ajoute que si l’information exprimée par des mots est d’intérêt public, les
images le sont aussi.
Le journal soumet donc qu’il a utilisé sa liberté
d’expression de façon conforme aux valeurs en vigueur dans notre société.
Réplique du plaignant
Le RAPSIM déclare
qu’il est vrai que le phénomène de la prostitution peut faire l’objet d’un
débat public mais que celui-ci n’a pas besoin d’être personnalisé par la
publication de photos de huit travailleuses du sexe. Il soutient également que
la publication de ces photos n’apporte rien au débat public lui-même, si ce
n’est que de lui amener une touche de sensationnalisme. La publication de ces
photos constitue un manquement à la vie privée de ces travailleuses du sexe. Il
apparaît clairement au RAPSIM que Le Journal de Montréal n’a pas bien
soupesé et mis en équilibre son devoir d’informer et le respect des droits de
la personne en ce qui concerne le droit fondamental à la vie privée, à
l’intimité, à la dignité et au respect de la réputation de cette dernière.
Analyse
Le cas soumis à l’examen du Conseil de presse mettait en opposition deux principes : celui du droit du public à l’information et celui du droit au respect de la vie privée reconnu aux citoyens.
Le choix et le traitement d’un sujet ou d’un événement particulier relèvent du jugement rédactionnel des médias et des professionnels de l’information, lesquels doivent exercer ce jugement en fonction du degré d’intérêt public d’une nouvelle.
La fonction première des professionnels de l’information est de livrer à la population une information exacte, rigoureuse, complète sur toute question d’intérêt public.
Le Conseil de presse reconnaît l’intérêt public que pouvait présenter un sujet comme celui faisant l’objet de la présente contestation, étant donné son caractère judiciaire.
La journaliste Mélanie Brisson et Le Journal de Montréalavaient le droit de diffuser les images puisqu’elles sont d’intérêt public. De même que la presse ne peut se permettre de taire ou de donner une image déformée des faits sous prétexte qu’ils sont l’objet de quelque tabou ou qu’ils sont susceptibles de compromettre certains intérêts particuliers.
Enfin, le RAPSIM soutient que Le Journal de Montréal aurait fait preuve de sensationnalisme en diffusant ces photos. Dans ce cas précis, il ne semble pas que la journaliste ait eu recours au sensationnalisme dans le traitement de l’information. Les causes judiciaires sont d’ordre public et se doivent d’être connues des citoyens.
Décision
Pour ces raisons le Conseil de presse du Québec rejette la plainte du Réseau d’aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal contre la journaliste Mélanie Brisson, et Le Journal de Montréal.
Analyse de la décision
- C14A Sensationnalisme/exagération/insistance indue
- C16B Divulgation de l’identité/photo
- C17G Atteinte à l’image