Plaignant
L’Association Philippine de Montréal et de la Banlieu (sic) et M. San Tino, président
Mis en cause
M. Fred C. Magallanes, éditeur et rédacteur en chef et le périodique The Filipino Forum
Résumé de la plainte
L’Association Philippine de Montréal et de la Banlieu (sic) se plaint de plusieurs articles rédigés par l’éditeur et rédacteur en chef du périodique The Filipino Forum, Fred C. Magallanes. Ce dernier utiliserait son journal pour critiquer des gens de la communauté et pour nuire à la réputation de l’Association et de son centre communautaire, sans souci d’exactitude dans son traitement de l’information.
Griefs du plaignant
Le plaignant formule des griefs généraux, relativement au traitement de certains articles parus dans le périodique The Filipino Forum. Selon lui, le mis-en-cause avance régulièrement des propos erronés et crée certains faits de toutes pièces, dans le but de nuire à certaines personnes et organisations de la communauté philippine. Ses écrits seraient régulièrement des potins et des ouï-dire qui confèreraient un caractère sensationnaliste à son journal.
L’Association Philippine de Montréal et de la Banlieu (sic) fonde plus spécifiquement sa plainte sur certains articles des éditions de juin, de septembre et de novembre 2004, de même que sur les informations parues relativement à l’évènement « Pista sa Nayon 2004 ».
Article au sujet d’une subvention octroyée à la CFCA par la conseillère municipale Francine Senécal
La mention parue dans un article du journal, au sujet de la conseillère Francine Senécal qui aurait promis au groupe dont fait partie M. Magallanes, le Congress of Filipino Canadian Associations (CFCA), 3,5 millions de dollars pour un Centre philippin, fut publiée prématurément, comme le mentionne la lettre de cette dernière envoyée à M. Magallanes le 11 août 2003.
Il est à noter que ce point ne sera pas traité dans l’étude de la plainte, puisque le délai de prescription pour cet article était expiré au moment de l’ouverture du dossier.
Édition de juin 2004, la une « Independance celebration cancelled »
Le titre qui paraît à la une de cette édition du Filipino Forum « Independance celebration cancelled » serait trompeur et mensonger puisque la fête d’indépendance n’a, dans les faits, jamais été annulée. Le permis de célébrer la fête a été délivré à M. James de la Paz, président de la Fédération des associations canado-philippines du Québec, qui a célébré l’évènement en 2004.
Édition de septembre 2004, page 12, l’article « F.A.M.A.S. constitution revamp »
Cet article porte sur des propositions d’amendements à la constitution de l’Association Philippine de Montréal et de la Banlieu (sic) qui doivent éventuellement être présentés et approuvés en assemblée générale. Le plaignant affirme que M. Magallanes n’aurait pas été autorisé à publier les nouvelles propositions, puisqu’elles n’étaient pas prêtes.
Comme le mis-en-cause n’était pas membre du comité de préparation des amendements, l’association demande une explication sur la façon dont il a pu se procurer ces documents confidentiels et les publier prématurément.
Édition de novembre 2004, page 12, l’article « Parial drops case against FAMAS officials »
L’article en cause traite d’une poursuite intentée par M. Benny Parial contre le président et les directeurs de l’Association Philippine de Montréal. Il rapport que cette poursuite fut abandonnée en octobre 2004, apparemment sans motif.
Le plaignant soutient que le comité exécutif n’a jamais autorisé M. Fred Magallanes à publier les détails d’un dossier juridique impliquant les membres de l’exécutif de l’Association.
Édition de novembre 2004, page 28, article « Is the Center again being used as a dating place? »
Le plaignant reproche au mis-en-cause d’avoir publié des propos mensongers dans cet article, en laissant croire à la communauté que le centre communautaire philippin n’est qu’un endroit où les gens se rencontrent dans un but immoral.
Par exemple, le second paragraphe de l’article stipule: « According to a Filipino senior who went there one day, a married male member of the executive board was kissing a woman who didn’t look like his wife ». (Selon un aîné philippin qui s’est rendu au Centre un jour, un homme marié, membre du conseil exécutif, y embrassait une femme qui ne semblait pas être son épouse).
L’Association exige que M. Magallanes nomme son informateur et indique clairement quel est le membre du conseil exécutif ayant été vu embrassant une femme qui n’est pas la sienne. À défaut de preuve, elle demande que des excuses soient publiées dans le journal.
De plus, le plaignant invoque que le titre de cet article « Is the centre again being used as a dating place? » (Est-ce que le Centre est encore utilisé comme un lieu de rencontres?) serait trompeur et mensonger.
Selon le plaignant, l’intention de M. Magallanes lors de la rédaction de cet article, était de nuire à la bonne réputation du centre. Il ajoute que de tels propos pourraient aussi conduire à la perte de confiance des membres envers l’Association et causer une division dans la communauté philippine montréalaise.
M. Tino ajoute que le mis-en-cause a visité le centre dans le seul but d’observer les écarts de conduite des officiers de l’Association, mais n’a jamais tenté de rapporter les efforts du conseil exécutif pour maintenir et gérer efficacement les affaires et les activités de l’Association. Évoquant un acharnement de la part du mis-en-cause, le plaignant qualifie son attitude de destructrice, d’hostile et qui mérite d’être disciplinée. C’est sur cette base que le conseil exécutif a alors décidé de révoquer le titre de membre de M. Magallanes et de le bannir du centre communautaire en question.
L’évènement « Pista sa Nayon 2004 »
Le mis-en-cause aurait faussement informé la communauté que son groupe, le Congress of Filipino Canadian Associations (CFCA), aurait obtenu un permis de la ville de Montréal, pour célébrer l’évènement « Pista sa Nayon ».
Le plaignant reproche également à l’éditeur d’avoir posé des feuillets publicitaires annonçant cette célébration, même au centre communautaire et ce, malgré que le permis n’ait pas encore été réellement accordé.
De plus, le plaignant soutient que le permis fut délivré à son Association (FAMAS) et que c’est celle-ci qui a célébré l’évènement l’an dernier. Il ajoute également qu’à la suite de ces évènements le mis-en-cause a tenté de poursuivre la Ville de Montréal, plutôt que d’assumer ses propres actions.
Les faits reprochés au mis-en-cause en lien avec ce grief ne concernent pas directement des articles du Filipino Forum et n’ont fait l’objet d’aucun article soumis au Conseil de presse par le plaignant. Par conséquent, ces éléments ne sont pas traités par le Conseil de presse dans l’étude de cette plainte, puisqu’ils ne relèvent pas de sa juridiction.
Le plaignant ajoute finalement que l’éditeur et rédacteur en chef l’accuserait de mentir à la communauté au sujet de sa profession. Selon lui, sa situation professionnelle n’a rien à voir avec ses fonctions bénévoles au sein de l’Association et pour lesquelles il a été dûment élu.
Commentaires du mis en cause
Commentaires de M. Fred C. Magallanes, éditeur et rédacteur en chef :
Article au sujet d’une subvention de la conseillère municipale Francine Senécal octroyée à la CFCA
Le mis-en-cause précise que ce point a déjà été traité dans le dossier de plainteD2005-01 051 (décision rendue le 16 septembre 2005).
Tel que mentionné précédemment, ce point ne sera pas traité dans l’étude de la plainte, puisque le délai de prescription pour cet article était dépassé au moment de l’ouverture du dossier.
Édition de juin 2004, la une du Filipino Forum « Independance celebration cancelled »
Relativement à ce grief, le mis-en-cause affirme y avoir répondu dans le dossier D2005-01-051.
Édition de septembre 2004, page 12, l’article « F.A.M.A.S. constitution revamp »
Relativement à la publication de cet article, M. Magallanes affirme que le comité spécial, désigné par le conseil exécutif de l’Association Philippine de Montréal et de la Banlieu (sic) pour modifier sa constitution, lui a demandé d’éditer les propositions de modifications à la constitution de l’organisme. Il ajoute que, par la suite, Mme Alice Bustamante, la présidente de ce comité spécial, lui a donné la permission d’écrire son opinion sur ces changements proposés à la constitution.
Édition de novembre 2004, page 12, l’article « Parial drops case against FAMAS officials »
Au reproche d’avoir couvert la poursuite juridique contre les officiers de l’Association sans l’autorisation du conseil exécutif, M. Magallanes précise qu’il n’avait pas à être autorisé pour le faire. Il s’agit d’une nouvelle, dont il a été informé par Me Jean-Pierre Semeniuck, l’avocat des membres de l’Association.
Édition de novembre 2004, page 28, l’article « Is the Center again being used as a dating place? »
Au grief selon lequel l’intention du mis-en-cause était de nuire à la bonne réputation du centre communautaire, M. Magallanes rétorque qu’il n’a pas à répondre à ces allégations, puisque le conseil exécutif de l’Association a abrogé la résolution le bannissant du centre communautaire. Selon ce dernier, cette révocation confirme son innocence face aux griefs présentés contre lui. Il précise également n’être allé au centre que deux fois depuis mai 2004, à l’occasion de fêtes particulières, ce qui rend impossible l’allégation par le plaignant qu’il s’y présente dans le but d’observer les imperfections de ses officiers.
Le plaignant demande que le nom des informateurs du mis-en-cause soit divulgué. Ce dernier réplique qu’il n’a pas à le faire. Il invoque que le sujet en cause ne justifie pas une telle divulgation et qu’il s’est engagé envers sa source à l’effet qu’elle pourrait conserver l’anonymat.
L’éditeur ajoute que la question formulée dans le titre de l’article est légitime.
Globalement, l’éditeur et propriétaire du Filipino Forum soutient que la crédibilité de son journal est questionnée par des personnes qui y ont vu leurs torts particuliers être évoqués. Il ajoute que les supporters de M. Tino n’ont pas aimé certains faits péjoratifs rapportés à leur endroit par le journal. Les opinions et les faits rapportés par le journal sont en conflit avec les leurs. Le mis-en-cause réfute les allégations du plaignant en précisant qu’elles sont injustes et diffamatoires.
M. Magallanes joint plusieurs documents à sa réplique, notamment une lettre recommandée de son avocat, au sujet de la résolution l’expulsant du centre communautaire, invoquant que cette dernière était illégale et menaçant les plaignants de poursuites judiciaires. Il joint également une série d’articles parus dans The Filipino Forum, dont certains portant sur l’arrestation de M. Tino, le plaignant, pour voie de faits sur son ex-compagne. D’autres articles présentés par le mis-en-cause font état de la décision renversée, après les menaces de poursuites, d’exclure M. Fred Magallanes de l’Association.
Réplique du plaignant
Édition de septembre 2004, page 12, l’article « F.A.M.A.S. constitution revamp »
Le plaignant affirme ne jamais avoir entendu parler du fait que le mis-en-cause avait été sollicité pour réviser les propositions d’amendements de la constitution de l’Association. Il ajoute que ce dernier a critiqué ces propositions dans son journal avant même que la présidente du comité ne remette ses propres commentaires au conseil exécutif.
Édition de novembre 2004, page 12, l’article « Parial drops case against FAMAS officials »
Le plaignant soutient que M. Magallanes ment lorsqu’il affirme avoir été le représentant de l’Association dans le cas de la poursuite de M. Parial. Il demande au mis-en-cause de produire une résolution faisant état d’un tel mandat.
Édition de novembre 2004, page 28, l’article « Is the Center again being used as a dating place? »
En réponse au commentaire de M. Magallanes, le plaignant invoque la résolution le bannissant du centre communautaire et l’expulsant de l’Association. Il rétorque que l’abrogation de la résolution n’a rien à voir avec le titre diffamatoire de l’article. Il précise que cette résolution ne blanchit pas le mis-en-cause. M. Tino maintient que ce dernier visitait le centre fréquemment avant d’en être exclu et que ses fréquentes visites pour livrer son journal le prouvent. De plus, il n’aurait pas été nécessaire d’interdire l’accès au centre à quelqu’un qui ne s’y rendait jamais.
En rapport avec le titre de l’article « Is the Center again being used as a dating place? », le plaignant précise que le terme « again » (encore) indique que le rédacteur a été témoin ou qu’il peut démontrer que le centre était auparavant utilisé comme un endroit de rencontres extraconjugales, ce qu’il n’a pas fait.
De l’avis du plaignant le refus de divulguer le nom de l’informateur ayant indiqué qu’un homme marié, membre du conseil exécutif, aurait embrassé une femme qui ne semblait pas être son épouse, constitue une admission. En effet, le plaignant estime que le mis-en-cause a créé cette histoire dans le but de nuire à la réputation des membres du conseil
exécutif.
Pour conclure, le plaignant affirme également que personne n’a signé la pétition présentée en annexe par le mis-en-cause au sujet de la résolution émise à la suite de la publication de cet article, ce qui signifie que la communauté philippine ne croit plus en lui à présent.
Analyse
Les organes de presse et les journalistes ont le devoir de livrer au public une information complète, rigoureuse et conforme aux faits et aux évènements. La rigueur intellectuelle et professionnelle dont doivent faire preuve les médias et les journalistes est
synonyme d’exactitude, de précision, d’intégrité, de respect des personnes et des groupes, des faits et des événements.
L’Association Philippine de Montréal et de la Banlieu (sic) (FAMAS) se plaint de plusieurs articles rédigés par l’éditeur et rédacteur en chef du périodique The Filipino Forum, M. Fred C. Magallanes. Ce dernier utiliserait son journal pour critiquer des membres de la communauté et nuire à la réputation de l’Association et de son centre communautaire, sans aucun souci d’exactitude dans le traitement de l’information.
De l’avis du Conseil de presse, la détermination du sujet d’un reportage appartient au journaliste qui peut l’aborder sous l’angle choisi, en fonction de l’intérêt du public. Dans le cas de l’article « F.A.M.A.S. constitution revamp», il était d’intérêt pour le public, en particulier la communauté philippine de connaître les projets de modifications à la constitution de l’association. De plus, il ne fut pas démontré par le plaignant qu’il y ait eu faute lors de la collecte des informations. À cet effet, le mis-en-cause cite ses sources et précise avoir été autorisé à donner son opinion sur le sujet, le contraire n’ayant pas été prouvé par le plaignant. De plus, les membres du conseil exécutif, n’avaient pas à autoriser le mis-en-cause, à publier des informations ou des opinions sur le sujet. En effet, comme le précise le guide des Droits et responsabilités de la presse: «L’attention [que les médias] décident de porter à un sujet particulier, le choix de ce sujet et sa pertinence relèvent de leur jugement rédactionnel. Nul ne peut dicter à la presse le contenu de l’information sans s’exposer à faire de la censure ou à orienter l’information».
Aux yeux du Conseil de presse, M. Magallanes avait également le droit de rapporter l’information contenue dans l’article «Parial drops case against FAMAS officials» puisque, encore une fois, la liberté rédactionnelle lui conférait le droit de couvrir l’information d’intérêt public de son choix et, pour ce faire, de consulter les personnes nécessaires. Le fait que l’Association l’ait nommé ou non comme reporter officiel, est un problème qui concerne l’organisation à l’interne, mais qui ne relève pas du Conseil de presse.
Le plaignant reproche également au mis-en-cause d’avoir rapporté des propos erronés dans l’article « Is the Center again being used as a dating
place?». À ce sujet, les faits portés à la connaissance du Conseil de presse sont contradictoires.
Le mis-en-cause affirme que l’informateur dont les propos auraient servi de base à l’article souhaite garder l’anonymat. À cet effet, le guide «Droits et responsabilités de la presse» précise que le recours à des sources anonymes doit demeurer exceptionnel, afin de préserver un climat de confiance au sein du lectorat. Dans les circonstances, il aurait été possible pour le mis-en-cause d’avoir recours à l’observation sur le terrain ou d’interroger d’autres sources, afin d’éviter le recours à ce procédé.
Le guide «Droits et responsabilités de la presse» fait mention de règles déontologiques que doivent respecter les titres et les manchettes d’un article: «Les manchettes et les titres doivent respecter le sens, l’esprit et le contenu des textes auxquels ils renvoient. Les responsables doivent éviter le sensationnalisme et veiller à ce que les manchettes et les titres ne servent pas de véhicules aux préjugés et aux partis pris.»
Quant au titre de l’article, « Is the centre again being used as a dating place?» (Est-ce que le Centre est encore utilisé comme un lieu de rencontres?), le Conseil constate qu’il ne respecte pas le sens du texte, puisque le mot«again» (encore) tend à induire le public en erreur sur la nature de l’information présentée. En effet, aucun rapprochement avec des évènements précédents n’est évoqué dans l’article, ni démontré par le mis-en-cause.
Décision
Par conséquent, le Conseil retient la plainte de M. San Tino et de l’Association Philippine de Montréal et de la Banlieu (sic), sur les griefs concernant la source d’information et le titre de l’article « Is the centre again being used as a dating place?» et blâme partiellement l’éditeur et rédacteur en chef Fred C. Magallanes, de même que le périodique The Filipino Forum.
Le Conseil rejette les griefs concernant l’angle de traitement, la sélection des faits rapportés et l’exactitude de l’information, en lien avec les propos et les témoignages rapportés.
Analyse de la décision
- C03A Angle de traitement
- C03B Sources d’information
- C03C Sélection des faits rapportés
- C11F Titre/présentation de l’information
- C11G Rapporter des propos/témoignages erronés