Plaignant
M. et Mme Michel Gagnon
Mis en cause
M. Gilles Pétel,
journaliste et responsable de la direction; M. Jean-François
Guénette, éditeur et l’hebdomadaire
Le Magazine de Saint-Lambert
Résumé de la plainte
M. et Mme Gagnon portent plainte contre le
journaliste Gilles Pétel et l’hebdomadaire
Le Magazine de Saint-Lambert pour manque
d’objectivité dans leurs textes, concernant la vie politique de la Ville de
Saint-Lambert.
Griefs du plaignant
M. et Mme Gagnon portent plainte contre le
journaliste Gilles Pétel et l’hebdomadaire
Le Magazine.
Ils estiment que, dans son ensemble, le journal fait preuve d’un manque
d’objectivité dans ses textes, concernant la politique municipale de
Saint-Lambert.
Ils accusent principalement le journaliste
de formuler des attaques personnelles envers d’actuels membres du conseil
municipal, auparavant liés au mouvement défusionniste.
Les plaignants mentionnent, comme exemple
d’attaque personnelle, un article du Magazine
publié en octobre 2005, concernant le résultat d’un débat public entre deux
candidats aux élections municipales. Le
Magazine rapporte que le candidat partisan de la défusion
(M.Sean Finn, l’actuel maire de Saint-Lambert)
aurait perdu ce débat, alors que les plaignants affirment qu’il l’a remporté.
Ils estiment que le journal est biaisé et refuse de rapporter la vérité.
M. et Mme Gagnon accusent aussi M.
Pétel d’écrire des reportages sur la vie politique de
Saint-Lambert alors qu’il n’assisterait que rarement aux réunions du conseil
municipal. De plus, ils s’interrogent sur le fait que M. Pétel
semble au courant des événements du conseil municipal avant qu’ils n’aient
lieu.
En outre, ils dénoncent une absence de
révision linguistique des articles et considèrent que
LeMagazine comporte de nombreuses fautes en français et en
anglais.
Dans un courriel envoyé précédemment à
l’éditeur, ils accusaient le journal de ne pas savoir rapporter de simples
faits, à savoir la victoire de M. Finn, lors du débat cité ci-dessus. Selon les
plaignants, le journaliste interpréterait les faits et laisserait son opinion
les déformer. En réponse à ce courriel, M. Pétel
dénonçait leur «partisanerie» et leurs
«conclusions farfelues». Il indiquait les différentes sources qui
lui auraient permis d’écrire que M. Finn avait perdu le débat et précisait
qu’il ne faisait connaître ses opinions que dans sa chronique
«Parlons-en».
Dans l’édition du mercredi 1er
mars 2006, les plaignants ont annoté certains articles en y pointant leurs
griefs. Les articles visés sont la une, différents articles concernant le
budget municipal de la ville ainsi que la chronique «Parlons-en» de
M.Pétel. Les plaignants mettent en relief ce
qu’ils considèrent comme des attaques personnelles et des manquements à
l’objectivité. Ils dénoncent aussi un manque d’équilibre dans un article
intitulé «Réactions au budget de Saint-Lambert, Gilles Grégoire dénonce
Sean Finn» portant sur les réactions de
l’ex-président de l’arrondissement Saint-Lambert/LeMoyne, Gilles Grégoire, au
budget municipal. Ces réactions ne seraient équilibrées par aucun autre point
de vue.
Commentaires du mis en cause
M. Pétel réplique
à la plainte en commentant les différentes pièces jointes.
Il explique d’abord que l’interprétation
d’un débat est toujours subjective. Il explique que son opinion s’appuyait sur
le fait que les quatre journalistes qui couvraient l’événement auraient tous eu
plus ou moins les mêmes conclusions, bien qu’exprimées dans des termes
différents.
Concernant les articles du
Magazine joints à la plainte, il estime
qu’il n’a fait qu’accomplir son travail de journaliste, que ce soit dans le
cadre du reportage, du dossier ou de l’éditorial. Il précise que, selon lui, le
fait de rapporter les paroles de M.
Gilles Grégoire était tout à fait légitime et dans les normes
d’éthique journalistique reconnues.
Il accuse enfin le plaignant d’être un
fanatique de Sean Finn et de harceler régulièrement
le journal.
Réplique du plaignant
Les plaignants avouent leur déception face
à ce qu’ils qualifient de mauvaise foi et de mépris du mis-en-cause.
Selon eux, la mauvaise qualité du français de la lettre est un pâle reflet de
ce qu’ils voient dans Le Magazine
chaque semaine.
Ils réfutent l’accusation de harcèlement et
ajoutent que c’est un exemple du traitement de l’information du journal. Ils
soulignent qu’ils ne sont pas fanatiques de M.Sean
Finn et répètent que M.Pétel est incapable de
rapporter les faits sans les déformer.
Ils critiquent une nouvelle fois la
«couverture lamentable» du débat mentionné plus haut. Selon eux, le
journal fait preuve d’un acharnement à dénigrer M.
Finn. Ils se
demandent aussi qui étaient les autres journalistes présents au débat dont
parle M.Pétel et s’ils y ont
vraiment assisté.
Analyse
Le cas soumis à l’attention du Conseil de presse révèle une opposition vive entre plaignants et mis-en-cause. La présente décision ne vise pas à prendre parti dans un différend entre individus, mais à établir la conformité d’une pratique professionnelle à la déontologie journalistique.
Les plaignants reprochaient tout d’abord au mis-en-cause de se baser sur des sources d’information douteuses et d’écrire des «faussetés» dans LeMagazine de Saint-Lambert. Ces accusations concernaient principalement un article publié en octobre 2005, au sujet du résultat d’un débat public entre deux candidats aux élections municipales. Le Magazine avait rapporté que le candidat partisan de la défusion avait perdu ce débat, alors que les plaignants affirment qu’il l’avait remporté. Cependant, comme ils n’ont pas apporté les preuves spécifiques de ce qu’ils reprochaient au mis-en-cause, ce grief n’a pas été retenu.
Les reproches du plaignant sur la qualité linguistique du journal ne peuvent non plus être retenu d’abord dans la mesure où le Conseil n’entend pas établir le lexique des termes que les médias doivent employer ou éviter, les décisions à cet égard relevant de leur autorité rédactionnelle. De plus, le Conseil a jugé que la qualité linguistique des textes en français et en anglais était tout à fait acceptable.
Par ailleurs, les plaignants dénonçaient un manque d’équilibre de la part de M. Pétel, quant à la citation de l’opposant à l’actuel maire rapportée dans un article, et qui ne serait relativisée par aucun autre point de vue. À cet égard, le choix d’un sujet ainsi que l’angle abordé relèvent du jugement rédactionnel des professionnels de l’information. Certes, cette citation n’est tempérée par aucune autre opinion, mais l’équilibre des points de vue ne peut pas se juger d’après le contenu d’un seul article.
En revanche, le Conseil a estimé que le manque d’équilibre invoqué par les plaignants découlait d’une confusion des genres journalistiques. L’analyse du Conseil a révélé que le mis-en-cause a porté atteinte au principe de distinction des genres journalistiques, lorsqu’il a utilisé un style propre au journalisme d’opinion dans le cadre de ses articles relevant du journalisme d’information. Or, dans ces articles les professionnels de l’information doivent rapporter les faits et les situer dans leur contexte sans les commenter. En général, les textes de M. Pétel rapportent des faits. Cependant, l’utilisation d’expressions comme «Et il se proclame sans cesse l’apôtre de la transparence!»dans des articles d’information contribuent à entretenir la confusion des genres journalistiques. Le Conseil retient donc les griefs de manque d’équilibre et de confusion des genres journalistiques.
Si le Conseil reconnaît aux chroniqueurs une grande latitude dans le traitement d’un sujet d’information, et que cette latitude leur permet d’adopter un ton polémiste pour prendre parti et exprimer leurs critiques, ceux-ci ne sauraient toutefois se soustraire aux exigences de rigueur et d’exactitude. Ils doivent éviter de donner aux événements une signification qu’ils n’ont pas ou de laisser planer des malentendus qui risquent de discréditer les personnes. M. Pétel, à titre de chroniqueur, avait donc le droit de critiquer M. Finn ou les autres membres de l’actuelle majorité politique. Il ne pouvait toutefois pas se permettre d’insinuer sans preuve, que le maire avait commis un détournement de fonds. Le Conseil retient donc, d’un point de vue éthique, le grief d’attaque personnelle.
Pour ces motifs, le Conseil retient la plainte de M.etMmeGagnon contre M. Gilles Pétel et le journal Le Magazine de Saint-Lambert, pour manque d’équilibre, confusion des genres journalistiques et attaque personnelle.
En dernier lieu, le Conseil tient à faire observer que, même si le journalisme d’opinion et le journalisme d’information sont deux formes de pratique professionnelle qui reviennent de droit au journaliste, ce dernier peut difficilement passer librement d’un genre journalistique à l’autre sur un même sujet sans risquer de porter atteinte à sa crédibilité professionnelle et à la validité de l’information.
Analyse de la décision
- C03B Sources d’information
- C11C Déformation des faits
- C11H Terme/expression impropre
- C12A Manque d’équilibre
- C17E Attaques personnelles
- C20A Identification/confusion des genres