Plaignant
M. Jacques Marchand
Mis en cause
M. Gilles Pétel, rédacteur en chef; M. Jean-François Guénette, directeur général et l’hebdomadaire Le Magazine de Saint-Lambert
Résumé de la plainte
M. Jacques Marchand porte plainte contre M. Gilles Pétel et Le Magazine de Saint-Lambert pour avoir transmis une information inexacte issue de sources privées dans un article intitulé « Racisme d’un animateur de FM 103.3? – Michel Leroux, Éric Tétrault et Jacques Marchand s’excusent » paru le 18 janvier 2006.
Griefs du plaignant
M. Jacques Marchand porte plainte contre M. Gilles Pétel et Le Magazine de Saint-Lambert concernant un article paru le 18 janvier 2006 intitulé « Racisme d’un animateur de FM 103.3? – Michel Leroux, Éric Tétrault et Jacques Marchand s’excusent ».
Selon le plaignant, dans cet article publié en période électorale, M. Pétel aurait tendancieusement déformé une information et dévoilé des éléments confidentiels issus d’un échange de courriels entre M. Marchand, le plaignant dans le présent dossier et M. Maka Kotto, alors député sortant de la circonscription de Saint-Lambert. Le plaignant considère de plus que le contenu de cette correspondance privée n’était pas d’intérêt public.
M. Marchand explique qu’en ne retenant que le libellé d’une phrase du courriel qu’il avait adressée à M. Kotto, tout en ignorant le contexte, M. Pétel aurait déformé la nature de cette lettre en en inversant le sens et en exploitant la thématique du racisme. Selon lui, M. Pétel aurait, par là même, donné une connotation raciste à son propos envers M. Kotto alors que ce n’était nullement son intention. De plus, il aurait utilisé une tournure sensationnaliste pour transmettre l’information.
Il ajoute que, même si M. Pétel avait antérieurement obtenu l’autorisation de Mme Carole Thomas, alors attachée de presse de M. Kotto, de divulguer le contenu de la lettre, l’éthique journalistique aurait exigé que le journaliste obtienne aussi son approbation. Ainsi, selon le plaignant, M. Pétel n’a pas favorisé la possibilité de M. Marchand de réagir à cette information et de faire connaître sa version des faits, afin de permettre au public de se faire son opinion.
Par ailleurs, il précise que toutes les parties impliquées dans le dossier, soit la direction de la station CHAA-FM, l’attachée de presse de M. Kotto et lui-même avaient convenu de clore le dossier. Aussi, selon lui, M. Pétel aurait violé le consensus entre les parties de maintenir toute la confidentialité autour d’un document privé.
Ainsi, le plaignant considère que l’information transmise par le journaliste est incomplète, dans la mesure où elle ne couvre pas toutes les facettes de l’affaire et où elle incite les lecteurs à une fausse interprétation des faits tout en nuisant à sa réputation. Il ajoute que ces fautes lui auraient porté préjudice à tel point qu’il aurait perdu son emploi de journaliste à la radio communautaire CHAA-FM.
Commentaires du mis en cause
Le Conseil a fait la demande à plusieurs reprises aux mis-en-cause, afin qu’ils répondent à cette plainte.
Le Magazine de Saint-Lambert n’a cependant pas donné suite à la demande du Conseil de communiquer sa version des faits.
Réplique du plaignant
Le plaignant n’a présenté aucune réplique.
Analyse
Dans sa plainte, M. Jacques Marchand reprochait d’abord à M. Gilles Pétel d’avoir utilisé une information confidentielle contenue dans un document privé, soit un courriel que M. Marchand avait envoyé au député de la circonscription de Saint-Lambert, M. Maka Kotto.
Le Conseil constate que ce courriel contenait des informations en grande partie d’ordre professionnel et celles reprises dans l’article concernaient directement la relation entre M. Marchand et M. Kotto dans le contexte de l’organisation d’un débat public en campagne électorale. Le Conseil a estimé que cette information était d’intérêt public, dans la mesure où elle concernait des personnes appartenant à la sphère publique, soit un député et un journaliste, mais aussi dans la mesure où elle était en lien avec un événement public. De plus, ce courriel n’était pas confidentiel, puisque M. Kotto avait donné son accord pour sa publication. Les griefs relatifs à l’utilisation et à la diffusion d’informations confidentielles ont donc été rejetés.
Ensuite, M. Marchand considérait que l’information transmise dans l’article était inexacte. La lettre adressée à M. Kotto par M. Marchand se lisait comme suit : « Que vous soyez un souverainiste de circonstance ou un véritable souverainiste, ou un Québécois d’adoption je n’ai aucune leçon à recevoir de vous à cet égard. Je ne suis pas issu d’une république de banane et la démocratie n’est pas un phénomène nouveau pour moi et c’est pourquoi je comprends votre enthousiasme devant ce paradigme sociopolitique. » Le journaliste a repris, entre guillemets dans son article : « L’animateur Jacques Marchand, dans une lettre qu’il lui faisait parvenir le 11 janvier, accusait M. Kotto de « souverainiste de circonstance et de Québécois d’adoption, issu d’une république de bananes ». » Les propos entre guillemets ayant été mal cités, l’information était inexacte et le grief a été retenu.
En ce qui a trait au grief d’information incomplète, le Conseil a estimé que l’article faisait état de la version des faits de M. Marchand en mentionnant la lettre d’excuse de ce dernier. Par ailleurs, bien que le journaliste ait fait un certain effort pour mettre l’information en contexte, il aurait pu rappeler les événements ayant donné naissance au litige entre l’animateur et le député. Toutefois, puisque cette omission n’affecte pas la compréhension générale du lecteur, le grief n’a pas été retenu.
De plus, le Conseil considère que la présentation de l’information et les termes employés par le journaliste n’étaient pas sensationnalistes. Le Conseil rejette donc le grief relatif au sensationnalisme.
Enfin, le Conseil regrette la non-participation des mis-en-cause visés par la plainte, ce qui est contraire à la ligne de conduite adoptée habituellement par les médias et va à l’encontre de la responsabilité qu’ils ont de répondre publiquement de leurs actions. Le Conseil insiste sur l’importance pour tous les médias de participer aux mécanismes d’autorégulation qui contribuent à la qualité de l’information et à la protection de la liberté de presse. Cette collaboration constitue un moyen privilégié pour eux de répondre publiquement de leur responsabilité d’informer adéquatement les citoyens.
Décision
Pour tous ces motifs, le Conseil retient partiellement la plainte de M. Marchand contre M. Gilles Pétel et Le Magazine de Saint-Lambert sur le motif d’avoir publié une information inexacte et déplore leur absence de collaboration avec le Conseil dans l’étude de la plainte.
Analyse de la décision
- C03B Sources d’information
- C11B Information inexacte
- C11D Propos/texte mal cités/attribués
- C12B Information incomplète
- C12C Absence d’une version des faits
- C12D Manque de contexte
- C14A Sensationnalisme/exagération/insistance indue
- C16D Publication d’informations privées
- C17G Atteinte à l’image
- C23I Violation de la propriété privée
- C24A Manque de collaboration