Plaignant
Me Sarto Landry
Mis en cause
M. Jean Laroche, journaliste; M. Serge Côté, rédacteur en chef et le quotidien Le Journal de Québec
Résumé de la plainte
Me Sarto Landry porte plainte contre M. Jean Laroche, journaliste pour Le Journal de Québec, concernant un article paru le 5 février 2007 et intitulé « Condamnation pour voies de fait – Autre revers pour Me Sarto Landry ». Les principaux griefs ont trait à la diffusion d’une information inexacte et non vérifiée et de mentions non pertinentes en regard des antécédents judiciaires du plaignant.
Griefs du plaignant
Me Pierre-Olivier Laforest, porte plainte au nom de Me Sarto Landry, contre le journaliste Jean Laroche concernant un article paru dans Le Journal de Québec le 5 février 2007 et intitulé « Condamnation pour voies de fait – Autre revers pour Me Sarto Landry ».
Les principaux motifs invoqués sont la diffusion d’une information inexacte et non vérifiée, de mentions non pertinentes en regard des antécédents judiciaires de Me Sarto Landry, et de l’atteinte à sa réputation.
Me Laforest estime d’abord que M. Laroche aurait diffusé une information inexacte lorsqu’il aurait écrit : « Me Landry avait alors décidé de rendre visite à M. Burns même si une ordonnance de la cour le lui interdisait. » Le représentant du plaignant reprochait précisément à M. Laroche d’avoir écrit qu’une ordonnance de la Cour lui interdisait d’aller voir M. Burns, et qu’il aurait contrevenu à une telle ordonnance. Selon lui, cette information serait dénuée de fondement et laisserait croire qu’il ferait fi des ordonnances de la Cour.
Me Laforest ajoute que si M. Laroche avait fait les vérifications nécessaires avant de diffuser cette information, il aurait constaté qu’aucune ordonnance ne restreignait les contacts entre M. Burns et le plaignant au moment où les faits se sont produits.
Aussi, le représentant du plaignant estime que cette information inexacte mettrait en doute la réputation de Me Sarto Landry.
Me Laforest estime aussi que le journaliste aurait utilisé sa tribune pour salir davantage la réputation de Me Landry, notamment en le qualifiant de « bouillant avocat » et en relatant les propos tenus par le capitaine René Bédard de la police de Québec, à l’effet que les policiers auraient peur de Me Landry. Ce capitaine aurait même conseillé aux policiers « de toujours patrouiller à deux dans le secteur où vit l’avocat ».
Le représentant de Me Landry précise qu’une mise en demeure aurait été envoyée au journaliste et au Journal de Québec, afin qu’ils se rétractent concernant l’article du 5 février 2007 et qu’ils présentent des excuses publiques.
Commentaires du mis en cause
Me Bernard Pageau allègue que ce n’est pas la première fois que Le Journal de Québec mentionnerait cette ordonnance de la Cour interdisant au plaignant de se rendre chez M. Burns. Il indique ainsi trois articles publiés les 13 avril et 2 août 2005 ainsi que le 25 mars 2006, dans lesquels il était fait allusion à cette ordonnance. Il affirme donc ne pas comprendre pourquoi Me Landry ne se plaint que maintenant de la publication d’une information, qui par ailleurs serait bien fondée.
Concernant les propos du capitaine René Bédard rapportés dans l’article, le mis-en-cause répond qu’ils proviennent d’un jugement de la Cour supérieure daté du 4 avril 2006, dans lequel on peut lire : « Toutes ces plaintes ont été systématiquement rejetées et le capitaine René Bédard de la police de Québec a même parlé d’un « syndrome de peur » qui s’est développé chez les policiers. Il a alors donné le conseil de toujours être deux dans ce secteur, lors des patrouilles. » De même, concernant l’appellation de « bouillant avocat », le mis-en-cause précise que le journaliste s’est référé à différents jugements concernant le plaignant, qu’il joint à ses commentaires, estimant que cette appellation est tout à fait raisonnable eu égard à ces procédures judiciaires.
Réplique du plaignant
Me Pierre-Olivier Laforest estime d’abord que le fait de rapporter plusieurs fois une information erronée ne lui donnerait pas un caractère véridique. C’est à la suite des événements survenus entre le plaignant et M. Burns que ce dernier aurait demandé qu’une ordonnance soit émise.
Au moment des faits, soit le 9 mars 2007, Me Landry se trouvait dans une période de probation l’enjoignant à garder la paix et à avoir une bonne conduite, à la suite d’une précédente condamnation. C’est pourquoi le représentant du plaignant réitère que le journaliste aurait manqué de rigueur en rapportant une information inexacte sans l’avoir vérifiée.
Concernant les propos rapportés du capitaine Bédard, Me Laforest allègue qu’il ne s’agirait pas seulement des mentions elles-mêmes, mais aussi de la façon dont elles auraient été rapportées et du contexte dans lequel elles ont été utilisées. En effet, en évoquant le « syndrome de peur » dans son article, le journaliste laisserait croire que les policiers craignaient physiquement Me Landry. Or, à la lecture du jugement, on se rend compte que ce syndrome de peur avait été causé par les plaintes portées par Me Landry contre les policiers, et que si le capitaine Bédard leur avait donné un tel conseil, c’était dans le but de se protéger contre ces plaintes et d’avoir des témoins en cas d’éventuelles poursuites, précise Me Laforest.
Ainsi, le représentant du plaignant considère que le journaliste se serait servi de la nouvelle relative au revers de Me Landry en Cour d’appel afin de salir sa réputation en manipulant l’information.
Analyse
Me Sarto Landry portait plainte contre M. Jean Laroche et Le Journal de Québec, concernant un article intitulé « Condamnations pour voies de fait – Autre revers pour Me Sarto Landry », paru le 5 février 2007.
Les principaux motifs invoqués avaient trait à la diffusion d’une information inexacte et non vérifiée, de mentions non pertinentes en regard des antécédents judiciaires du plaignant, et de l’atteinte à sa réputation.
Me Landry contestait d’abord l’information selon laquelle une ordonnance lui interdisait de se rendre chez M. Sébastien Burns, tel que cela était mentionné dans l’article. Il appert que la seule ordonnance contenue dans le dossier astreignait Me Landry à garder la paix et à ne pas troubler l’ordre public. Elle n’était donc pas à l’effet que Me Landry ne pouvait pas approcher M. Burns. De plus, le représentant des mis-en-cause n’a pas démontré qu’il existait une autre ordonnance. Certes, il y avait une différence technique entre ces deux types d’ordonnances. Cependant, sur le fond, le plaignant a tout de même été condamné dans l’affaire qui l’opposait à M. Burns, en première instance et en instance d’appel, et il a contrevenu à une ordonnance de la Cour. Le Conseil considère néanmoins que l’information diffusée par le journaliste comportait une inexactitude.
Le plaignant estimait ensuite que le journaliste n’aurait pas dû mentionner ses antécédents judiciaires, le qualifier de « bouillant avocat », et rapporter les propos tenus par le capitaine de police Bédard à l’effet que les policiers le craignaient.
Le Conseil a estimé que l’information selon laquelle Me Landry avait déjà été condamné deux fois pour voies de fait entre 2001 et 2004 était d’intérêt public. Ainsi, dans le cadre du suivi des affaires judiciaires concernant Me Landry à la suite du rejet de sa demande par la Cour d’appel, et puisque la justice est publique, le journaliste pouvait rappeler les condamnations antérieures de cet avocat.
Par ailleurs, dans le contexte des condamnations antérieures du plaignant, il appert que le qualificatif « bouillant » était acceptable.
En outre, dans la mesure où l’article du 5 février 2007 rapportait que la Cour d’appel avait rejeté la demande de Me Landry et que celui-ci était effectivement coupable de voies de fait, le Conseil a estimé que mentionner le comportement de Me Landry à l’égard des policiers et la crainte qu’il suscitait chez eux, à cause de son habitude de porter plainte, n’était pas hors de propos. De plus, les propos du capitaine Bédard sont rapportés dans le jugement du 4 avril 2006 de l’Honorable Suzanne Ouellet et sont donc publics.
Enfin, la façon de présenter et de rapporter l’information relève de la discrétion rédactionnelle du journaliste, et le Conseil a estimé que ce dernier a respecté la latitude dont il jouissait dans le cadre de la rédaction de cet article d’information. Le grief a été rejeté.
En dernier lieu, le plaignant considérait que l’article de M. Laroche portait atteinte à sa réputation. Le rôle du Conseil n’est pas de déterminer ou d’évaluer le degré d’atteinte à la réputation des plaignants, cela relève des tribunaux. Le Conseil a étudié le dossier uniquement sous l’angle de l’éthique professionnelle. Or, il appert que, compte tenu des condamnations précédentes du plaignant et du fait que celui-ci a contrevenu à une ordonnance de probité, qui lui interdisait de troubler l’ordre public, Me Landry ne pouvait s’étonner que les diverses allusions à son passé judiciaire et à son comportement antérieur ne soient rapportés par les médias. Le grief a été rejeté.
Décision
En raison de l’ensemble de ces considérations, le Conseil retient partiellement la plainte de Me Sarto Landry contre le journaliste, M. Jean Laroche et Le Journal de Québec au motif de l’inexactitude de l’information diffusée quant à l’ordonnance de la Cour, mais rejette tous les autres griefs du plaignant.
Analyse de la décision
- C11B Information inexacte
- C15D Manque de vérification
- C16A Divulgation des antécédents judiciaires
- C16E Mention non pertinente
- C17G Atteinte à l’image
Date de l’appel
19 February 2008
Appelant
Le Journal de Québec
Décision en appel
La commission d’appel du Conseil de presse du Québec a étudié l’appel que vous avez interjeté relativement à la décision rendue par le comité des plaintes et de l’éthique de l’information dans le dossier cité en titre.
Après examen, les membres de la commission ont conclu à l’unanimité de maintenir la décision rendue en première instance.