Plaignant
M. Mario Baillargeon
Mis en cause
M. Roger Blackburn, journaliste; M. Michel Simard, éditeur adjoint et rédacteur en chef et le journal Le Quotidien
Résumé de la plainte
M. Mario Baillargeon accuse le journaliste M. Roger Blackburn et le journal Le Quotidien d’avoir, dans son édition du 12 mars 2007, défendu les opinions de M. Louis Champagne en ayant accordé une page de nouvelles à la lettre ouverte de celui-ci, au sujet des propos homophobes qu’il aurait tenus à l’encontre du candidat péquiste Sylvain Gaudreault en cours de campagne électorale.
Griefs du plaignant
Le 27 février 2007, l’animateur de la station radiophonique CKRS de l’arrondissement de Chicoutimi, M. Louis Champagne, tenait des propos controversés à caractère homophobe à l’égard de M. Sylvain Gaudreault, candidat péquiste aux élections provinciales.
Le plaignant, M. Mario Baillargeon, reprochait au journal Le Quotidien d’avoir publié dans une page complète de son édition du 12 mars, un article de M. Roger Blackburn introduisant une lettre ouverte de M. Louis Champagne. Dans sa lettre ouverte, l’animateur, tout en présentant ses excuses pour les propos qui lui sont reprochés, énonçait qu’il maintenait son opinion à ce sujet, faisant fi de ce qu’il nomme la « pensée politiquement correcte » du Québec.
Selon le plaignant, le traitement qui a été fait de cette lettre par Le Quotidien permettait à M. Louis Champagne « d’aller encore plus loin dans son harcèlement homophobe ». Le plaignant s’interrogeait en effet sur l’espace accordé à cette lettre dans Le Quotidien.
D’après lui, cette lettre aurait dû faire partie du courrier des lecteurs, et ne pas faire l’objet d’un traitement dans les pages principales, traitement ostentatoire qui ferait du journal Le Quotidien et de son journaliste « les défenseurs de M. Champagne et de ses opinions ».
Commentaires du mis en cause
Commentaires de Me Carolina Mingarelli, affaires juridiques, Gesca ltée :
La représentante des mis-en-cause souligne en premier lieu l’ampleur médiatique qu’ont pris les propos tenus par M. Louis Champagne quant à l’orientation sexuelle de M. Sylvain Gaudreault et son impact sur le vote dans la circonscription électorale de Jonquière. Ainsi, le contexte dans lequel fut publiée cette lettre la rendait d’intérêt public, cette dernière pouvait donc faire l’objet d’un article d’information.
Elle rappelle également que l’attention que les médias et journalistes décident de porter à un sujet relève de leur jugement rédactionnel. S’appuyant sur le guide déontologique du Conseil de presse, elle expose que « nul ne peut dicter à la presse le contenu de l’information sans s’exposer à faire de la censure ou à orienter l’information ».
Concernant le reproche du plaignant ayant trait à la place occupée par la lettre en question dans Le Quotidien, la représentante des mis-en-cause indique que l’espace accordé à la publication d’informations relève de la discrétion rédactionnelle des médias et journalistes. Elle insiste sur la liberté des éditeurs de publier ou non toute lettre provenant du public.
Me Mingarelli réunit en annexe du commentaire une série d’articles traitant de « l’Affaire Champagne », visant à démontrer l’impartialité du journal et son souci d’exprimer tous les points de vue. Elle ajoute que Le Quotidien a précédemment publié deux lettres de lecteurs dénonçant les propos de M. Champagne, et juge ainsi que le journal n’a pas de parti pris dans cette affaire.
Concernant le journaliste M. Roger Blackburn, mis en cause par le plaignant, la représentante affirme que l’article « constitue un rappel neutre et objectif des faits » et que le travail a été effectué « sans préjugé à l’égard des personnes concernées ». Le Quotidien et son journaliste ont cru approprié de publier la lettre de M. Champagne, au vu de l’intérêt public que celle-ci constituait.
Réplique du plaignant
Le plaignant n’a pas formulé de réplique.
Analyse
Le plaignant, M. Mario Baillargeon, accuse le journaliste M. Roger Blackburn et Le Quotidien d’avoir défendu les opinions homophobes de l’animateur de la station radiophonique CKRS, M. Louis Champagne, par un article et la publication d’une lettre ouverte de ce dernier dans l’édition du 12 mars 2007 du journal.
Il reproche en particulier au journal d’avoir accordé un espace trop important à cet événement en le traitant dans ses pages principales, au lieu de publier la lettre en cause dans le courrier des lecteurs. Par ce genre de traitement, le journaliste et Le Quotidien auraient manqué d’impartialité.
L’attention que les médias et professionnels de l’information décident de porter à un sujet particulier, le choix de ce sujet et sa pertinence relèvent de leur jugement rédactionnel. Nul ne peut dicter à la presse le contenu de l’information sans s’exposer à orienter l’information.
Dans le cas présent, les mis-en-cause ont traité la lettre ouverte de M. Louis Champagne comme une nouvelle, en regard de l’intérêt public qu’elle suscitait dans le cadre de « l’Affaire Champagne ».
En vertu de leur jugement rédactionnel, il appartient au journaliste et au média d’évaluer quel traitement journalistique accorder à un sujet. Il leur appartient aussi de déterminer l’espace à accorder à cette nouvelle dans les pages du journal. Le grief est rejeté.
Le plaignant invoquait également le manque d’impartialité de M. Roger Blackburn, indiquant que cette manière de traiter l’information ne faisait qu’appuyer les opinions de M. Louis Champagne. à ce sujet, le Conseil de presse estime que l’article rédigé par M. Roger Blackburn qui accompagne la lettre est tout à fait neutre. Le grief est rejeté.
Décision
Pour l’ensemble de ces raisons, le Conseil rejette la plainte de M. Mario Baillargeon contre le journaliste M. Roger Blackburn et Le Quotidien.
Analyse de la décision
- C03D Emplacement/visibilité de l’information
- C08A Choix des textes
- C13A Partialité