Plaignant
M. René Biron
Mis en cause
M. Luc Larochelle, journaliste; M. Maurice Cloutier, rédacteur en chef et le quotidien La Tribune
Résumé de la plainte
M. René Biron porte plainte contre le journaliste Luc Larochelle du quotidien La Tribune pour plusieurs manquements à l’éthique journalistique dans sa chronique, « Au royaume des pirates », publiée le 3 février 2007. Les reproches du plaignant visent des manquements à l’éthique journalistique en regard du respect de la vie privée et de la réputation, de même qu’en regard de la rigueur et de la pondération de l’information, de l’équilibre et de l’exhaustivité de l’information, ainsi que pour défaut de rectification de l’information.
Griefs du plaignant
NOTE
La chronique du journaliste Luc Larochelle a été rédigée dans un contexte de controverse au sujet de la location de chalets en contravention avec une réglementation municipale du Comté d’Orford. Le plaignant dans le dossier, M. René Biron, de même que onze autres de ses voisins, est impliqué dans un conflit ouvert avec M. René Green au sujet de cette location qui leur causerait des dérangements. Par ailleurs, M. Green est en même temps propriétaire du terrain sur lequel ces voisins circulent et stationnent pour avoir accès à leurs chalets respectifs. La querelle de voisins a conduit à deux procès visant à clarifier des droits antérieurs sur le terrain de M. Green. Par ailleurs, M. Biron a lui-même fait l’objet d’une plainte, de la part de M. Green, à l’Agence du revenu du Canada (ARC), pour laquelle il travaille, et qui a reconnu que M. Biron avait eu accès à des renseignements nominatifs de M. Green. La chronique contestée a été écrite à la suite d’une visite du journaliste à MM. Marcel Gagnon et René Green, pour constater la situation sur le terrain et prendre connaissance de documents provenant de l’ARC.
Griefs du plaignant
M. René Biron explique avoir acheté en 2001 un chalet au bord d’un lac, chalet enclavé et donc, sans chemin d’accès. Le stationnement et le droit de passage à ce chalet ont ensuite été niés par le propriétaire du terrain, engendrant un litige avec le plaignant et ses voisins. Ce propriétaire aurait plus tard raconté son histoire au journaliste mis en cause qui a rédigé un article sur le sujet, le 3 février 2007. Selon le plaignant, l’article intitulé « Au royaume des pirates » n’est basé que sur le point de vue d’une source unique et contreviendrait aussi au respect de la vie privée en même temps qu’il porterait atteinte à sa réputation. Pour M. Biron, l’information transmise manquait d’équilibre parce qu’elle ne reflétait qu’une seule version des faits.
Le plaignant trouve injuste que le journaliste n’ait pas dévoilé tous les détails de l’histoire alors qu’il avait en main la lettre que son employeur, l’ARC, avait antérieurement adressée à une personne ayant porté plainte contre lui. Selon M. Biron, non seulement cette histoire personnelle n’avait pas à se retrouver dans le journal, mais en plus « il n’aurait pas fallu inventer une histoire ». M. Biron explique : « il [le journaliste] avait en sa possession une lettre de mon employeur dont il a utilisé des extraits appuyant son histoire de pirate. Il va plus loin, il invente des passages. Vous verrez dans le document en question qu’il n’est jamais fait mention qu’une » barrière informatique a limité la consultation aux seuls renseignements nominaux » ». Pour lui, cette partie est de la pure invention. Le plaignant explique en outre que le texte cite la lettre de son employeur et termine sur les mots : « nom, numéro d’assurance sociale, etc. ». Le plaignant soutient que cet « etc. » n’est pas dans le texte intégral de la lettre et qu’il laisse croire que d’autres parties du dossier personnel ont aussi été consultées.
M. Biron reproche également au journaliste de ne pas avoir donné suite aux appels de l’ARC. Il explique qu’il avait déjà mentionné au journaliste qu’en raison des règles de confidentialité auxquelles il est tenu par ses fonctions, il ne pouvait pas lui donner d’explication, même s’il n’avait rien à se reprocher. Il ajoute qu’en raison des mêmes règles, il ne peut en dire plus au Conseil.
M. Biron reproche donc au chroniqueur des manquements à l’éthique journalistique en regard du respect de la vie privée et du respect de la réputation, de même qu’en regard de la rigueur et de la pondération de l’information, de l’équilibre et de l’exhaustivité de l’information ainsi que pour défaut de rectification de l’information.
Le plaignant joint à son envoi l’article visé par la plainte, copie de ses échanges de correspondance avec le journaliste, copie de la lettre de l’Agence du revenu du Canada (ARC) et copie d’échanges de correspondance entre un autre propriétaire de chalet du lac Leclerc, impliqué dans le différend avec le journaliste.
Commentaires du mis en cause
Commentaires de M. Luc Larochelle, journaliste :
En regard du contexte, le journaliste fait observer que les élus et les fonctionnaires de la municipalité du Canton d’Orford sont confrontés au dilemme d’appliquer ou non une réglementation municipale encadrant la location de chalets. Plus de 200 propriétaires ont été dénoncés comme étant en dérogation à cette réglementation et le nombre réel de citoyens affectés est estimé à 500. Selon le journaliste, il s’agit d’un enjeu de premier plan dans une région touristique comme Magog-Orford parce que plusieurs propriétaires comptent sur les revenus de location pour rencontrer leurs obligations hypothécaires. Le quotidien La Tribune a déjà fait état de cette situation au cours du mois précédant la publication de la chronique contestée. Cette chronique a été publiée la veille d’une importante réunion convoquée par la Chambre de commerce de Magog-Orford pour discuter des problèmes liés à la location des chalets.
Plus spécifiquement, M. Larochelle indique que les rapports tendus entre les voisins du lac Leclerc, dont le plaignant, sont au cŒur du conflit entourant la location de chalets. D’ailleurs, des articles de La Tribune des 10 et 15 janvier 2007, ainsi que le texte de sa chronique situaient MM. Green et Biron « comme des acteurs névralgiques dans le débat sur la location des chalets », identifiant même M. Biron comme « l’élément déclencheur dans toute cette polémique ». Ce serait à la suite de sa plainte que M. Green aurait décidé, à son tour, de dénoncer d’autres propriétaires louant des chalets.
M. Larochelle identifie deux allégations contre sa chronique : il n’aurait présenté qu’un seul point de vue sur le conflit entourant la location de chalets; et il aurait erronément rapporté les faits relatifs à l’enquête sur le comportement de M. Biron. Il répond aux deux reproches.
En ce qui a trait à celui « d’avoir colporté un seul point de vue », soit celui de M. Green, il répond que contrairement aux prétentions du plaignant, sa chronique établit certains faits relatifs au conflit, sans prise de position en faveur d’un groupe ou de l’autre. Il explique que la recherche effectuée en préparation de la chronique ne se limitait pas aux prétentions de M. Green, même s’il reconnaît lui avoir parlé. « Comme j’ai parlé à M. Biron », ajoute-t-il. Il dit avoir consulté la plainte des riverains adressée au conseil municipal, les deux jugements rendus par la Cour supérieure du Québec relatifs à leur conflit, avoir recueilli des informations auprès du directeur général de la municipalité et avoir eu des discussions avec un avocat sherbrookois copropriétaire de terrains contigus aux riverains enclavés du lac Leclerc. Sa recherche est donc, selon lui, plus élaborée que ce qu’évoque M. Biron.
M. Larochelle complète en disant que parallèlement à ce dossier, il effectuait à la même époque une vaste enquête sur les nouvelles valeurs municipales attribuées aux terrains convoités par le Gouvernement du Québec en vue de l’agrandissement du Parc national du Mont-Orford. Dans le cadre de cette enquête, il aurait couvert beaucoup de terrain, notamment dans le secteur du lac Leclerc. Il aurait donc rencontré des gens qui lui parlaient du dossier de la location des chalets, qui était très présent dans l’actualité régionale.
Le journaliste aborde ensuite le reproche concernant le passage de son article dévoilant l’enquête dont le plaignant a fait l’objet de la part de son employeur, l’Agence du revenu du Canada. M. Larochelle explique que sa chronique était appuyée par des documents crédibles, alors qu’au départ M. Biron a tout nié, y compris le fait qu’il y avait eu enquête le mettant en cause. à l’objection du plaignant voulant que le journaliste ne pouvait l’associer au document qu’il a fourni en preuve, parce que son nom n’y apparaît pas, M. Larochelle affirme qu’il n’y aurait aucun doute que la plainte déposée à l’Agence le ciblait puisqu’il avait en sa possession copie de deux autres documents faisant état de l’enquête sur M. Biron : d’abord la plainte déposée par M. Green, et ensuite une correspondance émanant de l’administrateur supérieur des affaires financières et sous-commissaire des Finances et administration. Le journaliste ajoute que M. Biron ne conteste d’ailleurs pas les propos rapportés. Donc, pour M. Larochelle, contrairement à ce qu’affirme le plaignant, le texte de sa chronique ne relève pas de l’invention.
Au sujet du reproche de ne pas avoir attendu un retour d’appel de l’ARC avant de publier sa chronique, M. Larochelle demande : « l’Agence aurait-elle dit davantage? » Selon lui, la correspondance relative à l’enquête menée sur M. Biron confirme trois points : l’existence d’une enquête; le fait que M. Biron a accédé à certains renseignements nominatifs de M. Green; le fait que « des mesures ont été prises pour assurer que la situation ne se reproduise plus ».
Faisant référence à la lettre de l’Agence que M. Biron a soumise au Conseil, le journaliste soutient que la première citation présentée dans sa chronique, extraite de ce document, situait le fondement de la plainte, et que dans le même paragraphe, la gravité du geste était clairement établie. Il explique : « Le lecteur apprend que la consultation a été limitée aux seuls renseignements nominaux (nom, numéro d’assurance sociale, etc.). Implicitement cela signifiait que M. Biron n’avait pas eu accès aux renseignements touchant les revenus personnels des plaignants. » M. Larochelle ajoute avoir appelé au bureau du directeur régional, le jeudi 1er février, en expliquant le travail de recherche entrepris et l’informant de la parution d’une chronique sur le sujet, le samedi suivant. Ayant laissé tous les numéros de téléphone pour le joindre, son appel a été référé au service des communications de l’Agence, qui lui a laissé un message, tard, vendredi après-midi, sur son répondeur au bureau, l’invitant à le rappeler, sans plus de précision.
Au sujet de la locution « etc. » qui, selon le plaignant, aurait été choisie pour « laisser croire qu’il y avait autre chose de consulté », le journaliste explique qu’il écourtait simplement une énumération qui se poursuivait avec d’autres renseignements comme « l’année de naissance, le prénom du conjoint, l’état civil et l’adresse ». M. Larochelle souligne que l’objet de sa chronique n’était pas le comportement professionnel formel de M. Biron, mais que « ces faits, entièrement fondés sur une preuve solide, furent relatés pour illustrer la tension entre les voisins ». Pour lui, il s’agissait d’un « complément d’information illustrant un niveau d’hostilité peu commun entre voisins ».
Le journaliste rappelle ensuite la nature d’une chronique et la latitude reconnue aux chroniqueurs, et affirme qu’en tout temps il a relaté les faits avec soin et rigueur. Il termine en disant comprendre la réaction du plaignant, mais que celui-ci fait une erreur en personnalisant le contenu de sa chronique « qui posait un regard plus large sur une problématique plus étendue et d’intérêt public ».
Commentaires de M. Maurice Cloutier, rédacteur en chef :
M. Cloutier rappelle d’abord que M. Biron est un acteur dans le dossier qui a fait l’objet d’une couverture depuis le 6 janvier 2007. à ce titre, le nom de M. Biron apparaît dans plusieurs articles, souvent en relation avec la querelle existant entre, ses voisins et M. René Green. Comme le dossier a pris une grande importance en mettant à jour une pratique répandue au Canton d’Orford et contraire à une réglementation municipale, il était normal d’accorder importance à ce dossier.
Le rédacteur en chef affirme que M. Larochelle est un journaliste chevronné avec une expérience enviable, et qu’il a effectué un travail honnête et sans préjugé à l’égard des personnes concernées. M. Cloutier ajoute que « M. Larochelle a bien rappelé les faits en cause et effectué les vérifications nécessaires avant de publier sa chronique […] ».
Selon M. Cloutier, les allégations de M. Biron ne sont pas fondées. Il fait observer que le plaignant se borne à parler de M. Larochelle comme d’un journaliste, sans jamais reconnaître son rôle de chroniqueur. Le rédacteur en chef insiste alors sur la latitude reconnue à la fonction de chroniqueur et note que M. Larochelle n’a pas pris position dans le débat, alors qu’il lui était loisible de le faire. En outre, lors des échanges de messages électroniques entre M. Biron et M. Larochelle, ce dernier a pris en compte les commentaires de M. Biron.
Sont annexés aux commentaires 17 articles sur le sujet, publiés par le quotidien La Tribune, entre le 6 janvier et le 31 mars 2007.
Réplique du plaignant
Le plaignant indique qu’il aimerait « apporter des commentaires sur des faussetés avancées » dans la réponse de M. Larochelle.
En ce qui a trait aux « voisins du lac Leclerc », le journaliste ferait des affirmations qui prouvent qu’il ne possédait pas son dossier lors de la rédaction de l’article en litige. Le plaignant en donne pour preuve la phrase : « En fait, le conflit entre M. Green et les riverains, dont M. Biron, est l’élément déclencheur dans toute cette polémique ».
Pour M. Brion, au contraire, « si le journaliste avait rencontré l’autre partie (nous) il aurait compris que la plainte initiale en juin 2005 venait de 10 riverains du lac Leclerc dont 2 n’avaient aucun litige avec M. Green mais n’étaient plus capables de subir ce commerce en zone résidentielle ».
Au sujet du grief voulant que le journaliste n’ait utilisé qu’une seule source, le journaliste tenterait de créer une diversion en nommant les étapes suivies pour sa collecte d’information. Le journaliste aurait bien « consulté » le plaignant, mais simplement pour le questionner « sur une enquête interne ». Il n’aurait jamais tenté d’en savoir plus sur ce que les riverains vivaient à cause de la location des chalets. Le plaignant reconnaît toutefois que le journaliste a bien rencontré M. Marcel Gagnon « qui lui a généreusement fait visiter les lieux ». Mais M. Biron dénonce le fait que la visite du journaliste a été faite, au départ, dans la voiture du conseiller municipal, M. Jean-Guy Beaulieu, ami de M. Green. Le plaignant affirme que c’est le conseiller « qui a tout organisé pour ce qui est de la visite de M. Larochelle vers M. Green ».
En ce qui concerne l’enquête de l’Agence du revenu du Canada, le plaignant reconnaît aussi avoir nié l’existence d’une lettre le concernant, mais explique qu’il n’avait jamais eu une telle lettre entre les mains. Il ajoute que le journaliste omet de mentionner qu’il ne pouvait répondre à ses questions et qu’il lui avait mentionné que c’était en raison de la confidentialité des dossiers à laquelle il est tenu. « J’aurais perdu mon emploi si j’avais fait cela », explique le plaignant. C’est pourquoi il a référé le journaliste au bureau du directeur.
En ce qui a trait à la défense du journaliste invoquant la nature de la chronique, le plaignant estime que « si M. Larochelle a le droit en tant que « chroniqueur » de dire des faussetés et cacher des faits, […] il a tous les droits ». Le plaignant refuse de croire à cette immunité. Par ailleurs, le plaignant répond à M. Cloutier que M. Larochelle est un bon journaliste avec une bonne réputation et que personne ne met ça en doute. Mais il ajoute que la démarche journalistique, dans l’article en question, n’a pas été respectueuse de la déontologie.
Analyse
Le plaignant déplorait qu’une décision de son employeur se soit retrouvée sur la place publique, contrevenant ainsi au principe du respect de la vie privée.
Comme l’a maintes fois rappelé le Conseil, la chronique, le billet et la critique sont des genres journalistiques qui laissent à leurs auteurs une grande latitude dans le traitement d’un sujet d’information. Ils permettent aux journalistes qui les pratiquent d’adopter un ton polémiste pour prendre parti et exprimer leurs critiques, dans le style qui leur est propre, même par le biais de l’humour et de la satire. C’est dans ce contexte qu’a été publiée, sous le titre « Au royaume des pirates », la chronique contestée par le plaignant.
Après examen, le Conseil a considéré que, comme l’événement évoqué dans la lettre de l’Agence du revenu du Canada (ARC) concernait la mésentente entre deux protagonistes impliqués dans le différend rapporté dans l’article, le sujet était ainsi d’intérêt public. Conformément aux principes journalistiques, le chroniqueur pouvait donc légitimement y faire référence.
Par ailleurs, un autre principe apparaissant au guide Droits et responsabilités de la presse du Conseil indique que les auteurs de chroniques, de billets et de critiques ne sauraient se soustraire aux exigences de rigueur et d’exactitude et qu’ils doivent éviter, tant par le ton que par le vocabulaire qu’ils emploient, de donner aux événements une signification qu’ils n’ont pas ou de laisser planer des malentendus qui risquent de discréditer les personnes ou les groupes; et s’ils peuvent dénoncer avec vigueur les idées et les actions qu’ils réprouvent, porter des jugements en toute liberté, rien ne les autorise cependant à cacher ou à altérer des faits pour justifier l’interprétation qu’ils en tirent.
L’analyse des explications et des documents des parties a révélé qu’en évoquant la possibilité que le plaignant ait eu l’intention de vérifier si M. Green déclarait des revenus de location, le journaliste n’induisait pas une interprétation personnelle, puisque cette idée était évoquée dans la plainte déposée à l’ARC contre M. Biron. Toutefois, comme la réponse à cette plainte indiquait clairement que M. Biron n’avait jamais eu accès à autre chose qu’à des renseignements nominatifs, le Conseil a estimé que la formulation interrogative utilisée dans la chronique pouvait laisser une équivoque sur la conduite du plaignant et ainsi n’était pas complètement conforme aux faits.
Selon le plaignant, la chronique contestée n’avait qu’une source unique, et l’information transmise était peu équilibrée parce qu’elle ne reflétait qu’une seule version des faits.
Pour sa défense, le journaliste a fait la liste de ses démarches et des sources consultées avant la rédaction de sa chronique. Il aurait non seulement examiné la situation des résidents du lac Leclerc, mais aussi celle d’autres personnes dans la région aux prises avec la même situation de location illicite. Il est donc exact que ses sources étaient diversifiées.
Mais, dans le contexte de la plainte, c’est moins à l’article en général que s’adressait ce grief qu’à la partie qui concerne directement M. Biron, soit la question de la consultation des dossiers de l’ARC. Pour le plaignant, comme il était soumis à une obligation de confidentialité et ne pouvait répondre aux questions du journaliste, il aurait souhaité que quelqu’un de son bureau, attitré à cette fonction, puisse le faire. En tirant des conclusions sans parler à quelqu’un de l’ARC, le journaliste aurait commis une faute déontologique.
Pour sa part, le journaliste considérait qu’avec les informations en sa possession, il en avait assez pour tirer les conclusions évoquées dans sa chronique. Or, un principe général énoncé au guide déontologique du Conseil veut qu’un professionnel doive prendre tous les moyens à sa disposition pour s’assurer de la fiabilité de ses sources et pour vérifier, auprès d’autres sources indépendantes, l’authenticité des informations qu’il en obtient. Or, la première source du document était M. Green. Si, pour le chroniqueur, le plaignant pouvait ne pas représenter à ce moment « une source indépendante », il aurait dû s’assurer ailleurs de la véracité ou de l’authenticité du document et de l’ensemble des faits.
Un autre reproche formulé par le plaignant était à l’effet qu’en faisant référence à la lettre de son employeur, le journaliste avait « inventé des passages » et notamment avait ajouté la notion de « barrière informatique » non mentionnée dans la lettre de l’ARC. Comme les mots « barrière informatique » n’apparaissaient pas nommément dans la lettre, et comme d’autres raisons légitimes pouvaient expliquer la consultation du fichier informatique, le Conseil a estimé que l’expression utilisée allait un peu trop loin dans les circonstances.
En ce qui a trait à l’utilisation de la locution « etc. », qui aurait indiqué que d’autres documents avaient été consultés, le Conseil n’a pas souscrit à l’interprétation du plaignant sur le sens qu’aurait pu induire son utilisation à la fin de l’énumération des renseignements nominatifs, et il a rejeté le grief.
Enfin, pour ce qui est de la demande de rectification présentée par le plaignant, devant l’insistance de ce dernier, le journaliste aurait pu, dans les jours suivants, compléter l’information et refléter plus fidèlement la lettre à la source du grief.
Décision
Pour l’ensemble de ces raisons, le Conseil de presse retient partiellement la plainte sur les aspects précisés, contre le journaliste M. Luc Larochelle et le quotidien La Tribune.
Analyse de la décision
- C02C Accorder un suivi à une affaire
- C12A Manque d’équilibre
- C12B Information incomplète
- C12C Absence d’une version des faits
- C13B Manipulation de l’information
- C14A Sensationnalisme/exagération/insistance indue
- C16D Publication d’informations privées
- C17F Rapprochement tendancieux
- C17G Atteinte à l’image
- C19A Absence/refus de rectification
Date de l’appel
27 May 2008
Appelant
M. René Biron et La Tribune
Décision en appel
La commission d’appel du Conseil de presse du Québec a étudié l’appel que vous avez interjeté relativement à la décision rendue par le comité des plaintes et de l’éthique de l’information dans le dossier cité en titre.
Après examen, les membres de la commission ont conclu à l’unanimité de maintenir la décision rendue en première instance.