Plaignant
M. Luke De Stéphano, directeur général et copropriétaire; Mme Cécile D’Amour, administratrice et copropriétaire et le Centre de Ski Mont Rigaud
Mis en cause
M. Yanick Michaud, journaliste; Mme Carole Marcoux, rédactrice en chef; Mme Angèle M. Prévost, directrice générale et éditrice et l’hebdomadaire L’étoile
Résumé de la plainte
M. Luke De Stéphano et Mme Cécile D’Amour, copropriétaires du Centre de Ski Mont Rigaud, portent plainte contre le journaliste M. Yanick Michaud et l’hebdomadaire L’étoile, pour avoir nui à la réputation de leur Centre en diffusant des informations qu’ils jugent mensongères et non vérifiées, dans un article publié dans l’édition du 14 mars 2007.
Griefs du plaignant
Les plaignants, M. Luke De Stéphano et Mme Cécile D’Amour, rappellent d’abord les faits ayant conduit à la publication de l’article du journaliste M. Yanick Michaud, et en conséquence, à sa plainte auprès du Conseil de presse. M. De Stéphano explique qu’à l’été 2006, lui et Mme D’Amour, propriétaires du Centre de Ski Mont Rigaud, ont accepté de louer une partie de leurs installations pour la tenue d’une compétition de ski alpin dans le cadre des Jeux olympiques spéciaux du Québec l’hiver suivant. Il précise qu’il avait alors été convenu avec les organisateurs de cette compétition que le public ne pourrait avoir accès aux pentes pour des raisons de sécurité.
Les plaignants reprochent à M. Michaud d’avoir écrit, dans son article du 14 mars 2007, que les proches des athlètes participant à la compétition de ski alpin « ont été confinés au chalet du Mont Rigaud par les propriétaires et ont même été menacés de disqualification et de renvoi ».
Le journaliste citait aussi les propos d’une proche d’une compétitrice, concernant les propriétaires du Centre de Ski : « ils ont dit d’arrêter de nous plaindre, sinon la compétition serait annulée et qu’ils nous renverraient au mont Saint-Bruno ».
Les plaignants indiquent qu’ils « n’ont jamais fait une telle déclaration ». Le journaliste leur aurait attribué ces propos et ce comportement à tort, sans vérifier ses sources. En outre, les plaignants reprochent au journaliste d’avoir gravement nui à leur réputation et à celle du Centre de Ski Mont Rigaud par la publication de cet article.
M. De Stéphano expose également dans sa plainte qu’il a entrepris différentes démarches auprès de la rédaction du journal L’étoile afin d’obtenir la publication d’un rectificatif. Il explique qu’il a tout d’abord contacté M. Michaud, journaliste, le lendemain de la parution de l’article, soit le 15 mars 2007. Celui-ci lui aurait assuré qu’un rectificatif allait paraître dans une édition ultérieure. En l’absence de publication d’un tel rectificatif, M. De Stéphano contacte à nouveau la rédaction le 6 avril 2007. Dans cette conversation téléphonique, Mme Marcoux, rédactrice en chef, lui aurait affirmé que les informations rapportées dans l’article de M. Michaud étaient véridiques et qu’aucun rectificatif ne serait publié. M. De Stéphano indique avoir également eu une conversation avec Mme Carole Tessier, directrice des ventes des Hebdos du Suroît, le 4 mai 2007. Celle-ci certifiait alors que les organisateurs de la compétition avaient prononcé les paroles rapportées dans l’article, les vendredi 9 et samedi 10 mai. Les propriétaires seraient, selon elle, responsables des propos tenus alors et le journal était parfaitement en droit de les rapporter.
En annexe de leur plainte, les plaignants joignent un échange de courriels de M. Grégory McKenna, directeur de la compétition de ski alpin des Jeux olympiques spéciaux du Suroît, avec les mis-en-cause. M. McKenna tenait à exprimer dans ses courriels son approbation envers les mesures de sécurité appliquées par les responsables du Centre de Ski.
Commentaires du mis en cause
Commentaires de Mme Carole Marcoux, rédactrice en chef :
Mme Marcoux joint à son commentaire un erratum publié dans l’édition du 9 mai 2007 du journal L’étoile. Elle affirme que celui-ci rectifie l’article du 14 mars 2007. Elle indique également que le journaliste, M. Yanick Michaud, a eu une conversation téléphonique avec le plaignant M. De Stéphano la veille de la publication de cet erratum. M. De Stéphano l’aurait alors informé de sa décision de soumettre une plainte au Conseil de presse.
Commentaires de Mme Angèle M. Prévost, directrice générale et éditrice :
Mme Prévost dit avoir rencontré Mme Marcoux, rédactrice en chef du journal, ainsi que Mme Tessier, directrice des ventes aux Hebdos du Suroît, toutes deux présentes sur les lieux de la compétition, la première, le dimanche 11 mars, et la seconde, toute la fin de semaine durant laquelle se tenaient les Jeux. Elle affirme que ces deux personnes ont pu témoigner de la frustration palpable des familles des athlètes lors de ces Jeux, et que cette atmosphère a été décrite avec justesse dans l’article rédigé par M. Michaud.
Mme Prévost affirme aussi que l’article était pleinement justifié par le devoir que s’est fait l’hebdomadaire d’encourager et soutenir les personnes atteintes d’handicaps, telles celles ayant participé aux compétitions organisées dans le cadre des Jeux olympiques spéciaux du Québec. Mme Prévost estime que l’équipe du journal a laissé « le bénéfice du doute au Centre de Ski Mont Rigaud, en publiant un erratum ». Ainsi, d’après elle, « l’événement est passé et clos ».
La directrice du journal relève que des familles des jeunes handicapés participant aux Jeux ont été déçues de l’accueil et de l’organisation sur le site appartenant au Centre de Ski Mont Rigaud. Deux parents, Rachel Giguère et Dominique Leclerc, l’attestent dans la copie d’un courriel qu’elle joint à son commentaire. Mme Prévost annexe également un courriel de M. Richard Tessier, entraîneur de ski alpin des Jeux olympiques spéciaux du Québec exprimant sa déception quant à l’organisation de la compétition de ski alpin sur le site appartenant au Centre de Ski. Une lettre de Mme Carole Tessier, directrice des ventes des Hebdos du Suroît, présente aux Jeux du 9 au 11 mars, complète les annexes du commentaire. Elle affirme dans cette lettre que des parents lui ont raconté avoir eu des discussions avec les propriétaires du Centre de Ski le samedi 10 mars, et qu’elle a vu, le dimanche 11 mars, des parents discuter avec « des personnes soit de l’organisation des Jeux ou du Centre de Ski ».
Réplique du plaignant
Un des plaignants, M. De Stéphano, indique dans la réplique avoir bien pris connaissance de l’erratum publié dans l’édition du 9 mai 2007. Cependant, il soulève que « le contenu de l’erratum ne répond pas aux objets de notre plainte, principalement au fait que le journaliste attribue aux propriétaires de la station des propos non fondés et complètement erronés ».
Analyse
M. Luke De Stéphano et Mme Cécile D’Amour, propriétaires du Centre de Ski Mont Rigaud, portent plainte contre le journal L’étoile et le journaliste M. Yanick Michaud pour avoir rapporté des informations et des propos erronés à leur sujet dans un article relatif à la tenue des Jeux olympiques spéciaux du Québec à Salaberry-de-Valleyfield en mars 2007.
Le contenu de l’article indiquait que les propriétaires du Centre de Ski avaient confiné des familles de participants aux Jeux à l’intérieur du chalet du Centre, et les avaient menacés de renvoi et de disqualification. Le témoignage d’une proche d’une compétitrice venait étayer ces affirmations.
Les propriétaires du Centre de Ski affirment qu’ils n’ont jamais eu le comportement décrit par le journaliste et qu’ils n’ont jamais fait les déclarations qui leur sont attribuées dans le témoignage rapporté dans l’article. De leur côté, les mis-en-cause affirment que les informations publiées sont véridiques.
Le guide déontologique du Conseil prévoit que les journalistes ont le devoir de livrer une information complète, rigoureuse et conforme aux faits et aux événements.
Après examen et devant les affirmations contradictoires des deux parties, le Conseil ne peut statuer quant à l’exactitude des informations contenues dans l’article. Dans cette situation, il est contraint de rejeter le grief.
Les plaignants invoquaient aussi que leur version des faits n’apparaissait pas dans l’article de M. Michaud. Les informations rapportées dans l’article ainsi que la personne interrogée par le journaliste affirment que ce sont les propriétaires qui ont agi de façon cavalière durant la compétition. Mais les propriétaires n’ont pas eu la possibilité de donner leur version des événements. L’équilibre de l’information s’en trouverait altéré.
Si l’information fait nécessairement l’objet de choix, ceux-ci doivent être faits dans un souci d’équité. Si les propos rapportés par le journaliste ont pu être de bonne foi attribués par erreur aux propriétaires, cette information aurait pu être rapidement corrigée après vérification auprès d’eux ou à la suite de leurs premières interventions auprès de la direction. Le grief est donc retenu.
Les plaignants jugent finalement que le rectificatif publié par L’étoile était insatisfaisant : l’erratum ne mentionnant pas que les propriétaires n’avaient jamais tenu les propos rapportés dans l’article; ce reproche étant l’objet initial de la plainte.
Le guide déontologique du Conseil prévoit que les rétractations et les rectifications « devraient être faites de façon à remédier pleinement et avec diligence au tort causé ».
Dans le cas présent, l’erratum publié par le journal L’étoile corrige certains faits relatifs à la tenue des compétitions des Jeux olympiques spéciaux et comprend des excuses à l’attention des propriétaires du Centre. Le Conseil estime toutefois que le rectificatif est incomplet puisqu’il ne précise pas que les propos en litige ont été injustement attribués aux plaignants. Il a de plus été publié dans un délai indu, soit deux mois après la publication de l’article.
Décision
Pour ces motifs, le Conseil retient partiellement la plainte de M. Luke De Stéphano et de Mme Cécile D’Amour à l’encontre du journaliste M. Yanick Michaud et de l’hebdomadaire L’étoile.
Analyse de la décision
- C11B Information inexacte
- C11G Rapporter des propos/témoignages erronés
- C12C Absence d’une version des faits
- C17G Atteinte à l’image
- C19B Rectification insatisfaisante
- C19C Délai de rectification