Plaignant
Mme Geneviève Manseau
Mis en cause
Mme Marie-ève Vaillancourt, ajointe aux communications et à la direction des études, organisation de l’enseignement, Cégep de Sept-îles et la revue annuelle Littoral
Résumé de la plainte
Mme Geneviève Manseau porte plainte contre la revue Littoral datée d’automne 2007, pour avoir publié des propos outranciers à son égard dans la page « Opinion ». Elle reproche à la rédaction de les avoir publiés en sachant que ces textes étaient haineux à son endroit. De plus, elle déplore ne pas avoir eu de droit de réplique.
Griefs du plaignant
La plaignante reproche à la rédaction de la revue Littoral d’avoir publié des textes haineux, constituant des attaques personnelles à son endroit. Elle reproche également aux mis-en-cause de ne pas lui avoir accordé de droit de réplique.
La plaignante met en cause l’article « Quelques précisions », publié à l’automne 2007. Il s’agit de deux textes d’opinion en réaction à l’article qu’elle avait elle-même écrit dans l’édition précédente, sous le titre « Rêve interdit ».
La plaignante qualifie d’haineux et d’attaques personnelles à son endroit ces deux textes.
Elle reproche à la rédaction d’avoir été consciente, au moment de la publication, de la teneur haineuse des propos signés par MM. Desgagné et Gagnon. Elle s’appuie sur l’introduction qui coiffe l’article en cause, où la rédaction précise notamment qu’elle n’acceptera pas de réplique de quiconque.
Enfin, la plaignante déplore cette absence de droit de réplique.
Commentaires du mis en cause
Commentaires de Mme Marie-ève Vaillancourt, comité directeur de la revue Littoral :
Tout d’abord, les mis-en-cause estiment qu’il leur était légitime de publier des réactions « dans la même veine tonique […] que le texte qui les a suscitées ». Ils ajoutent que les textes « s’inscrivaient en ligne droite avec les « attaques collectives » de madame Manceaux. De plus, ils ne sont pas « haineux » mais constituent des répliques vives à un article qui ne ménageait pas le lecteur nord côtier. »
Ensuite, la partie mise-en-cause précise que la plaignante ne leur a pas demandé de droit de réplique.
La rédaction a indiqué vouloir clore le débat dans l’introduction à l’article en cause pour que « la section Opinion de [la] revue [ne devienne pas] la rubrique d’un sujet unique ».
La plaignante avançait que « l’injure n’est pas, n’a jamais été ni ne sera jamais un argument ». Les mis-en-cause répondent qu’ils se sont eux-mêmes sentis insultés par le premier texte de la plaignante, qu’ils ont publié, y trouvant de la « condescendance, un soupçon de mépris ».
Lorsque la plaignante interroge la responsabilité de la rédaction dans la publication des répliques, qu’elle juge haineuses, les mis-en-cause rétorquent qu’ils ont atténué les propos fournis par les deux auteurs. Ils ont tout de même tenu à publier ces répliques au nom de la liberté d’expression.
Réplique du plaignant
La plaignante transmet la chronologie de la communication avec la revue : le 19 juin 2007, la mise en cause aurait envoyé un courriel à la plaignante lui disant que son texte avait suscité de « vives réactions ». à la suite de cette information, la plaignante estime qu’elle aurait dû pouvoir répliquer afin que les points de vue divergents soient publiés dans la même édition.
Concernant les auteurs des répliques à l’endroit de son texte, la plaignante estime qu’il s’agit « d’auteurs défendant des intérêts d’auteurs et non de représentants du public lecteur qu’interpellait [son] article ».
La plaignante estime que les propos des deux articles sont haineux à son endroit. Elle cite deux passages précisément :
– « Nous comprenons tout de même que [Manceau] se sente comme une [bête] africaine exilée en milieu étranger […]. Nous ne pouvons que souhaiter à cette [bête] de s’empresser de quitter cette région. »
– « Comme celle-ci [la Compagnie Fer et Titane de Havre Saint-Pierre] s’apprête à bâtir sur la lune une base permanente, nous pourrions leur demander qu’ils réservent un siège dans l’une de leurs navette […]. Comme ça, vous seriez beaucoup plus près de mars où on pourrait vous larguer. »
La plaignante remet ensuite en cause le fait que les auteurs prétendent parler au nom d’un groupe plus large, « donnant l’impression que la pensée unique règne en maîtresse incontestée parmi les personnes préoccupées de littérature et de culture sur la Côte-Nord ».
La plaignante précise que l’expression utilisée « langue approximative » ne s’adressait pas aux auteurs des répliques.
La plaignante juge que les mis-en-cause ont atténué les propos des auteurs avant publication, car ils savaient qu’ils étaient de nature haineuse et insultante. Ce serait d’ailleurs la raison pour laquelle ils ont écrit une introduction pour se dégager de ces textes, tout en précisant qu’ils ne publieraient rien à ce sujet par la suite. La plaignante ajoute qu’en fermant le débat à ce moment là, le comité directeur de la revue « cautionne ces attaques et se lave les mains d’avance du tort qu’elles peuvent causer [à la plaignante] ».
La plaignante invoque un article du guide de déontologie du Conseil de presse concernant la responsabilité des médias de tout ce qu’ils publient. Elle s’interroge alors sur la motivation de cette publication, dans la mesure où la rédaction se serait sentie insultée par l’article de la plaignante à la première lecture.
La plaignante rappelle que son texte était un article d’opinion, présenté comme tel, et qu’elle avait choisi de faire le lien entre la littérature et la culture à Sept-îles. La plaignante souligne qu’elle évoquait « le public » et ne visait pas du tout le comité directeur de la revue en particulier. Selon elle, elle ne faisait aucunement « d’attaques collectives », mais un appel à la réflexion.
Analyse
La plaignante reproche au comité directeur de la revue annuelle Littoral, d’avoir publié des lettres comprenant des propos insultants et injurieux à son égard, en réponse à un texte publié dans la même revue lors de l’édition précédente. Elle reproche aussi, aux mis-en-cause, de ne pas lui avoir accordé de droit de réplique face à ces propos.
Grief 1 : publication de propos insultants et injurieux
La plaignante reproche à la rédaction de la revue Littoral d’avoir publié deux lettres de lecteurs comprenant des propos insultants, injurieux et l’attaquant personnellement.
En la matière, le guide de déontologie du Conseil de presse stipule : « Les médias doivent veiller à ce que les lettres des lecteurs ne véhiculent pas des propos outranciers, insultants ou discriminatoires pouvant être préjudiciables à des personnes ou à des groupes. » DERP, p. 38
De plus, contrairement aux arguments de la partie mise en cause évoquant la responsabilité des propos publiés, le guide de déontologie exprime clairement que « les organes de presse étant responsables de tout ce qu’ils publient ou diffusent, il en va de même en regard de l’information qui leur provient du public pour publication ou diffusion dans les espaces et les temps d’antenne réservés à cette fin ». DERP, p. 37
Après analyse, le Conseil estime que les deux lettres critiquées exprimaient une réaction ferme et passionnée de leurs auteurs au texte de la plaignante, mais demeuraient néanmoins dans les limites du journalisme d’opinion. Il n’y a pas de faute déontologique à publier, par exemple : « Jusqu’à hier, je ne vous percevais que comme une personne snob, arrogante [et] outrecuidante. Quelle ne fut ma surprise, en vous lisant, de réaliser que vous prouviez toutes ces assertions! »
Ainsi, le Conseil de presse rejette le grief pour publication de propos insultants et injurieux.
Grief 2 : absence de droit de réplique
Ensuite, la plaignante reproche aux mis-en-cause d’avoir coiffé la page d’opinion des lecteurs, d’une introduction expliquant que le sujet ne serait pas abordé de nouveau dans leurs pages. Elle aurait aimé répliquer aux lettres de lecteurs qu’elle juge insultantes et injurieuses à son égard.
En effet, dès l’introduction les mis-en-cause écrivent qu’après la lettre de la plaignante dans l’édition précédente, et la réplique de deux opposants dans celle mise en cause, le « débat est clos ».
En matière de déontologie journalistique, le guide du Conseil de presse stipule que « le public n’a pas accès de plein droit aux pages des médias écrits ou aux ondes des stations de radios et de télévision. Cependant, la presse a le devoir d’en favoriser l’accès à ses lecteurs, auditeurs ou téléspectateurs ». DERP, p. 37
Dès lors, le Conseil estime que les mis-en-cause n’ont pas commis de faute déontologique en refusant un droit de réplique à la plaignante et en mettant fin au débat que cette dernière avait commencé.
Ainsi, le Conseil de presse rejette le grief pour refus de droit de réplique.
Décision
Au vu de ce qui précède, le Conseil de presse rejette la plainte de Mme Geneviève Manseau contre la revue annuelle Littoral.
Analyse de la décision
- C09A Refus d’un droit de réponse
- C17E Attaques personnelles