Plaignant
M. Michel Laroche
Mis en cause
Mme Isabelle Guilbeault, commentateur-interviewer et la Société Radio-Canada – Québec
Résumé de la plainte
M. Michel Laroche reproche à Mme Isabelle Guilbeault d’avoir pris part à une vidéo, diffusée sur un site Internet, aux visées politiques avouées et ce, alors qu’elle exerce parallèlement des fonctions journalistiques pour la Société Radio-Canada.
Griefs du plaignant
De l’avis de M. Laroche, Mme Isabelle Guilbeault aurait enfreint ses obligations d’ordre déontologique en prenant part à une vidéo que l’on retrouve sur le site Internet « Unissons nos voix ». Elle aurait ainsi exprimé explicitement ses vues politiques.
Commentaires du mis en cause
Commentaires de Mme Isabelle Guilbeault, commentateur-interviewer
Mme Isabelle Guilbeault explique, en premier lieu, qu’elle est commentateur-interviewer pour la SRC, ce que confirme la copie de son contrat d’embauche qu’elle joint à ses commentaires. Elle ajoute que son titre exact est chroniqueuse culturelle à l’émission matinale de la Première Chaîne. à son avis, la confusion entourant ses fonctions tient en ce qu’elle a été identifiée comme étant journaliste sur le site Internet « Unissons nos voix » et que, bien qu’elle ait demandé à ce que l’erreur soit corrigée, ce ne fut pas le cas.
Mme Guilbeault explique ensuite qu’elle pensait que le site Internet dont il est question visait à protester contre les compressions dans le milieu culturel. Elle ajoute qu’elle souhaitait par ses propos lancer un message à ceux et celles qui s’en prennent aux artistes, pour leur expliquer que tout le monde profite des subventions culturelles.
Elle joint à sa plainte un message de M. Richard Ouellet, auditeur de Radio-Canada, qui soutient son point de vue.
Réplique du plaignant
Selon M. Laroche, ce n’est pas parce que Mme Guilbeault détient le titre de commentateur-interviewer qu’elle n’est pas journaliste. Pour appuyer son argument, il fait référence à la définition du terme « journaliste » présentée à l’article 1 du guide de déontologie de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec.
Le plaignant ajoute que, même si Mme Guilbeault ne fait à aucun moment référence à la politique dans la vidéo, l’objectif du site www.unissonsnosvoix.ca est d’encourager les gens à ne pas voter conservateur. D’après lui et en raison du mandat de ce site Internet, la mise-en-cause se trouvait en conflit d’intérêts.
Commentaires à la réplique
Commentaires à la réplique de M. Claude-René Piette, chef des programmes pour Radio-Canada Québec :
M. Piette précise que la Société Radio-Canada a publiquement déclaré, en octobre 2008, qu’elle s’engageait à respecter l’intitulé des « Normes et pratiques journalistiques » et qu’elle attendait de ses employés qu’ils tiennent le même engagement.
Il ajoute que Mme Guilbeaut était absente de son travail au moment de son intervention sur le site Internet et qu’il s’agissait d’une absence planifiée au préalable. M. Piette précise que la mise-en-cause n’est pas revenue au travail depuis ces événements et conclut que la discussion à laquelle il sera procédé à son retour est de l’ordre des relations de travail.
Analyse
M. Michel Laroche reproche à Mme Isabelle Guilbeault d’avoir pris part à une vidéo, diffusée sur un site Internet dont les visées politiques sont avouées et ce, alors qu’elle exerce des fonctions journalistiques pour la Société Radio-Canada – Québec. La mise-en-cause répliquait, quant à elle, être chroniqueuse et non journaliste et affirmait ignorer les visées partisanes du site Internet sur lequel elle a exprimé des propos apolitiques.
Grief 1 : conflit d’intérêts
Le plaignant invoque un grief du ressort du conflit d’intérêts. Sur cette même question, le guide de déontologie du Conseil, les Droits et responsabilités de la presse précise que : « les entreprises de presse et les journalistes doivent éviter toute situation qui risque de les faire paraître en conflit d’intérêts, ou donner l’impression qu’ils ont partie liée avec des intérêts particuliers ou quelque pouvoir politique ». DERP, p. 24
Le Conseil ajoute que, même si l’information transmise respecte les critères d’intégrité et d’impartialité, « il est important de souligner que l’apparence de conflit d’intérêts s’avère aussi préjudiciable que les conflits d’intérêts réels et qu’afin de préserver leur crédibilité professionnelle, les journalistes sont tenus à un devoir de réserve quant à leur implication personnelle dans diverses sphères d’activités sociales, politiques qui pourrait interférer avec leurs obligations de neutralité et d’indépendance ». DERP, p. 25
Après analyse, le Conseil constate que, bien que Mme Guilbeault soit, au titre de son contrat avec la Société Radio-Canada, engagée en tant que commentateur-interviewer, elle exerce des fonctions de chroniqueuse culturelle et que, ce faisant, elle exerce des fonctions qui sont pleinement soumises aux règles de déontologie journalistique. Par ailleurs, puisque les propos de la mise-en-cause, relatifs aux subventions octroyées par le gouvernement au milieu culturel, furent publiés au sein d’un média partisan, Mme Guilbeault se liait ainsi à un groupe qui défendait activement un intérêt politique et se plaçait, par conséquent, en apparence de conflit d’intérêts.
Décision
Au vu de ce qui précède, le Conseil de presse retient la plainte de M. Michel Laroche contre Mme Isabelle Guilbeault pour apparence de conflit d’intérêts.
Analyse de la décision
- C22B Engagement politique