Plaignant
Commission scolaire de l’Estuaire et Mme Ginette Côté, présidente
Mis en cause
M. Jean-Philippe Pineault, journaliste; M. Donald Charette, directeur de l’information et le quotidien Le Journal de Québec
Résumé de la plainte
Mme Ginette Côté porte plainte contre un article intitulé « Des commissaires radins », paru dans l’édition du 30 juin 2008, du Journal de Québec. Ce dernier serait truffé d’informations inexactes, incomplètes et tendancieuses qui auraient eu pour but de miner la crédibilité et la confiance du public envers les commissions scolaires.
Griefs du plaignant
Me François Boisjoli, le représentant de Mme Côté explique que, conformément aux directives du Conseil de presse, elle a tenté d’obtenir réparation auprès du Journal de Québec en lui faisant parvenir une mise en demeure qui est restée sans réponse.
Il précise que, dans l’encadré de l’article en cause, sous le titre « Dépenses », on pouvait lire les propos suivants : « L’alcool accompagne pratiquement tous les repas remboursés à la présidente de la Commission scolaire de l’Estuaire. Vin, bière, Virgin caesar, café brésilien : différentes boissons alcoolisées figurent sur la majorité des factures attribuées à Ginette Côté. » De son avis, cette allégation portait directement et injustement atteinte à la réputation de sa cliente et ce, puisqu’il ne s’agissait pas d’une information complète et pleinement objective. à aucun endroit dans l’article il ne serait fait mention du fait que les dépenses en question sont des allocations de type per diem. Pour Me Boisjoli, exposer le détail des factures n’était nullement pertinent si l’on tient compte de l’existence du per diem.
Il conclut que l’article est tendancieux et avait pour but de discréditer les commissions scolaires aux yeux des lecteurs. Il dit déplorer le manque, selon lui flagrant, d’objectivité du journaliste et souhaite qu’une rectification soit publiée dans les meilleurs délais.
Commentaires du mis en cause
Commentaires de Me Bernard Pageau, affaires publiques :
Le représentant du mis-en-cause explique que ce dernier a pu prendre connaissance des comptes de dépenses des présidents des commissions scolaires grâce à la Loi sur l’accès à l’information.
Me Pageau ajoute que, bien que la plaignante reproche au journaliste d’avoir atteint à sa réputation, le Conseil de presse ne traiterait pas, selon lui, des questions d’atteinte à la réputation qui sont du ressort des tribunaux exclusivement.
Il explique que l’article avait pour objectif d’éclairer le fait que les présidents de plusieurs commissions scolaires réclament toutes leurs dépenses. Selon lui, Mme Côté ne se plaint pas du contenu comme tel du texte, mais du fait qu’il n’ait pas été précisé qu’elle avait droit à un per diem. Elle ne fournit néanmoins aucune preuve établissant cette prétention. Me Pageau ajoute que, contrairement à ce que pense cette dernière, il était pertinent que soit indiqué le détail des factures, dans l’article, puisque les contribuables doivent connaître l’objet des dépenses des présidents des commissions scolaires.
Le représentant du mis-en-cause mentionne que l’article n’a pu manquer d’objectivité, puisqu’il est tiré de copies des comptes de dépenses des présidents des commissions scolaires. Il précise que la lecture qu’en fait M. Pineault n’est ni biaisée ni déformée. Il conclut que la demande de rectification formulée par la plaignante ne s’impose pas, en l’absence d’erreur à rectifier.
Réplique du plaignant
Pour Me Boisjoli, le dossier est complet et il précise qu’il ne souhaite ainsi pas présenter de réplique.
Analyse
Mme Ginette Côté porte plainte contre l’article intitulé « Des commissaires radins » paru dans l’édition du 30 juin 2008 du Journal de Québec. Ce dernier serait truffé d’informations inexactes, incomplètes et tendancieuses qui auraient pour but de miner la crédibilité et la confiance du public envers les commissions scolaires.
Grief 1 : information incomplète et partiale
Dans un premier temps, la plaignante insiste sur le fait qu’à aucun moment, il n’a été précisé dans l’article que les dépenses qui lui sont remboursées le sont sur la base d’un per diem et que, ce faisant, présenter le détail de ses factures aux lecteurs n’était pas pertinent. Le grief fait écho à un passage de l’article qui présentait aux lecteurs le détail des boissons alcoolisées que Mme Côté s’est fait rembourser par sa commission scolaire. La partie mise en cause précise, quant à elle, que la plaignante n’a pas fait la preuve que ses dépenses sont soumises à un per diem.
Il est un principe que défend le guide des Droits et responsabilités de la presse du Conseil de presse qu’« en raison de leur fonction sociale, les médias et les professionnels de l’information doivent évaluer ce qui est d’intérêt public. […] Les choix rédactionnels en la matière relèvent de leur jugement et doivent être faits en toute indépendance et demeurer libres de toutes contraintes autres que celles qui découlent de l’exercice de leur fonction et des législations en vigueur ». DERP, p. 7
En contrepartie, ils ont le devoir de « livrer au public une information complète, rigoureuse et conforme aux faits et aux événements ». DERP, p. 21
Tenant compte de ces principes, le Conseil considère que M. Pineault était libre de rapporter l’information tel qu’il l’a fait. En exprimant l’idée que les présidents des commissions scolaires ne font rien d’illégal en se faisant rembourser leurs dépenses, mais que leurs demandes manquent parfois de retenue, le journaliste introduisait les lecteurs à l’idée que certaines règles existent concernant les remboursements de dépense. Cette précision fait en sorte que ce dernier n’avait pas pour obligation de mentionner l’existence spécifique du per diem, tout particulièrement dans la situation de la plaignante. Le grief est rejeté.
Grief 2 : atteinte au respect de la personne
Dans un second temps, la plaignante déplore que les propos contenus dans l’article aient porté atteinte à sa réputation. De façon plus générale, elle déplore que l’article discrédite les commissions scolaires aux yeux des lecteurs.
Comme l’a précisé, à plusieurs reprises, la jurisprudence du Conseil, le rôle du Conseil n’est pas de déterminer le degré d’atteinte à la réputation d’un plaignant, puisque cela relève des tribunaux, mais d’étudier ce même grief sous l’angle de l’éthique professionnelle. Puisque les atteintes dont il est question découleraient de possibles fautes professionnelles commises par le mis-en-cause et puisque aucun autre grief n’a été retenu, le grief pour atteinte à la réputation est rejeté.
Décision
Au vu de ce qui précède, le Conseil de presse rejette la plainte de Mme Ginette Côté, présidente de la Commission scolaire de l’Estuaire contre le journaliste, M. Jean-Philippe Pineault et le quotidien Le Journal de Québec.
Analyse de la décision
- C12B Information incomplète
- C13A Partialité
- C17D Discréditer/ridiculiser