Plaignant
M. Harold C. Lehrer
Mis en cause
M. Eric-Olivier Dallard, rédacteur en chef et l’hebdomadaire Accès Laurentides
Résumé de la plainte
M. Harold C. Lehrer, porte plainte contre M. Eric-Olivier Dallard, de l’hebdomadaire Accès Laurentides, pour avoir publié une manchette qui serait fausse et sensationnaliste, dans l’édition du 3 juillet 2009.
Griefs du plaignant
M. Harold C. Lehrer déplore que le journal Accès Laurentides ait publié une manchette fausse et sensationnaliste, dans l’édition du 3 juillet 2009 de l’hebdomadaire : « éCOLE, SYNAGOGUE… LES JUIFS DE VAL-DAVID CONDAMNéS – PLUS DE 20 000 $ D’AMENDES! »
Le plaignant mentionne que l’article, correspondant à cette manchette, raconte de manière raisonnable le processus qui a eu lieu à la Cour municipale de Ste-Adèle. Il déplore cependant que la manchette soit non seulement fausse, mais qu’elle laisse des impressions très fortes de racisme dans l’esprit des lecteurs.
Il précise que ce ne sont pas tous les « juifs » de Val-David qui ont été condamnés à une amende de 20 000 $ pour violation du règlement municipal, mais qu’il s’agissait des membres des « Disciples des Rabbins de Belz pour Renforcer la Torah ». Ainsi, la manchette ne faisait aucune distinction avec les autres groupes et ne pouvait que promouvoir le racisme.
Enfin, le plaignant souhaite qu’une rétraction soit faite par le journal et qu’une explication objective, permettant de distinguer le groupe condamné de la population juive en général, soit publiée.
Commentaires du mis en cause
Commentaires de M. Eric-Olivier Dallard, rédacteur en chef :
M. Eric-Olivier Dallard estime que, selon le raisonnement du plaignant, une manchette valable aurait été « Les Disciples des Rabbins de Belz pour Renforcer la Torah condamnés ».
Il explique que sa décision de titrer la une de son journal, « Les juifs de Val-David condamnés » repose sur deux motifs. Tout d’abord, Accès Laurentides est un média de proximité qui s’adresse à un lectorat de la région. Par conséquent, les mots utilisés dans cette manchette avaient une résonance bien précise qui correspondait à la secte dont parle M. Lehrer. D’autre part, M. Dallard souligne que l’art de titrer en journalisme doit combiner économie de mots et concepts chargés de sens, tout en rendant compte de la réalité factuelle de la nouvelle. En ce sens, selon le mis-en-cause, personne ne pouvait être induit en erreur par cette manchette.
Enfin, le mis-en-cause estime que de le blâmer en raison de la manchette dénoncée pourrait créer un dangereux précédent qui redessinerait une partie des pratiques des pupitres de presse du Québec.
Réplique du plaignant
M. Lehrer précise que le journal fait l’objet d’une distribution dans les supermarchés et d’autres magasins où la première page est vue par de nombreuses personnes. Par conséquent, le lectorat de ce journal serait donc plus large que la région en question.
De plus, il estime qu’avec son expérience, M. Dallard devrait réfléchir aux interprétations qui peuvent découler d’une manchette avant de la publier. Selon le plaignant, il n’y aurait aucun danger dans la création d’un précédent si les journalistes étaient précis, exacts et non discriminatoires.
Analyse
M. Harold C. Lehrer porte plainte contre M. Eric-Olivier Dallard, de l’hebdomadaire Accès Laurentides, pour avoir publié, à la une de l’édition du 3 juillet 2009, une manchette fausse et sensationnaliste, intitulée : « éCOLE, SYNAGOGUE… LES JUIFS DE VAL-DAVID CONDAMNéS – PLUS DE 20 000 $ D’AMENDES! ».
Grief 1 : inexactitude, sensationnalisme et racisme
L’édition de l’hebdomadaire Accès Laurentides mise en cause présente la manchette suivante : « éCOLE, SYNAGOGUE… LES JUIFS DE VAL-DAVID CONDAMNéS – PLUS DE 20 000 $ D’AMENDES! ». M. Lehrer déplore que cette manchette véhicule des impressions très fortes de racisme dans l’esprit du lecteur. Selon le plaignant, la manchette laisserait croire que ce sont tous les juifs de Val-David qui auraient été condamnés à une amende, alors qu’il s’agirait des membres des « Disciples des Rabbins de Belz pour Renforcer la Torah ».
Le plaignant précise également que le journal fait l’objet d’une distribution dans les supermarchés et autres magasins, où la première page est vue par de nombreuses personnes. Par conséquent, le lectorat de ce journal serait donc plus large que la région en question et l’impact de la manchette serait encore plus grand.
Quant au mis-en-cause, il explique que sa décision de titrer ainsi la une de son journal repose sur deux motifs. Premièrement, il souligne qu’Accès Laurentides est un média de proximité qui s’adresse à un lectorat régional. Par conséquent, les mots utilisés dans cette manchette avaient une résonance bien précise qui correspondait au groupe dont parle M. Lehrer. D’autre part, M. Dallard explique que l’art de titrer en journalisme doit combiner économie de mots et de concepts chargés de sens, tout en rendant compte de la réalité factuelle de la nouvelle. En ce sens, personne ne pouvait, selon lui, être induit en erreur par cette manchette.
Au sujet des titres et des manchettes, le guide de déontologie du Conseil de presse, les Droits et responsabilités de la presse, précise : « Les manchettes et les titres doivent respecter le sens, l’esprit et le contenu des textes auxquels ils renvoient. Les responsables doivent éviter le sensationnalisme et veiller à ce que les manchettes et les titres ne servent pas de véhicules aux préjugés et aux partis pris. » DERP, p. 30
Or, après examen, le Conseil estime qu’en généralisant la condamnation à l’ensemble de la communauté juive, plutôt que de viser directement les membres des « Disciples des Rabbins de Belz pour Renforcer la Torah » condamnés à verser l’amende de 20 000 $, la manchette contrevenait aux principes déontologiques précédemment évoqués et était sensationnaliste, en plus de risquer de véhiculer des préjugés au sein de la population à l’égard de la communauté juive de Val-David. Le Conseil estime aussi qu’il aurait été aisé pour les mis-en-cause de trouver une manchette plus précise et toute aussi succincte que celle retenue pour l’édition du journal en cause. Le grief est retenu.
Grief 2 : demande de rétractation
M. Lehrer souhaite qu’une rétractation soit faite par le journal, ainsi qu’une explication objective permettant de distinguer le groupe visé par la condamnation, de la population juive en général.
à ce propos, la déontologie du Conseil stipule : « Il relève de la responsabilité des médias de trouver les meilleurs moyens pour corriger leurs manquements et leurs erreurs à l’égard de personnes, de groupes ou d’instances mis en cause dans leurs productions journalistiques, que celles-ci relèvent de l’information ou de l’opinion. Cependant, les rétractations et les rectifications devraient être faites de façon à remédier pleinement et avec diligence au tort causé. Les médias n’ont aucune excuse pour se soustraire à l’obligation de réparer leurs erreurs, que les victimes l’exigent ou non ». DERP, p. 46
La manchette dénoncée par le plaignant était non seulement inexacte et sensationnaliste, elle risquait également d’induire le public en erreur quant à la nature de l’information et de véhiculer des impressions de racisme à l’égard des juifs de Val-David. Il était donc de la responsabilité des mis-en-cause de corriger cette situation en publiant un rectificatif qui aurait redressé les manquements déontologiques engendrés par la manchette fautive. Le grief est donc retenu.
Décision
Au vu de ce qui précède, le Conseil de presse retient la plainte de M. Harold C. Lehrer et blâme le rédacteur en chef, M. Eric-Olivier Dallard et l’hebdomadaire Accès Laurentides pour manchette inexacte, sensationnaliste et raciste ainsi que pour absence de rectification.
Analyse de la décision
- C11B Information inexacte
- C14A Sensationnalisme/exagération/insistance indue
- C19A Absence/refus de rectification