Plaignant
Centres d’adoption d’animaux de compagnie du Québec (CAACQ) et Mme Johanne Tassé, présidente et fondatrice
Mis en cause
M. Jean Joubert, journaliste et rédacteur en chef; M. Gaston Lapointe, directeur et l’hebdomadaire L’Express Montcalm
Résumé de la plainte
La plainte des Centres d’adoption d’animaux de compagnie du Québec (CAACQ) vise deux articles parus dans L’Express Montcalm les 29 septembre et 14 octobre 2009, qui présenteraient des renseignements erronés. En outre, dans le second article, le journaliste aurait rapporté les propos de personnes sans vérifier leurs allégations, comme s’il s’agissait de faits et non d’opinions.
Griefs du plaignant
Par la voie de leur présidente et fondatrice, Mme Johanne Tassé, les Centres d’adoption d’animaux de compagnie du Québec (CAACQ) portent plainte contre l’hebdomadaire L’Express Montcalm et son rédacteur en chef et journaliste Jean Joubert pour avoir publié des informations qui seraient erronées. Les deux articles visés par la plainte ont été publiés respectivement les 29 septembre et 14 octobre 2009 et portaient les titres « L’Inspecteur Canin valide ses procédures d’euthanasie » et « L’Inspecteur Canin veut rétablir sa réputation ».
Mme Tassé explique que, dans le premier article, « la présidente de l’organisme de contrôle animalier L’Inspecteur Canin, Valérie Morin, affirmait que la CSST avait émis, en juillet 2009, un rapport […] à son organisme lui indiquant que sa chambre à euthanasie respectait les normes de sécurité ». Selon elle, « l’article en question semble indiquer que la CSST fait l’éloge des pratiques de L’Inspecteur Canin ». Toutefois, le journaliste aurait oublié de mentionner que la chambre à euthanasie avait été fermée par la CSST, en mai 2009, parce qu’elle ne respectait pas les normes de sécurité, et que le rapport de juillet 2009 ne faisait que confirmer que les changements apportés à cette chambre étaient maintenant conformes aux normes.
Dans le cas du second article, le journaliste relaterait les propos d’un employé de L’Inspecteur Canin, M. Christian Cyr, comme s’il s’agissait de faits et non de l’opinion de l’employé. Ces propos concernaient un constat d’infraction remis à L’Inspecteur Canin, par l’organisme de surveillance ANIMA-Québec qui veille à la sécurité et au bien-être des chiens et chats du Québec par des activités d’inspection. L’information erronée aurait été à l’effet « que l’organisme avait reçu un constat d’infraction des mains de la directrice d’ANIMA-Québec, et que celle-ci avouait subir des pressions pour émettre ce constat qui n’était pas fondé selon elle »….
Le journaliste Jean Joubert n’aurait pas vérifié ces allégations en demandant l’avis des personnes ou organismes visés par les propos publiés, selon la porte-parole des plaignants. Elle annexe à la plainte une lettre d’ANIMA-Québec qui contredit les affirmations de M. Cyr et relève une erreur au sujet du titre de la personne citée dans l’article.
Commentaires du mis en cause
Commentaires de M. Jean Joubert, rédacteur en chef :
M. Joubert répond que « dans l’article du 30 septembre, à aucun endroit dans le texte peut-on lire ou encore présumer lire que la CSST fait l’éloge des pratiques de L’Inspecteur Canin ». On lit plutôt, selon lui, que l’organisme a reçu l’aval de la CSST pour procéder, et que « la chambre à euthanasie respecte les normes de sécurité de l’organisme et est très sécuritaire pour les utilisateurs ». M. Joubert soutient qu’il n’y a aucune forme d’éloge dans le propos publié. « Le but de cette rencontre était de faire connaître à la population qu’Inspecteur Canin était conforme aux normes de la CSST en matière d’euthanasie », explique-t-il.
En ce qui concerne l’article du 14 octobre, le rédacteur en chef admet qu’il y a eu erreur sur le titre de la personne qui est mentionnée dans le texte, Mme Suzanne Lecomte. Il s’engage à publier un correctif pour rétablir les faits dans l’édition du 27 janvier 2010 de son journal, tout en ajoutant que personne n’avait contacté le journal, avant cette plainte, pour signaler cette erreur.
Le rédacteur en chef aborde ensuite le grief d’avoir « relaté les propos d’un employé de L’Inspecteur Canin, Christian Cyr, à l’effet que l’organisme avait reçu un constat d’infraction des mains de la […] ». M. Joubert répond : « En fait, nous avons cité les propos de ce dernier (M. Cyr). Nous croyons que nous ne pouvons être imputable (sic) des propos émis par notre interlocuteur. Nous avons diffusé, avec la ponctuation requise pour ce genre de citation, l’information à nos lecteurs. » Les propos en question voulaient qu’en faisant son inspection, la personne ait avoué avoir subi des pressions pour « donner cette infraction » alors qu’elle n’avait aucune indication des normes à respecter.
M. Joubert commente ensuite la lettre de démenti d’ANIMA-Québec annexée à la plainte, qui indiquait : « l’équipe d’inspection ne subit pas de pression et est totalement libre d’appliquer son processus en toute impartialité et objectivité ». Pour le rédacteur en chef, il aurait été étonnant qu’ANIMA-Québec dise le contraire de ce qu’elle a répondu. Il rappelle enfin que les propos en question étaient ceux cités par M. Cyr et rapportés dans le texte publié.
Réplique du plaignant
Les plaignants n’ont fourni aucune réplique.
Analyse
La plainte vise deux articles parus dans L’Express Montcalm, concernant l’entreprise L’Inspecteur Canin qui s’occupe d’animaux abandonnés. Les articles rapportaient les réactions de la direction à des accusations que l’entreprise avait eues à subir depuis le printemps 2009. Publiés respectivement les 29 septembre et 14 octobre 2009, les articles auraient présenté, selon les plaignants, des renseignements erronés. Dans le second article, le journaliste aurait, en outre, relaté les propos de personnes sans vérifier leurs allégations, comme s’il s’agissait de faits et non d’opinions.
Grief 1 : partialité de l’information
Selon les plaignants, l’article du 29 septembre semble indiquer que la CSST fait l’éloge des pratiques de L’Inspecteur Canin. Après examen, le Conseil estime que le reportage visé par le grief ne présente aucun caractère « élogieux » à l’endroit de l’entreprise. Si l’article présente la position de la direction de l’entreprise, il fait aussi plusieurs fois référence aux activités de détracteurs qui auraient attaqué la réputation de l’entreprise.
Par conséquent, le grief pour partialité de l’information n’est pas retenu.
Grief 2 : informations inexactes
Les plaignants reprochent aussi à l’éditeur de L’Express Montcalm d’avoir publié dans les articles des 29 septembre et 14 octobre 2009, des informations erronées.
Une de ces informations contestées concerne le titre d’emploi de la Dre Suzanne Lecomte de l’organisme ANIMA-Québec. Dans une lettre annexée à la plainte, l’organisme en question indique : « Premièrement, Dre Suzanne Lecomte n’est pas directrice de l’organisme, mais bien inspecteur-chef d’ANIMA-Québec. »
Après vérification, le Conseil constate que l’hebdomadaire a publié, le 27 janvier 2010, un erratum dans lequel il reconnaît effectivement que la Dre Lecomte n’est pas directrice, mais bien inspecteur-chef de l’organisme. étant donné que ce manquement constituait une faute déontologique mineure, qu’il a été reconnu publiquement et qu’il a été rectifié dans un délai raisonnable, le Conseil, comme c’est l’usage en pareil cas, ne retient pas le grief.
Un autre reproche voulait que dans le second article il y ait inexactitude au sujet des propos de M. Christian Cyr, employé de L’Inspecteur Canin.
Après examen, le Conseil constate qu’à aucun endroit, dans les documents étudiés, il n’est possible d’établir que le journaliste ait commis une faute en rapportant les propos de l’employé. Le grief pour inexactitude ne peut donc être retenu contre le journaliste. Le Conseil ne retient donc pas le grief pour informations inexactes.
Grief 3 : manque d’équilibre
Le reproche suivant voulait que, dans le second article, le journaliste ait relaté les propos de l’employé sans aller chercher la version de l’autre partie visée par les propos rapportés.
Au sujet du traitement de l’information et du choix des contenus publiés, le guide de déontologie Droits et responsabilités de la presse (DERP) du Conseil de presse énonce que : « Ces choix […] ne se mesurent pas seulement de façon quantitative, sur la base d’une seule édition ou d’une seule émission, pas plus qu’au nombre de lignes ou au temps d’antenne. Ils doivent être évalués de façon qualitative, en fonction de l’importance de l’information et de son degré d’intérêt public. » DERP, p. 22
Le titre du second article était « L’Inspecteur Canin veut rétablir sa réputation » et le contenu concernait les démarches de l’entreprise pour redorer son image, Puisqu’il s’agissait du sujet du reportage, la latitude reconnue par la déontologie accordait aux mis-en-cause la liberté rédactionnelle de ne publier, dans un premier temps, que la version de l’employé de L’Inspecteur Canin, M. Christian Cyr, et de sa présidente, Mme Valérie Morin. Cette disposition ne dispensait évidemment pas les mis-en-cause de leur obligation de présenter ultérieurement d’autres versions significatives. Le grief n’est donc pas retenu sur cet aspect.
Par ailleurs, le Conseil a noté qu’au moment de recevoir copie de la présente plainte, le journal recevait en même temps copie de la lettre d’ANIMA-Québec. Dans ce dernier document, l’organisme contestait les affirmations de l’employé de L’Inspecteur Canin, M. Cyr, telles que rapportées par le journaliste, et l’organisme niait que l’inspectrice ait tenu les propos qu’on lui prêtait.
Les propos cités par le journaliste et niés par l’organisme concernaient un constat d’infraction reçu par L’Inspecteur Canin des mains de cette employée d’ANIMA-Québec qui avouait, selon l’employé de L’Inspecteur Canin, subir des pressions pour émettre ce constat alors qu’il n’était pas fondé.
Le Conseil déplore qu’après avoir consacré deux articles à expliquer la version de l’entreprise L’Inspecteur Canin, la direction de L’Express Montcalm n’ait pas jugé nécessaire de publier également un point de vue apportant une vision différente de celle exposée par l’entreprise L’Inspecteur Canin. Il s’agissait pourtant d’une responsabilité essentielle des mis-en-cause que de présenter les principaux points de vue impliqués afin de réaliser un traitement complet du sujet et assurer l’équilibre de l’information. Pour cette raison, le Conseil retient le grief pour manque d’équilibre de l’information.
Décision
Au vu de tout ce qui précède, le Conseil de presse retient la plainte contre L’Express Montcalm et son rédacteur en chef M. Jean Joubert pour manquement à l’équilibre de l’information et rejette les griefs pour partialité de l’information et informations inexactes.
Le Conseil de presse du Québec rappelle que : « Lorsqu’une plainte est retenue, l’entreprise de presse visée par la décision a l’obligation morale de la publier ou de la diffuser. (Règlement No 3, article 8. 2)
Analyse de la décision
- C11B Information inexacte
- C12A Manque d’équilibre
- C13A Partialité