Plaignant
Mme Denise Pouliot
Mis en cause
M. Pierre Duquet, journaliste, M. Bertrand Picard, directeur de l’information et l’hebdomadaire Le Peuple – Lévis
Résumé de la plainte
Mme Denise Pouliot porte plainte contre le journaliste M. Pierre Duquet, de l’hebdomadaire Le Peuple – Lévis, pour avoir publié, de façon sensationnaliste, une photographie où apparaît la maison d’un couple de Saint-Michel-de-Bellechasse, disparu lors du tremblement de terre en Haïti, avec des indications précises sur l’endroit où elle se situe, dans un article du 19 janvier 2010, paru sous le titre : « Un couple de Saint-Michel porté disparu en Haïti ».
Griefs du plaignant
Mme Denise Pouliot déplore que le journaliste, M. Pierre Duquet, ait publié dans l’article « Un couple de Saint-Michel porté disparu en Haïti », de l’édition du 19 janvier 2010, une photographie, où apparaît la maison des disparus avec des indications précises sur l’endroit où elle se situe. Elle considère cette publication comme étant sensationnaliste et souligne que la présence d’indications sur l’endroit de la résidence du couple pourrait faciliter la venue de cambrioleurs.
Commentaires du mis en cause
Commentaires de Me Bernard Pageau, affaires juridiques :
Me Pageau indique que pour illustrer la disparition du couple de Saint-Michel, une photographie de la maison ancestrale de M. Claude Chamberland a été utilisée par l’hebdomadaire.
Le représentant des mis-en-cause mentionne que le texte de la nouvelle indiquait que : « Mme Tremblay et M. Chamberland habitent une maison ancestrale dans la rue Principale du village de Saint-Michel ». Selon lui, Le Peuple étant un média local, il apparaît comme raisonnable et d’intérêt public de publier une photographie de la maison du couple disparu en Haïti. Il ajoute que cette maison était déjà connue du public puisqu’elle fait partie du patrimoine historique du village et qu’elle figure sur le site Internet de la municipalité de Saint-Michel-de-Bellechasse.
Me Pageau souligne que le frère du disparu a pris contact avec l’hebdomadaire le lendemain matin, soit le 20 janvier, et lui a fait parvenir une photo du couple. Cette dernière ayant été immédiatement substituée à la précédente sur le site Internet du journal.
Durant cette même matinée, le représentant des mis-en-cause rapporte le fait selon lequel, Mme Denise Pouliot, se présentant auprès du journal comme l’ex-conjointe de M. Chamberland, exprima son désaccord quant à la publication de la photographie de la résidence et mit fin à la conversation sans que M. Bertrand Picard, éditeur, ne puisse lui expliquer quoi que ce soit.
Le 12 février, le décès de M. Chamberland et de Mme Tremblay a été confirmé. Par conséquent, l’information sur ce dossier a été mise à jour sur le site Internet du journal.
Enfin, Me Pageau estime que la publication de la photographie de la résidence du couple ne préjudiciait pas aux droits de la personnalité ou de la vie privée de M. Chamberland, puisque, dans ce cas-ci, le droit à l’image n’est pas en cause. De plus, la photographie a été diffusée durant moins de 24 heures et a été remplacée par une photo du couple dès qu’elle a été obtenue de la famille, permettant ainsi de préciser au public l’identité du couple.
Pour ces raisons, Me Pageau conteste le fait que cette publication ait été faite dans un but sensationnaliste.
Réplique du plaignant
Selon Mme Denise Pouliot, la publication de la photographie de la résidence du couple disparu en Haïti est un exemple de manque de professionnalisme et de recherche de sensationnalisme.
à son avis, lors de ses recherches pour retrouver les corps des disparus, jamais elle n’a trouvé un cas similaire dans des articles canadiens, amÉricains ou internationaux. La plaignante estime qu’en publiant cette photographie et en ajoutant que la maison est située sur la rue Principale, l’hebdomadaire lançait une invitation aux cambrioleurs et aux curieux.
Enfin, Mme Pouliot ajoute que la maison qui figure sur le site Internet du village de Saint-Michel-de-Bellechasse, porte la mention « Maison Michel Germain » et non le patronyme « Maison Claude Chamberland ». La plaignante souhaite que l’hebdomadaire fasse preuve de plus de discrétion, de respect et de jugement lors de publications concernant des événements dramatiques.
Analyse
Mme Denise Pouliot porte plainte contre le journaliste Pierre Duquet, de l’hebdomadaire Le Peuple – Lévis, pour avoir publié, de façon sensationnaliste, une photographie où apparaît la maison d’un couple de Saint-Michel-de-Bellechasse, disparu lors du tremblement de terre en Haïti, avec des indications précises sur l’endroit où elle se situe, dans un article du 19 janvier 2010, paru sous le titre : « Un couple de Saint-Michel porté disparu en Haïti ».
Grief 1 : sensationnalisme
Mme Denise Pouliot considère cette publication comme étant sensationnaliste.
Me Bernard Pageau, représentant des mis-en-cause, conteste le fait que cette publication ait été faite dans un but sensationnaliste. Selon lui, il apparaît comme raisonnable et d’intérêt public de publier une photographie de la maison d’un couple disparu en Haïti. De plus, il indique que le frère de M. Chamberland a fait parvenir à l’hebdomadaire une photo du couple, le lendemain matin, soit le 20 janvier. Cette dernière ayant été immédiatement substituée à la précédente sur le site Internet du journal.
Le Conseil définit le sensationnalisme comme « une exagération et une interprétation abusive des faits et des événements [pouvant] induire le public en erreur quant à la valeur et à la portée réelles des informations qui lui sont transmises ». DERP, p. 22
Dans ce cas-ci, l’article fait état de la disparition d’un couple de Saint-Michel-de-Bellechasse, lors du tremblement de terre en Haïti. On y explique le travail qu’ils allaient y effectuer. Après analyse, le Conseil ne voit aucune manifestation de sensationnalisme et d’interprétation abusive des faits, ni dans le texte ni dans la photographie illustrant l’article. Aucun sensationnalisme n’ayant été relevé par le Conseil, le grief est rejeté.
Grief 2 : manque de prudence
Mme Denise Pouliot ajoute que la photo et la présence d’indications sur l’endroit de la résidence des disparus pouvaient faciliter la venue de cambrioleurs.
Me Pageau estime que la publication de cette photographie ne préjudiciait pas aux droits de la personnalité ou de la vie privée de M. Chamberland. Il ajoute que cette maison était déjà connue du public, puisqu’elle fait partie du patrimoine historique et qu’elle figure sur le site Internet du village de Saint-Michel-de-Bellechasse.
Dans sa réplique, la plaignante considère que la publication de la photographie de la résidence du couple disparu en Haïti et du texte indiquant que, « Mme Tremblay et M. Chamberland habitent une maison ancestrale dans la rue Principale du village de Saint-Michel », est un exemple de manque de professionnalisme. Elle ajoute que la maison, figurant sur le site Internet du village de Saint-Michel-de-Bellechasse, porte la mention « Maison Michel Germain » et non le patronyme « Maison Claude Chamberland ».
En regard de l’attitude des médias vis-à-vis de la vie privée et des drames humains, le guide de déontologie du Conseil mentionne que : « lors de la collecte, du traitement ou de la diffusion de l’information, les médias et les journalistes doivent faire preuve de prudence, de discernement et de circonspection ». DERP, p. 42
Le Conseil considère que, d’avoir publié la photographie de la maison et le nom de la rue où se situe la résidence du couple disparu, ne constitue pas un manque de prudence de la part de l’hebdomadaire. En effet, le Conseil estime que le média a bien exercé son devoir d’informer la population de Saint-Michel-de-Bellechasse de la disparition de deux membres de leur communauté sans dévoiler des éléments intimes et déplacés. Par conséquent, le grief est rejeté.
Décision
Au vu de ce qui précède, le Conseil de presse rejette la plainte de Mme Denise Pouliot contre le journaliste M. Pierre Duquet et l’hebdomadaire Le Peuple – Lévis pour sensationnalisme et manque de prudence.
Analyse de la décision
- C14A Sensationnalisme/exagération/insistance indue
- C16B Divulgation de l’identité/photo
- C16C Publication de l’adresse/téléphone