Plaignant
M. Norman McConnell
Mis en cause
Mme Véronique Lessard, chef de l’information; l’émission « Le Téléjournal/Québec » et la Société Radio-Canada – Québec
Résumé de la plainte
M. McConnell reproche à la Société Radio-Canada – Québec de s’être placée en situation de conflit d’intérêts en diffusant, à 18 heures dans le cadre du « Téléjournal/Québec », un reportage faisant la promotion d’une émission dont elle est, elle-même, le diffuseur. M. McConnell y voit là un mélange des genres qui va à l’encontre des principes d’impartialité et d’objectivité.
Analyse
Grief 1 : manque d’indépendance de l’information et mélange des genres
M. McConnell reproche à la Société Radio-Canada, station de Québec, d’avoir consacré plus de 10 minutes dans son bulletin de nouvelles du « Téléjournal/Québec » du 6 septembre 2010, à promouvoir la finale de l’émission de téléréalité « Les Chefs », qui allait être diffusée le soir même à l’antenne de Radio-Canada. Le plaignant estime qu’aucune information pertinente n’a été véhiculée lors de ce segment. De plus, on a insisté sur « le million de téléspectateurs » qu’a rejoint cette émission, et ce, à plusieurs reprises.
Pour sa part, Mme Véronique Lessard, chef de l’information à Radio-Canada – Québec, estime que l’émission « Les Chefs » est devenue un véritable phénomène télévisuel et son succès témoigne de l’engouement du public pour la cuisine, sujet de culture populaire par excellence.
Mme Lessard ajoute que, comme les finalistes étaient de la région de Québec de même que les jurés, il était donc d’intérêt public pour les gens de Québec de souligner ce phénomène. De plus, comme le tout se déroule à Québec, ceci donnait un accès privilégié aux coulisses de l’émission pour interviewer les acteurs de la grande finale.
Enfin, la chef de l’information précise que le sujet a été traité à l’intérieur du segment culturel du « Téléjournal/Québec » et, de plus, on y a ajouté un reportage sur l’impact de l’émission « Les Chefs » sur les écoles de cuisine qui profitent de cet engouement.
Le Conseil constate qu’il arrive régulièrement que les réseaux de télévision présentent des reportages sur certaines de leurs émissions lorsqu’il y a des phénomènes particuliers à souligner, par exemple, une émission ayant gagné un prix, une autre ayant atteint une longévité remarquable, etc. Généralement, le sujet est traité dans le segment culturel du bulletin de nouvelles. Mais comme un autre sujet, il s’agit bien des fois d’un reportage de deux ou trois minutes.
Dans le cas qui nous concerne, le reportage du « Téléjournal/Québec » sur la grande finale de l’émission « Les Chefs », dure 10 min 48 s sur un total de 46 minutes de contenu éditorial, soit 23 % de l’émission. Quoique véritable phénomène télévisuel, comme le précise la chef de l’information de Radio-Canada – Québec, le reportage consacre 7 minutes aux entrevues avec les finalistes, les juges et l’animatrice, qui visent surtout à piquer la curiosité des téléspectateurs quant à l’issue du résultat à venir. Un autre 2 min 50 s fait l’objet d’un reportage auprès de jeunes des écoles de cuisine. Mais, la majorité des questions portent sur l’émission « Les Chefs », à savoir si les jeunes la regardent et qui, selon eux, sortira grand gagnant. On y retrouve peu d’information sur l’impact social d’une telle émission comme on s’y serait attendu dans un bulletin de nouvelles. Enfin, la dernière minute est consacrée à un sondage, auprès du public, sur qui sera le gagnant de la série. Le fait que le plateau de tournage se situe à Québec et était facilement accessible ne constitue pas un argument assez fort pour justifier un reportage de près de 11 minutes sur la question.
Le Conseil est d’accord avec Mme Lessard que Radio-Canada, comme les autres réseaux, jouit de la liberté éditoriale et que la décision de traiter d’un sujet en particulier lui revient, mais il rappelle que le guide de déontologie est très précis sur la question de l’information et de la publicité : « Les médias doivent s’interdire de faire leur propre publicité ou la promotion de leur programmation sous la forme de nouvelles ou de reportages. Non seulement cela a-t-il pour conséquence de réduire l’espace et le temps d’antenne réservés à la véritable information, mais de compromettre leur crédibilité et celle de leurs journalistes, ainsi que de miner la confiance du public quant à l’intégrité de l’information qui lui est transmise. » (DERP, p. 31) Or, le Conseil estime que le segment sur l’émission « Les Chefs » se rapproche davantage d’une autopublicité que d’un reportage nouvelle. Ainsi, le grief pour indépendance de l’information et de mélange des genres est retenu.
Décision
Au vu de ce qui précède, le Conseil de presse retient la plainte de M. Norman McConnell contre l’émission « Le Téléjournal/Québec » et la Société Radio-Canada – Québec pour manque d’indépendance de l’information et mélange des genres.
Analyse de la décision
- C20A Identification/confusion des genres
- C21C Traitement à caractère promotionnel
Tiers
M. McConnell reproche à la Société Radio-Canada – Québec de s’être placée en situation de conflit d’intérêts en diffusant, à 18 heures dans le cadre du « Téléjournal/Québec », un reportage faisant la promotion d’une émission dont elle est, elle-même, le diffuseur. M. McConnell y voit là un mélange des genres qui va à l’encontre des principes d’impartialité et d’objectivité.