Plaignant
L’Élan CALACS (Centre d’aide et de la lutte contre les agressions à caractère sexuel) et Mme Marie-Hélène Ouellette, intervenante
Mis en cause
M. Ronald McGregor, journaliste; Mme Johanne Régimbald, éditrice et l’hebdomadaire L’Information du Nord, secteur Vallée de la Rouge
Résumé de la plainte
Mme Marie-Hélène Ouellette intervenante pour l’organisme l’Élan CALACS reproche au journaliste, Ronald McGregor, dans un article publié le 2 mars 2011, sous le titre « Quand la machine à rumeur s’en mêle » et dans un éditorial, le 16 mars 2011, sous le titre « J’accuse », d’avoir divulgué l’identité d’une mineure, qui a déposé une plainte d’agression sexuelle, et de s’être servi de sa position d’éditorialiste pour proférer des menaces.
Commentaires du mis en cause
L’hebdomadaire L’Information du Nord, secteur Vallée de la Rouge, n’a pas souhaité répondre à la présente plainte.
Analyse
Grief 1 : divulgation de l’identité d’une mineure
Selon Mme Ouellette, en divulguant le nom du père accusé d’agression sexuelle et en précisant son lien avec la présumée victime, le journaliste permettait d’identifier publiquement la jeune fille qui avait porté plainte et brisait l’anonymat garanti par la loi.
Le Journal de l’Information du Nord n’a fourni aucun commentaire à la plainte.
Dans son guide les Droits et responsabilités de la presse, en regard de la protection des personnes mineures, le Conseil énonce : « La Loi sur la protection de la jeunesse accorde une protection spéciale aux personnes mineures. Les pouvoirs publics ont également adopté des mesures vivant la protection de l’anonymat des jeunes impliqués dans un débat judiciaire ou dans une situation qui menace leur sécurité et leur développement, afin de ne pas compromettre leurs chances de réinsertion sociale et familiale. Pour les mêmes raisons, l’éthique journalistique oblige également au respect de balises particulières lors de la collecte, du traitement et de la diffusion d’informations concernant les mineurs, plus spécifiquement quant à leur identification. » (DERP, p. 43)
Comme il l’a déjà exprimé à plusieurs reprises, le Conseil estime que lorsque la presse aborde des cas concernant des personnes mineures, elle devrait s’abstenir de publier toute mention permettant l’identification de ces dernières.
Dans le présent dossier, le Conseil est d’avis que le droit à l’anonymat des personnes mineures s’applique même si la présumée victime a déclaré, selon le journaliste, avoir déposé une fausse plainte d’agression sexuelle. Le Conseil constate que la publication du nom, du lieu de résidence ainsi que du lien entre le personnage de l’article et la personne mineure, fournissait suffisamment d’informations pour identifier cette personne. Le grief pour divulgation de l’identité d’une mineure est retenu.
Grief 2 : abus de pouvoir et proférer des menaces
Mme Ouellette accuse le journaliste qui, dans son éditorial « J’accuse », s’en est pris agressivement, sinon violemment à une lectrice qui lui avait téléphoné en réaction à son article précédent. Le journaliste y écrivait : « Des gens qui jugent, condamnent et continue (sic) à cracher dans le ciel et propagent des rumeurs non fondées, ont sans doute une piètre qualité de vie. Je n’ai pas de pitié pour ces canards boiteux. Restez cachés, il vaut mieux pour notre société, qui n’est pas la vôtre. J’ai sa voix bien gravée dans ma tête et ma machine j’attends Madame au premier détour. » Selon la plaignante, cette menace est directe et il est inacceptable pour un journaliste d’utiliser sa position dans un média pour agir de la sorte et proférer une menace.
Le guide de déontologie du Conseil mentionne que « […] le droit de réponse des journalistes aux commentaires des lecteurs […] est une pratique reconnue dans la presse. Ce droit de réponse doit cependant être exercé avec discernement et dans le plein respect des personnes. […] Ils [les journalistes] ne doivent pas se prévaloir de ce droit pour dénigrer, insulter ou discréditer les lecteurs, auditeurs ou téléspectateurs. » (DERP, p. 39)
L’analyse a permis de constater que le chroniqueur a effectivement utilisé sa chronique afin de régler un différend qui l’opposait à une lectrice en désaccord avec son article « Quand la machine à rumeur s’en mêle ». Le Conseil estime que ce droit de réplique doit être exercé avec rigueur et dans le plein respect des lecteurs. En l’occurrence, le Conseil est d’avis que la réplique était arrogante, vindicative et peu conforme aux exigences de la déontologie journalistique. Le grief pour abus de pouvoir et avoir proféré des menaces est retenu.
Refus de collaborer
L’hebdomadaire L’Information du Nord, secteur Vallée de la Rouge, n’a pas souhaité répondre à la présente plainte.
Le Conseil reproche à L’Information du Nord son manque de collaboration pour avoir refusé de répondre, devant le Tribunal d’honneur, de la plainte les concernant.
Décision
Compte tenu des éléments ci-haut exposés, le Conseil de presse retient la plainte de Mme Marie-Hélène Ouellette de l’organisme l’Élan CALACS et blâme le journaliste M. Ronald McGregor et L’Information du Nord pour avoir divulgué l’identité d’une mineure, pour abus de pouvoir et profération de menaces.
Pour son manque de collaboration, en refusant de répondre à la présente plainte, le Conseil de presse blâme L’Information du Nord.
Le Conseil de presse du Québec rappelle que : « Lorsqu’une plainte est retenue, l’entreprise de presse visée par la décision a l’obligation morale de la publier ou de la diffuser. » (Règlement No 3, article 8. 2)
Analyse de la décision
- C05A Réplique abusive
- C16B Divulgation de l’identité/photo
- C17E Attaques personnelles
- C24A Manque de collaboration