Plaignant
M. Julien Feldman
Mis en cause
M. Peter Wheeland, réviseur; M. Raymond Brassard, directeur de la rédaction et le quotidien The Gazette
Résumé de la plainte
M. Julien Feldman dépose une plainte, le 15 novembre 2011, contre M. Peter Wheeland, réviseur au quotidien The Gazette, pour avoir publié des informations inexactes et partiales dans le but de nuire à sa candidature comme membre du conseil d’administration (CA) du Centre universitaire de santé McGill, dans une page Facebook intitulée : « Julien-Feldman-A really-BAD-choice-for-MUHC-Hospital-board », et mise en ligne vers la fin octobre 2011. Le plaignant déplore le refus de M. Wheeland de publier une rétractation.
Analyse
Grief 1 : manquement au devoir de réserve
Le plaignant, commissaire à la Commission scolaire English-Montreal, dit avoir été victime de la vindicte du journaliste Peter Wheeland qui, dans une page personnelle Facebook, a tenté de dissuader le public de voter pour lui comme membre du CA du Centre universitaire de santé McGill. M. Feldman considère que le mis en cause n’avait qu’un seul objectif, celui de l’attaquer personnellement dans le but d’entacher sa réputation auprès de plusieurs utilisateurs de Facebook en l’accusant d’avoir dépensé des milliers de dollars des contribuables en frais juridiques à la Commission scolaire. Le plaignant estime que, en tant que journaliste professionnel, M. Wheeland a le devoir de respecter les mêmes standards professionnels, que ce soit à La Gazette où il est employé ou sur sa page Facebook.
M. Peter Wheeland, lui, considère que ses écrits sur sa page Facebook ne concernent que lui et que The Gazette ne devrait pas être tenue responsable de ses commentaires sur Internet. Il croit que la plainte de M. Feldman auprès du Conseil de presse vise essentiellement à le priver de son droit d’exercer sa liberté d’expression. Il estime, de plus, que le Conseil n’a pas juridiction sur le contenu des médias sociaux.
Le Conseil rappelle que : « Afin de préserver leur crédibilité professionnelle, les journalistes sont tenus à un devoir de réserve quant à leur implication personnelle dans diverses sphères d’activité sociales, politiques ou autres qui pourrait interférer avec leurs obligations de neutralité et d’indépendance. (DERP, p. 25)
Le Conseil note que M. Wheeland est un journaliste/réviseur (copy editor) qui pratique du journalisme factuel touchant de nombreux sujets d’intérêt public, dont le dossier du Centre universitaire de santé McGill. À ce titre, M. Wheeland est tenu à un devoir de réserve, peu importe où il écrit, même dans un blogue personnel, non identifié à The Gazette.
Le Conseil constate que M. Wheeland s’est identifié comme journaliste du quotidien The Gazette, sur la page Facebook, qu’il a créée concernant M. Feldman et il admet avoir pris position sur la candidature de M. Feldman au conseil d’administration du Centre universitaire de santé McGill.
Le Conseil considère que M. Peter Wheeland n’a pas respecté les règles journalistiques, qui régissent son travail de réviseur-journaliste en ne respectant pas son devoir de réserve et son obligation de neutralité et d’indépendance. Le grief pour manquement au devoir de réserve est retenu.
Quelle est la responsabilité du journal The Gazette? La politique interne relative à l’utilisation des médias sociaux (pages web des journaux et pages personnelles Facebook et Twitter) oblige les journalistes/reporters qui signent leurs articles à respecter, sur ces nouveaux médias, les mêmes principes de déontologie journalistique que lorsqu’ils écrivent dans le journal. Or, selon M. Raymond Brassard, directeur de la rédaction à The Gazette, cette obligation est ambiguë et ne s’applique pas de façon aussi explicite aux journalistes qui ne signent pas les écrits, comme un réviseur-journaliste.
Puisque The Gazette ignorait le contenu des écrits dans le site Facebook personnel de son journaliste, la responsabilité du média n’est pas directement engagée dans le cas présent.
Le Conseil recommande cependant à The Gazette de préciser sa position et d’étendre les obligations auxquelles sont tenus les journalistes/reporters à tous les journalistes factuels qui participent à la production du journal. Tous ces journalistes factuels, signataires ou non, doivent respecter un devoir de réserve et manifester une indépendance par rapport à tous les sujets qu’ils traitent dans l’exercice de leur fonction.
Le Conseil n’aborde pas les autres griefs (information inexacte, partialité, atteinte à la réputation et refus de rétractation), car le Conseil exclut de son champ de juridiction le contenu des médias sociaux qui ne sont pas associés à une entreprise de presse.
Décision
Au vu de ce qui précède, le Conseil de presse du Québec retient la plainte de M. Julien Feldman contre le journaliste Peter Wheeland pour le grief de manquement au devoir de réserve.
Le Conseil de presse du Québec rappelle que : « Lorsqu’une plainte est retenue, l’entreprise de presse visée par la décision a l’obligation morale de la publier ou de la diffuser. » (Règlement No 3, article 8. 2)
Analyse de la décision
- C07B Devoir de réserve
- C13A Partialité