Plaignant
M. Raymond Hudon
Mis en cause
M. Jean-François Nadeau, journaliste; Mme Marie-Andrée Chouinard, responsable de la page Idée et le quotidien Le Devoir
Résumé de la plainte
M. Raymond Hudon dépose une plainte au Conseil de presse, le 28 juillet 2012, contre M. Jean-François Nadeau, journaliste au quotidien Le Devoir, relativement à un article daté du 28 avril 2012 et intitulé « En opposition carrée ». M. Hudon reproche au journaliste des informations inexactes et incomplètes et, au Devoir, de lui avoir refusé un droit de réplique.
Analyse
Grief 1 : informations inexactes et incomplètes
M. Raymond Hudon déplore que le journaliste Jean-François Nadeau ait tronqué un texte qu’il a rédigé en collaboration avec d’autres auteurs. Le plaignant en a particulièrement contre ce passage de l’article de M. Nadeau : « « Les jeunes ne s’intéressent pas à la politique et n’ont plus le goût de l’engagement » répétaient encore il y a peu de temps tous les spécialistes d’un colloque tenu à Liège et dont les travaux viennent d’être colligés, sous le titre, « Engagements citoyens et politiques de jeunes », par Raymond Hudon et Bernard Fournier, aux Presses de l’Université Laval. »
Or, selon le plaignant, il a été mal cité. C’est justement le contraire qu’il a écrit en introduction du même livre, cité par le journaliste, à l’effet que le portrait largement diffusé, sur les jeunes, a « pour effet d’occulter l’engagement, l’implication de plusieurs jeunes […]. En organisant notre colloque à Liège en septembre 2012, nous avions en tête l’objectif précis de mettre en lumière cet aspect trop souvent négligé de la réalité politique des jeunes ». M. Hudon conclut que le journaliste a déformé son analyse de l’engagement des jeunes.
De son côté, Le Devoir insiste pour dire que le texte de M. Nadeau ne porte pas sur le livre de M. Hudon. « Il s’agit plutôt d’une simple parenthèse où l’auteur exprime que, de façon générale, on considère encore que les jeunes ne s’engagent plus selon les termes « classiques » de l’action politique ». Le Devoir ajoute que M. Nadeau, dans son texte, insiste pour dire que l’action des jeunes de cette génération « ne s’emboîte pas exactement dans la boîte où on la range habituellement ». De plus, souligne le quotidien, une autre journaliste, Caroline Montpetit avait interrogé M. Hudon et publié un article le 2 juin 2012 qui précisait la pensée du plaignant, qui s’exprimait alors ainsi : « Il y a toute une différence entre ce qu’on voit maintenant et une participation électorale ou un engagement au sein des partis politiques ».
Le Conseil constate, à la lecture du livre publié par le plaignant, que le journaliste, Jean-François Nadeau, a déformé les idées de M. Hudon et des participants au colloque auquel réfère le livre. Pour ces experts, bien qu’ils s’éloignent des pratiques traditionnelles au profit d’actions novatrices, les jeunes sont loin de se désengager de la vie politique.
Le Conseil est d’avis que, même si l’article de M. Nadeau ne portait pas spécifiquement sur le livre de M. Hudon, le respect des règles de déontologie journalistique aurait dû faire en sorte que M. Nadeau cite correctement les auteurs afin de rendre justice à leur message, ce qui n’a pas été fait. Le grief pour informations inexactes et incomplètes est donc retenu.
Grief 2 : refus de droit de réplique
Le plaignant indique qu’il a envoyé un courriel à Mme Marie-André Chouinard, responsable de la page Idées du journal, demandant qu’on apporte une correction au texte de M. Nadeau. M. Hudon dit n’avoir reçu aucun accusé de réception et que son texte n’a jamais été publié.
Le quotidien Le Devoir invoque la surcharge de travail au moment de la crise étudiante, la quantité impressionnante de textes reçus, le personnel restreint du journal et le fait que M. Hudon n’ait pas acheminé sa demande au bon endroit. Le courriel leur a échappé et la direction s’en voit désolée.
Le Conseil considère que le courriel du plaignant n’était pas juste une autre opinion sur la question de la grève étudiante. L’erreur à corriger était de taille puisqu’elle déformait les propos du plaignant et lui faisait dire exactement le contraire de ce qu’il avançait. Le Conseil rappelle que : « Les médias n’ont aucune excuse pour se soustraire à l’obligation de réparer leurs erreurs, que les victimes l’exigent ou non, et ils doivent consacrer aux rétractations et aux rectifications qu’ils publient ou diffusent une forme, un espace, et une importance de nature à permettre au public de faire la part des choses. » (DERP, p. 46) Le Conseil estime que Le Devoir aurait dû prendre la peine de réagir à la demande du plaignant et publier sa mise au point et cela malgré la charge de travail de l’équipe et le cheminement irrégulier de la demande de M. Hudon. Le grief pour refus de droit de réplique est retenu.
Décision
Au vu de ce qui précède, le Conseil de presse du Québec retient la plainte de M. Raymond Hudon contre M. Jean-François Nadeau, journaliste et le quotidien Le Devoir pour informations inexactes et incomplètes et refus de droit de réplique.
Le Conseil de presse du Québec rappelle que : « Lorsqu’une plainte est retenue, l’entreprise de presse visée par la décision a l’obligation morale de la publier ou de la diffuser. » (Règlement No 3, article 8. 2)
Analyse de la décision
- C11B Information inexacte
- C12B Information incomplète
- C19A Absence/refus de rectification