Plaignant
M. Martin Verronneau
Mis en cause
M. Paul Arcand, animateur; M. Michel Lorrain, directeur général; L’émission « Puisqu’il faut se lever »; La station 98,5 FM
Résumé de la plainte
M. Martin Verronneau dépose une plainte le 13 septembre 2013 contre l’animateur de l’émission « Puisqu’il faut se lever », Paul Arcand, et la station radiophonique 98,5 FM concernant un segment de l’émission diffusée vers 8 h 30, le 11 septembre 2013, et traitant du remblaiement d’un étang à Sainte-Adèle. Le plaignant dénonce un titre et des informations inexacts, de l’incomplétude et un manque d’équilibre.
Analyse
Grief 1 : titre et informations inexacts
Le plaignant relève cinq inexactitudes dans les propos rapportés lors de l’émission de M. Arcand. Le plaignant précise que la partie de l’affirmation qu’il juge fausse est celle voulant qu’il ait « illégalement enfoui un étang ». Selon lui, cette information était facilement vérifiable dans le jugement de la cour municipale.
Premièrement, M. Verronneau estime qu’il n’a pas enfoui illégalement un étang tel que le suggère le titre d’une capsule disponible sur le site Internet de la station, intitulée « Un promoteur s’en tire avec une amende ridicule de 500 $ pour avoir enfoui illégalement un étang à Saint-Adèle ». Il explique qu’il a reçu cette amende parce qu’il n’a pas demandé de permis de déblai/remblai.
M. Michel Lorrain, directeur général du 98.5 FM, affirme que selon l’article du journaliste Pierre Schneider, paru dans l’édition du 10 septembre 2013 du Journal Accès, sous le titre « Enfouissement illégal d’un étang à Sainte-Adèle », et de l’avis de M. Spénard, le plaignant a reçu une amende pour avoir procédé à un remblaiement. Selon le mis en cause, le plaignant admet ne pas avoir demandé de permis pour procéder à cette opération, ce qui corrobore les faits avancés par MM. Schneider et Spénard.
Dans la décision 2013-09-031, opposant le plaignant au Journal Accès, le Conseil a déjà statué sur l’exactitude des mots « enfouissement », « illégal » et « étang ». Dans l’édition 1995 du Petit Larousse, on peut lire que le verbe enfouir signifie : « Mettre en terre. Cacher, enterrer sous; dissimuler. » Le même dictionnaire définit le remblai comme étant « une masse de terre rapportée pour élever un terrain ou combler un creux ». Cette dernière définition faisait d’ailleurs partie de celles retenues par le juge qui a présidé le procès opposant la Ville de Sainte-Adèle aux Développements Béarence inc., l’entreprise du plaignant. Le juge a également déterminé que les travaux ont été réalisés sans permis, ce qui constitue une infraction au règlement municipal. En ce qui concerne le mot « étang », le Conseil a déterminé que les sources du journaliste du Journal Accès utilisaient abondamment ce terme. De plus, le rapport de biologiste, daté du 29 novembre 2006, fourni au Conseil par le plaignant ne qualifie pas le type de milieu humide présent à cet endroit. Le Conseil ne constate aucune inexactitude dans le titre de la capsule. Ce point du grief est rejeté.
Deuxièmement, le plaignant soutient qu’il est faux de prétendre, comme l’affirme M. Arcand, que M. Schneider a mené une véritable enquête. Selon lui, le journaliste du Journal Accès n’a communiqué ni avec lui ni avec le biologiste, n’a pas consulté les cartes topographiques et n’a pas rapporté correctement les faits inscrits dans le jugement de Cour.
En lisant l’article de M. Schneider, on constate qu’il s’est rendu sur les lieux, qu’il cite des extraits du jugement de la cour municipale et de la correspondance de M. Spénard avec la préposée à l’environnement de la municipalité et enfin qu’il a obtenu des explications du ministère du Développement durable, de l’Environnement, des Parcs et de la Faune du Québec. M. Arcand était libre d’exprimer son opinion sur le résultat d’un tel travail pouvant être considéré comme relevant du journalisme d’enquête. Ce point du grief est rejeté.
Troisièmement, M. Véronneau conteste l’affirmation de M. Arcand voulant que le plaignant ait déversé des débris de construction dans un étang. M. Verronneau soutient qu’il n’y a jamais eu d’accusation de déversement et qu’il n’y aurait même jamais eu d’étang à cet endroit.
Le représentant des mis en cause indique que le dossier du remblaiement de l’étang a fait l’objet d’une vérification par la responsable de l’environnement du secteur et que rien ne permet de penser qu’il ne s’agit pas d’une affaire de remblaiement illégal.
En écoutant ce segment de l’émission, le Conseil note que l’animateur précise qu’il s’agit de terre et de roche, soit des matériaux utilisés pour faire du remblai, ce dont l’entreprise de M. Verronneau a été reconnue coupable. Ce point du grief est rejeté.
Quatrièmement, M. Verronneau conteste l’affirmation de M. Arcand concernant le fait que « des citoyens autour entretiennent bénévolement l’endroit » et que « c’est un lieu où l’on peut aller se promener ». Selon le plaignant, c’est faux puisqu’il s’agit d’un terrain privé avec des écriteaux interdisant le passage.
De l’avis du mis en cause, il s’agit d’un détail qui ne change rien au dossier.
En écoutant l’enregistrement du procès contre le propriétaire des terrains voisins à ceux de M. Verronneau, soit Construction J.S.D. de Trois-Rivières inc., on peut entendre M. Spénard expliquer qu’il entretient dans ce secteur des sentiers de vélo de montagne et de ski de fond. Lors de son témoignage, M. Verronneau confirme que M. Spénard entretenait des sentiers. L’animateur n’avait donc pas tort de parler du travail de bénévoles et de noter que des gens vont s’y promener. Le Conseil rejette ce point du grief.
Finalement, le plaignant reproche à l’animateur d’avoir dit en ondes : « c’est la compagnie de Martin Verronneau qui s’est fait imposer une amende de 500 $ ». M. Véronneau se demande pourquoi il n’a pas nommé l’entreprise ou l’ensemble des administrateurs de l’entreprise.
Le mis en cause fait valoir que M. Verronneau est le président de la compagnie directement visée dans cette affaire. Selon lui, il est donc normal que son nom soit mentionné par M. Arcand.
Le Conseil reconnaît qu’à titre de président de l’entreprise Les Développements Béarence inc., il était pertinent de nommer M. Verroneau. Le Conseil rejette ce point du grief.
Pour toutes ces raisons, le Conseil rejette le grief pour titre et informations inexacts.
Grief 2 : incomplétude
Le plaignant reproche à l’animateur de ne pas avoir communiqué avec le biologiste ayant caractérisé les lieux pour vérifier les allégations concernant la présence d’un étang. Il rapporte que le rapport de ce biologiste soutient qu’il n’y a jamais eu d’étang à cet endroit.
Le Conseil rappelle que les journalistes jouissent d’une liberté en ce qui concerne les choix rédactionnels et le traitement journalistique. Ils ont donc la liberté de choisir leur angle de traitement. Le sujet discuté lors de l’émission concerne effectivement la dénaturalisation d’un milieu humide et les démarches pour sa remise en état. Qu’il s’agisse d’un étang ou d’un marécage est un élément secondaire. Le journaliste ne commettait pas de faute en ne communiquant pas avec le biologiste, pour obtenir son avis sur l’état initial du terrain.
Le Conseil rejette le grief pour incomplétude.
Grief 3 : manque d’équilibre
M. Verronneau déplore que l’animateur n’ait pas communiqué avec lui pour obtenir sa version des faits. Il estime que cela aurait permis aux auditeurs d’avoir une information juste et équilibrée. Le plaignant note qu’à la lecture de l’article, M. Arcand a pu constater que le texte de M. Schneider ne rapportait qu’une version des faits.
Dans sa réplique, M. Michel Lorrain note que l’animateur mentionne qu’il s’agit d’un article du Journal Accès. M. Lorrain soutient que c’est dans le but de valider les faits et d’obtenir une deuxième source d’information que l’animateur interviewe un témoin dans cette affaire, M. Richard Spénard.
Dans son commentaire, le plaignant fait remarquer que M. Spénard est l’instigateur et principale source d’information dans l’article de M. Pierre Schneider du Journal Accès. On ne peut donc pas le considérer comme une deuxième source.
Dans le présent dossier, le Conseil constate qu’il n’y a pas de véritable controverse sur le point central du sujet abordé dans l’émission, c’est-à-dire qu’un juge a condamné la compagnie de M. Verronneau pour avoir effectué des travaux de remblaiement sans permis. L’essentiel de la critique du plaignant porte sur un aspect secondaire, sur lequel M. Arcand ne s’est pas arrêté, soit l’état initial du terrain remblayé. Pour le Conseil, il n’était pas nécessaire de présenter le point de vue du plaignant sur cette question secondaire.
Le Conseil rejette le grief pour manque d’équilibre.
Décision
Au vu de ce qui précède, le Conseil de presse du Québec rejette la plainte de M. Martin Verronneau contre l’animateur Paul Arcand et la station 98,5 FM pour les griefs de titre et informations inexacts, d’incomplétude et de manque d’équilibre.
La composition du comité des plaintes lors de la prise de décision :
Représentants du public :
Mme Audrey Murray
Mme Micheline Rondeau-Parent
Représentants des journalistes :
M. Vincent Larouche
M. Luc Tremblay
Représentants des entreprises de presse :
M. David Johnston
M. Raymond Tardif
Analyse de la décision
- C11B Information inexacte
- C11F Titre/présentation de l’information
- C12A Manque d’équilibre
- C12B Information incomplète