Plaignant
M. Jacques Bois
Mis en cause
M. Éric Bernard, directeur général et l’hebdomadaire L’Oie Blanche
Résumé de la plainte
M. Jacques Bois dépose une plainte le 27 juin 2014 contre l’hebdomadaire L’Oie Blanche et son directeur général, M. Éric Bernard. Le plaignant dénonce le refus du journal de publier sa lettre intitulée « Pompier “pomme pourrite” » (sic) dans le courrier des lecteurs.
Dans cette lettre, M. Bois rapporte la façon dont la mairesse de Sainte-Perpétue a interpellé un pompier opposé à l’augmentation de la rémunération des élus de cette municipalité. M. Bois met également en doute le jugement de la mairesse et demande sa démission.
Entre février et mai 2014, l’hebdomadaire a publié trois lettres ouvertes de M. Bois traitant de la hausse de rémunération des élus de Sainte-Perpétue.
Analyse
Grief 1 : refus de publier une lettre ouverte
M. Jacques Bois reproche au directeur général de l’hebdomadaire L’Oie Blanche, M. Éric Bernard, d’avoir refusé de publier sa lettre ouverte. Il soutient que cette décision a été prise en réaction à des pressions exercées par la mairesse de Sainte-Perpétue. Irritée par la publication des trois premières lettres ouvertes signées par M. Bois, la mairesse aurait contacté M. Bernard, afin de lui signifier qu’en acceptant de publier les lettres de M. Bois, l’hebdomadaire contribuait à alimenter la grogne à son égard. Selon le plaignant, elle aurait précisé que des avocats du ministère des Affaires municipales et de l’Occupation du territoire étaient dans le dossier. M. Bois affirme que par la suite, la direction générale de l’hebdomadaire aurait modifié les règles internes afin que la sélection des lettres d’opinion relève de la direction générale. Dans sa plainte, M. Bois écrit : « le D.G. Bernard m’a dit qu’il ne veut pas s’exposer et être accusé d’alimenter la grogne et d’avoir affaire à des avocats ». Le plaignant rapporte que M. Bernard lui a rappelé que le journal avait déjà publié trois de ses lettres d’opinions et qu’il n’avait pas l’obligation de le faire. M. Bernard lui aurait proposé qu’un journaliste réalise une entrevue avec lui, puis avec la mairesse.
Dans sa réplique, le mis en cause souligne que l’hebdomadaire a déjà publié trois lettres d’opinion signées par le plaignant et que son opinion a déjà été présentée dans un article concernant la hausse de rémunération des élus. M. Bernard confirme que la mairesse l’a contacté après ces publications. Elle aurait soutenu que la publication de ces lettres « représentait de l’acharnement envers la municipalité et ses conseillers municipaux et qu’elle envisageait de s’adresser à des avocats si d’autres lettres d’opinion étaient publiées ». M. Bernard confirme qu’il a alors décidé de déplacer la responsabilité de publier ou non une lettre d’opinion vers la direction générale du journal. Il estime que le refus de publier la nouvelle lettre du plaignant est fondé sur des raisons journalistiques : elle traitait du même sujet que les trois précédentes, c’est-à-dire la rémunération de la mairesse, et qu’elle n’apportait rien de nouveau. Il note de plus que l’hebdomadaire n’a pas l’obligation de publier toutes les lettres d’opinion provenant de ses lecteurs. Le directeur général indique également qu’il n’a pas publié un nouvel article sur le sujet comme il l’avait évoqué avec le plaignant parce que la mairesse a refusé d’accorder son point de vue.
Dans son commentaire, le plaignant regrette que le directeur général prenne en compte le nombre de lettres publiées plutôt que la « pertinence du propos ». Il assure que sa lettre respectait les limites de la liberté d’expression. Il soutient que les faits abordés dans sa lettre n’avaient pas été traités auparavant. Le plaignant estime qu’en refusant de publier la lettre pour protéger les intérêts de son journal, M. Bernard est allé à l’encontre de son devoir de journaliste qui est, selon M. Bois, de défendre la liberté de l’information, de refuser toute pression et de n’accepter aucune ingérence. Le plaignant considère que l’hebdomadaire devrait consacrer davantage d’espace pour les lettres des lecteurs.
Le guide de déontologie du Conseil de presse, Droits et responsabilités de la presse (DERP), stipule que même si les médias doivent favoriser l’accès du public aux tribunes, le public n’y a pas pour autant accès de plein droit. Cependant, le DERP mentionne également : « [Les journaux] peuvent refuser de publier certaines lettres, à condition que leur refus ne soit pas motivé par un parti pris, une inimitié ou encore par le désir de taire une information d’intérêt public qui serait contraire au point de vue éditorial ou nuirait à certains intérêts particuliers. » (p. 38)
Après analyse, le Conseil estime que le plaignant n’a pas fait la preuve que le mis en cause commettait une faute professionnelle en refusant de publier la nouvelle lettre d’opinion de M. Bois. Le Conseil constate plutôt que ce refus, bien qu’il soit intervenu après une intervention de la mairesse de Sainte-Perpétue, se justifiait par des raisons journalistiques légitimes, la redondance de la lettre et son manque de nouveauté.
Au vu de ce qui précède, le Conseil rejette le grief pour refus de publier une lettre ouverte.
Décision
Au vu de ce qui précède, le Conseil de presse du Québec rejette la plainte de M. Jacques Bois contre le directeur général, M. Éric Bernard et l’hebdomadaire L’Oie Blanche pour le grief de refus de publier une lettre ouverte.
La composition du comité des plaintes lors de la prise de décision :
Représentants du public :
Mme Micheline Bélanger
M. Adélard Guillemette
Mme Jackie Tremblay
Représentants des journalistes :
Mme Katerine Belley-Murray
M. Marc-André Sabourin
Représentant des entreprises de presse :
M. Raymond Tardif
Analyse de la décision
- C08F Tribune réservée aux lecteurs
- C19A Absence/refus de rectification
Date de l’appel
8 February 2016
Appelant
M. Jacques Bois
Décision en appel
PRÉAMBULE
Lors de l’étude d’un dossier, les membres de la commission d’appel doivent s’assurer que les principes déontologiques ont été appliqués correctement en première instance.
GRIEFS DE L’APPELANT
L’appelant conteste la décision de première instance relativement à un grief :
- Grief 1 : refus de publier une lettre ouverte
Grief 1 : refus de publier une lettre ouverte
Selon l’appelant, il est faux d’affirmer que le journal a refusé de publier sa lettre sur des considérations de « redondance et de manque de nouveauté ». M. Bois soutient que sa lettre concernait la rémunération des élus, sujet qui n’avait jamais été abordé auparavant et que le journal a refusé de publier sa lettre après une intervention de la mairesse. L’appelant demande donc à ce que le grief de refus de publier une lettre ouverte soit renversé.
L’intimé réplique qu’il considère que la décision de première instance est juste et éclairée et n’a rien de plus à ajouter.
Les membres du comité de première instance ont appliqué le principe relatif à la publication de lettre ouverte qui souligne « que même si les médias doivent favoriser l’accès du public aux tribunes, le public n’y a pas pour autant accès de plein droit. Cependant, le DERP mentionne également : [Les journaux] peuvent refuser de publier certaines lettres, à condition que leur refus ne soit pas motivé par un parti pris, une inimitié ou encore par le désir de taire une information d’intérêt public qui serait contraire au point de vue éditorial ou nuirait à certains intérêts particuliers. » (p. 38)
Les membres du comité de première instance concluaient au paragraphe [8] : « Après analyse, le Conseil estime que le plaignant n’a pas fait la preuve que le mis en cause commettait une faute professionnelle en refusant de publier la nouvelle lettre d’opinion de M. Bois. Le Conseil constate plutôt que ce refus, bien qu’il soit intervenu après une intervention de la mairesse de Sainte-Perpétue, se justifiait par des raisons journalistiques légitimes, la redondance de la lettre et son manque de nouveauté. »
Les membres de la commission d’appel concluent que le comité de première instance a appliqué correctement le principe déontologique relatif à la publication de lettre ouverte.
DÉCISION
Après examen, les membres de la commission d’appel ont conclu à l’unanimité de maintenir la décision rendue en première instance.
Par conséquent, conformément aux règles de procédure, l’appel est rejeté et le dossier cité en titre est fermé.
La composition de la commission d’appel lors de la prise de décision :
Représentants du public :
- Mme Hélène Deslauriers
- M. Pierre Thibault
Représentant des journalistes :
- M. Claude Beauchamp
Représentants des entreprises de presse :
- M. Denis Bélisle
- M. Pierre Sormany