Plaignant
Curateur public du Québec
Mme Josée Saindon, directrice des communications
Mis en cause
Mme Mélanie Bergeron, journaliste
Le Groupe TVA
Résumé de la plainte
Mme Josée Saindon, directrice des communications du Curateur public du Québec, dépose le 25 mai 2016 au nom de cet organisme une plainte contre la journaliste Mélanie Bergeron et le Groupe TVA concernant un reportage intitulé « Bataille contre la curatelle », ainsi que des annonces pour ce même reportage, tous diffusés le 12 mai 2016, à divers moments de la journée, sur les ondes de TVA et LCN. La plaignante vise en outre une version écrite de ce reportage, intitulée « Un aîné dépouillé de ses biens après avoir été sous curatelle publique » et diffusé sur le site Internet de LCN, également le 12 mai 2016, ainsi que le contenu diffusé en lien avec le reportage sur les pages Facebook et Twitter des mis en cause. La plaignante déplore des informations inexactes, de l’information incomplète, un manque d’équilibre, une omission de vérifier la fiabilité d’une information et l’absence de correctif.
La plaignante demande également au Conseil d’interdire aux mis en cause de présenter le matériel journalistique qui fait l’objet de la présente plainte à un concours ou de l’intégrer à un portfolio. Le Conseil n’imposant pas de telles sanctions aux mis en cause, ce grief n’a pas été traité.
Le Groupe TVA a refusé de répondre à la présente plainte.
Dans le reportage mis en cause, la journaliste rapporte les critiques d’un homme quant à la façon dont le Curateur public du Québec a administré ses biens durant une période où il s’est retrouvé sous tutelle.
Analyse
Grief 1 : informations inexactes
La plaignante considère que dix éléments d’information présentés dans le reportage, l’article et les présentations visés par la présente plainte sont inexacts.
1.1 « La curatelle publique a vendu tous ses biens »
La plaignante estime que la journaliste affirme à tort, lors de la présentation d’aperçus du reportage, que le Curateur public est responsable de la vente de tous les biens de l’homme faisant l’objet du reportage. Une affirmation réitérée par l’avocate de ce dernier, qui soutient dans le reportage : « ils l’ont lavé de tous ses biens ».
En se basant sur des jugements de la Cour supérieure, la plaignante argumente que la vente de l’immeuble dont il est fait mention a été demandée par la soeur de l’homme. De plus, contrairement à ce qu’à son avis, la journaliste insinue lors de la présentation d’un aperçu du reportage à l’émission « TVA Nouvelles de 17h » ━ « Il a tenté de faire bloquer le processus de vente avec son avocate il y a déjà deux ans et demi. Mais ça n’a pas fonctionné » ━, le Curateur public n’a rien à voir avec l’échec de cette tentative, soutient la plaignante.
Enfin, elle déplore que la journaliste suggère la responsabilité du Curateur public lorsqu’elle déclare, dans la présentation d’un aperçu du reportage à LCN : « on s’est débarrassé de tous les biens qu’il avait à l’intérieur de l’appartement ». Selon un jugement de la Cour supérieure, c’est la Ville de Montréal qui a fait « nettoyer » l’appartement à quatre reprises au cours d’une période de six ans.
En matière d’exactitude, le Guide de déontologie journalistique du Conseil de presse précise à l’article 9, alinéa a) que « [l]es journalistes et les médias d’information produisent, selon les genres journalistiques, de l’information possédant les qualités suivantes : a) exactitude : fidélité à la réalité ».
De plus, le Guide rappelle à l’article 11 que « [l]es journalistes prennent les moyens raisonnables pour évaluer la fiabilité des informations transmises par leurs sources, afin de garantir au public une information de qualité ».
À la lecture des jugements de la Cour supérieure invoqués par la plaignante, le Conseil constate que ceux-ci confirment les faits avancés par la plaignante, et par le fait même, les inexactitudes de la journaliste.
Le grief est retenu sur ce point.
1.2 Propriété exclusive de l’immeuble
Selon la plaignante, la journaliste laisse entendre à plusieurs reprises que l’homme présenté dans le reportage avait la propriété exclusive de l’immeuble vendu durant la période où il était sous tutelle. La journaliste parle de « son immeuble » et affirme que « ses biens ont tous été vendus », déplore la plaignante, qui pointe des jugements de cour indiquant que l’homme était plutôt copropriétaire de l’immeuble avec sa soeur. Il devait également partager les recettes de la vente de l’immeuble avec son épouse puisqu’ils étaient en instance de divorce, souligne la plaignante. Cette dernière observe que la journaliste mentionne la copropriété de l’immeuble lors de la présentation d’un aperçu du reportage à LCN, en après-midi, mais pas à TVA ni sur les plateformes web du Groupe TVA.
Après analyse, la majorité des membres (4/6) juge que la journaliste transmet une information inexacte en laissant croire que l’homme a la propriété exclusive de l’immeuble dont il est question puisque le jugement de la Cour supérieure mis en preuve par la plaignante établit clairement que cet immeuble a été acquis par l’homme et sa soeur.
Le grief est retenu à la majorité sur ce point.
1.3 L’homme « a été évincé pour faire place à l’acheteur »
La plaignante considère que le contexte du reportage laisse entendre à tort que le Curateur public a expulsé l’homme qui était sous tutelle lorsque la journaliste affirme qu’il « a été évincé pour faire place à l’acheteur ». En s’appuyant sur un jugement de la Cour supérieure, la plaignante fait valoir que ce sont les démarches judiciaires de la soeur de l’homme qui ont mené à son éviction de l’appartement.
Après analyse du reportage, le Conseil juge que celui-ci ne laisse pas entendre que le Curateur public est responsable de l’éviction de l’homme.
Le grief est rejeté sur ce point.
1.4 L’homme n’était pas inapte et tenait un discours cohérent
Dans la présentation de l’aperçu du reportage à LCN, la journaliste affirme, en parlant de l’homme : « donc deux années sous curatelle alors qu’il vivait des problèmes peut-être dépressifs, mais pas au point d’être inapte ». L’avocate de celui-ci, interviewée par la journaliste, affirme quant à elle que son client « tenait un discours cohérent ». La plaignante se réfère à des jugements de la Cour supérieure pour démontrer que ces affirmations sont incompatibles avec l’évaluation légale de l’état psychique et de la cohérence du discours de l’homme faisant l’objet du reportage.
Le Conseil constate que le document présenté dans le reportage, et sur lequel on peut lire que l’homme est apte, n’est pas identifié. Le téléspectateur ne peut donc pas en évaluer la valeur. Par ailleurs, le constat de mainlevée du régime de protection de tutelle, que le Conseil a pu consulter, ne contredit pas l’évaluation légale faite quelques années auparavant au moment de l’ouverture du régime de protection. On y lit que les réévaluations médicale et psychosociale de l’homme ont permis d’observer que sa situation a suffisamment changé pour mettre un terme au régime de protection. Aux yeux du Conseil, il était donc inexact de laisser entendre que l’homme n’était pas inapte lorsqu’il a été mis sous tutelle.
Le grief est retenu sur ce point.
1.5 Les problèmes de l’homme ont commencé lorsqu’il a été placé sous tutelle
Lors de la présentation de l’aperçu du reportage au « TVA Nouvelles de 17h », la journaliste affirme : « Mais finalement il a été mis sous curatelle et c’est là que ses problèmes ont commencé. » Selon la plaignante, cette affirmation ne reflète pas la réalité, puisque l’homme a vécu, avant sa mise sous tutelle en 2011, de nombreux ennuis juridiques et financiers en lien avec son immeuble : condamnation à plusieurs amendes pour des infractions à la réglementation municipale sur la salubrité, hypothèques légales, démarches de sa soeur pour obtenir la mise en vente de l’immeuble, etc. Elle appuie ses dires sur un jugement rendu en 2013 par la Cour supérieure dans lequel on relate les ennuis vécus par l’homme au cours des années précédant sa mise sous tutelle.
Pour la moitié des membres du comité (3/6), dont la présidente du comité qui a ainsi dû faire usage de son vote prépondérant, l’affirmation de la journaliste laisse croire à tort que le Curateur public est responsable des problèmes évoqués dans le reportage (vente de son immeuble, perte de ses biens, éviction, etc.) alors que le jugement mis en preuve indique que ces ennuis ont effectivement commencé avant la mise sous tutelle de l’homme.
Trois membres dissidents estiment pour leur part que le terme « problème » est flou et que ce qui peut être considéré comme tel par une personne ne l’est pas par une autre. De plus, ils considèrent que la journaliste ne laisse aucunement entendre que tout était parfait dans la vie de l’homme avant sa mise sous tutelle, mais bien que les problèmes dont fait état le reportage ont effectivement commencé après sa mise sous tutelle.
Le grief est retenu à la majorité sur ce point en raison du vote prépondérant de la présidente du comité.
1.6 Utilisation fautive du terme « curatelle »
La plaignante souligne que la journaliste, dans ses interventions sur toutes les plateformes visées, utilise l’expression « curatelle » tour à tour pour désigner le régime de protection auquel a été soumis l’homme dont elle présente l’histoire et pour désigner le Curateur public du Québec. Or, la plaignante fait valoir qu’il existe une différence entre le régime de curatelle et le régime de tutelle, et précise que c’est le deuxième régime qui s’est appliqué dans le cas de cet homme. Elle ajoute que la dénomination « Curatelle publique » a été remplacée « il y a plus de 25 ans » par « Curateur public du Québec ».
Après vérification, le Conseil juge qu’il était inexact d’affirmer que l’homme était sous curatelle puisqu’il était plutôt sous tutelle. Ces deux termes ne sont pas synonymes comme l’indique le site Internet d’information juridique éducaloi.qc.ca qui précise que « la curatelle peut être établie en faveur des adultes qui souffrent d’une inaptitude totale […] et permanente » alors que la tutelle est plus appropriée lorsque « l’inaptitude est partielle ou temporaire ». Quant au changement de dénomination, il a eu lieu en 1990, lors de l’adoption de la Loi sur le curateur public, qui remplaçait la Loi sur la curatelle publique.
Le grief est retenu sur ce point.
1.7 Millionnaire
La plaignante considère inexacte l’affirmation de l’homme : « de millionnaire que j’étais avant, j’étais devenu… rien! ». Elle déplore que la journaliste n’ait pas vérifié cette information, qui n’est pas conforme à la réalité selon elle puisqu’un jugement de la Cour supérieure démontre que le bilan financier de l’homme était déficitaire.
À la lecture du jugement mis en preuve, le Conseil confirme la prétention de la plaignante.
Aux yeux de la majorité des membres (5/6), le manquement de la journaliste n’est pas lié au fait d’avoir laissé l’homme faire cette affirmation, mais plutôt de ne pas avoir effectué une contre-vérification qui aurait permis de constater l’inexactitude. La vérification était d’autant plus importante qu’il s’agissait d’un élément central du reportage permettant au public d’évaluer l’ampleur du préjudice qui aurait été causé à l’homme durant la période où il était sous tutelle.
Le grief est retenu à la majorité sur ce point.
1.8 Le rapport du médecin aurait un effet rétroactif
Dans le reportage, l’avocate de l’homme dont on présente l’histoire affirme : « Même si la dénonciation était faite à l’effet qu’il était apte et qu’on attendait un rapport du médecin, ils ont hâté la situation, hâté le dossier. » La plaignante souligne que d’avoir fait une dénonciation à l’effet que l’homme présenté dans le reportage était apte et d’être en attente du rapport du médecin ne pouvait avoir un effet sur la situation de ce dernier, alors sous tutelle. Dire le contraire équivaudrait à donner au rapport du médecin un effet rétroactif. D’ailleurs, seul un jugement de mainlevée prononcé par un juge pouvait le libérer de la tutelle, argumente la plaignante.
La majorité des membres (5/6) juge qu’il n’y a pas de manquement à l’exactitude dans cette citation de l’avocate, puisqu’il s’agit davantage de l’expression d’une opinion que d’un fait.
Le grief est rejeté à la majorité sur ce point.
1.9 L’homme a été victime d’une « injustice flagrante »
Dans le reportage, l’avocate de l’homme dont on présente les critiques affirme que ce dernier a été victime d’une « injustice flagrante ». Or, fait valoir la plaignante, le recours intenté par l’avocate auprès de la Cour supérieure pour faire invalider la vente de l’immeuble de son client était, selon le juge, « mal fondé » et « son refus de prendre acte des jugements antérieurs et de leur caractère final doit être qualifié d’abusif ».
Aux yeux du Conseil l’affirmation de l’avocate ne peut constituer une inexactitude puisqu’elle s’inscrit davantage dans l’expression d’une opinion que d’un fait, puisqu’il s’agit ici de l’évaluation du caractère juste ou injuste d’une situation fort complexe. Cette appréciation est évidemment subjective, et une décision judiciaire ne saurait venir clore toute possibilité de débattre socialement du caractère équitable ou inéquitable d’une situation.
Le grief est rejeté sur ce point.
1.10 Le curateur public ne rend aucun compte de la gestion de l’argent des personnes sous tutelle
Dans la présentation d’un aperçu du reportage au « TVA Nouvelles » de 12h, la journaliste affirme : « On a parlé avec une association. Les gens n’ont pas accès aux factures, ou ne savent pas ce que la curatelle fait avec leur argent. » Or, selon la plaignante, le relationniste du Curateur public avait informé la journaliste par courriel, quelques minutes avant son intervention en ondes, que : « Le Curateur public du Québec rend compte aux familles, proches et personnes démontrant un intérêt particulier pour la personne représentée, lorsqu’ils en font la demande. »
La majorité des membres (5/6) juge que l’information transmise par le représentant de l’Association pour la défense des personnes et de leurs biens sous curatelle publique est inexacte, puisque comme le précise le relationniste du Curateur public, il est possible pour les proches d’obtenir des informations. Ces membres rappellent que la journaliste avait la responsabilité de valider l’information transmise par sa source.
Le grief est retenu à la majorité sur ce point.
Au vu de ce qui précède, le grief d’informations inexactes est retenu en ce qui concerne la vente des biens de l’homme faisant l’objet du reportage, le fait qu’il avait la propriété exclusive de l’immeuble, son aptitude et la cohérence de son discours, le moment où ses problèmes ont commencé, l’utilisation du terme « curatelle », le fait qu’il était millionnaire et l’absence de reddition de compte du Curateur public concernant la gestion de l’argent des personnes sous tutelle.
Grief 2 : information incomplète
Dans le reportage, l’homme dont on rapporte les critiques dit : « La manière qu’eux autres font les choses, c’est pas normal, c’est pas humain! » La plaignante considère qu’« une entrevue avec le Curateur public du Québec aurait permis de lui [la journaliste] citer deux jugements qui démontrent que le Curateur public a tenté d’accéder au désir de monsieur de demeurer dans l’immeuble en envisageant d’hypothéquer et de racheter la part de sa soeur, mais que c’était impossible. » La plaignante déclare qu’il aurait fallu inclure cette information, afin de répondre aux interrogations du public.
À l’article 9, alinéa e), le Guide décrit ainsi le devoir de complétude des journalistes et des médias d’information : « [Ils] produisent, selon les genres journalistiques, de l’information possédant les qualités suivantes : […] e) complétude : dans le traitement d’un sujet, présentation des éléments essentiels à sa bonne compréhension, tout en respectant la liberté éditoriale du média. »
Le Conseil juge qu’il était essentiel de référer au contenu des jugements mis en preuve par la plaignante afin de permettre au public de bien saisir la portée et l’étendue des tentatives du Curateur public pour trouver une solution qui satisfasse l’homme sous tutelle, une information qui serait venue dépeindre un portrait fort différent de celui que brosse la journaliste.
Le grief d’information incomplète est retenu.
Grief 3 : manque d’équilibre
La plaignante déplore que le point de vue du Curateur public et sa version des faits ne soient pas présentés par la journaliste. Le relationniste du Curateur public avait informé la journaliste, par courriel, que l’homme faisant l’objet du reportage devait donner son consentement écrit afin que le Curateur puisse être autorisé à parler de son dossier, rapporte la plaignante. Selon la correspondance mise en preuve, Mme Bergeron a répondu au relationniste : « Comme je ne suis plus avec lui, impossible d’avoir une lettre par écrit. »
En matière d’équilibre, le Guide, à l’article 9, alinéa d), prévoit que « [l]es journalistes et les médias d’information produisent, selon les genres journalistiques, de l’information possédant les qualités suivantes : […] d) équilibre : dans le traitement d’un sujet, présentation d’une juste pondération du point de vue des parties en présence. »
De façon générale, la jurisprudence du Conseil rappelle qu’un traitement équilibré doit être accordé lorsqu’il s’agit de questions controversées. Dans la décision D2016-01-085, le Conseil avait déploré la précipitation avec laquelle les mis en cause avaient mis en ondes un reportage présentant les doléances d’une famille suspectant qu’un salon funéraire avait échangé les cendres de leur père avec celle d’un autre homme sans attendre la version de l’entreprise funéraire. Aux yeux du Conseil, rien ne justifiait une diffusion aussi rapide, surtout dans un contexte où l’enjeu réputationnel était aussi important.
Le Conseil constate que dans l’une de ses interventions à LCN, la journaliste indique : « Nous avons demandé la réaction du curateur public, qui est en déplacement vers Québec, aujourd’hui. Et ce qu’on nous a répondu, c’est que ça prend une autorisation écrite de l’homme pour commenter son dossier, ce qu’on n’a pas pour le moment, mais on peut commenter de façon générale, et on se rend compte que des dossiers se multiplient, donc d’autres réactions au TVA Nouvelles de 18 heures. » (sic)
Dans une intervention au « TVA Nouvelles » à 17h16, la journaliste rapporte que le Curateur n’a pas réagi et note qu’il faudrait une autorisation de l’homme pour que le Curateur puisse commenter ce dossier précis, « sinon, on aurait commenté en général sur la gestion des biens », dit-elle.
Dans le reportage présenté à 18h14 au « TVA Nouvelles », on constate que la journaliste ne fait aucune référence à la position du Curateur public évoquée dans ses interventions précédentes. Même chose dans le cas de l’article publié sur le site tvanouvelles.ca et lors de son intervention à 12h52 au « TVA Nouvelles ».
Le Conseil juge que l’importance du sujet nécessitait que les mis en cause présentent la version des faits du Curateur public. Ainsi, la journaliste aurait dû accepter l’offre du Curateur public de commenter le dossier, ce qu’elle n’a pas fait, même si celui-ci devait se limiter à des commentaires plus généraux, n’ayant pas obtenu l’autorisation de l’homme faisant l’objet du reportage.
De plus, le lendemain de la diffusion du reportage, la plaignante faisait parvenir aux mis en cause une lettre répondant à certains faits présentés dans le reportage. L’obligation d’équilibre pouvant s’accomplir dans le temps, les mis en cause auraient dû faire état de la position du Curateur public dans un reportage de suivi. Le Conseil constate que la précipitation semble être la source de ce manquement, ce qu’il juge regrettable.
Le grief de manque d’équilibre est retenu.
Grief 4 : omission de vérifier la fiabilité d’une information
La plaignante estime que la journaliste a « manqué de distance critique envers Ura Greenbaum en généralisant un seul cas mal documenté ». Elle affirme que M. Greenbaum, directeur de l’Association pour la défense des personnes et de leurs biens sous curatelle publique et interviewé dans le reportage, a été radié du Barreau du Québec et désigné plaideur vexatoire, ce qui remet en question sa crédibilité.
Afin d’assurer la fiabilité des informations transmises par les sources, l’article 11 du Guide, stipule : « Les journalistes prennent les moyens raisonnables pour évaluer la fiabilité des informations transmises par leurs sources, afin de garantir au public une information de qualité. »
Le Conseil constate que M. Greenbaum est porte-parole d’une Association et qu’à ce titre, il est régulièrement cité dans les médias. Dans le cas présent, le Conseil juge qu’il constituait un intervenant pertinent.
Le grief d’omission de vérifier la fiabilité d’une information est rejeté.
Grief 5 : absence de correctif
La plaignante déplore que les mis en cause n’aient apporté aucun correctif à leurs erreurs. Le relationniste du Curateur public mentionne qu’une lettre signalant ces erreurs a été envoyée aux mis en cause par service de messagerie le lendemain de la diffusion du reportage. Afin de corriger une erreur, la plaignante demande le retrait d’une publication sur Twitter et de vidéos sur les plateformes du Groupe TVA. De plus, elle souhaite que le Conseil impose des conditions à la rediffusion des reportages corrigés.
Selon l’article 27.1 du Guide, « [l]es journalistes et les médias d’information corrigent avec diligence leurs manquements et erreurs, que ce soit par rectification, rétractation ou en accordant un droit de réplique aux personnes ou groupes concernés, de manière à les réparer pleinement et rapidement. »
Considérant les fautes relevées aux griefs précédents, le Conseil juge que les mis en cause auraient dû apporter des correctifs au reportage « Bataille contre la curatelle » et à l’article « Un aîné dépouillé de ses biens après avoir été sous curatelle publique » mis en ligne sur le site Internet tvanouvelles.ca.
Cependant, le Conseil ne saurait accueillir le grief de dépublication, puisqu’il estime que la question, sur laquelle il ne s’est jamais officiellement prononcé, mérite une réflexion approfondie.
Le grief d’absence de correctif est retenu.
Refus de collaborer
Le Conseil déplore le refus de collaborer du Groupe TVA, qui n’est pas membre du Conseil de presse, en ne répondant pas à la présente plainte.
Décision
Au vu de ce qui précède, le Conseil de presse du Québec retient la plainte de Mme Josée Saindon, directrice des communications du Curateur public du Québec, et blâme la journaliste Mélanie Bergeron et le Groupe TVA pour informations inexactes, information incomplète, manque d’équilibre et absence de correction. Cependant, il rejette le grief d’omission de vérifier la fiabilité d’une information.
Le Conseil de presse du Québec rappelle que : « Lorsqu’une plainte est retenue, l’entreprise de presse visée par la décision a l’obligation morale de la publier ou de la diffuser. Les entreprises de presse membres s’engagent pour leur part à respecter cette obligation, et à faire parvenir au secrétariat du Conseil une preuve de cette diffusion au maximum 30 jours suivant la date de la décision. » (Règlement No 2, article 9.3)
Linda Taklit
Présidente du sous-comité des plaintes
La composition du sous-comité des plaintes lors de la prise de décision :
Représentants du public :
- M. Luc Grenier
- Mme Linda Taklit
Représentants des journalistes :
- Mme Audrey Gauthier
- M. Philippe Teisceira-Lessard
Représentants des entreprises de presse :
- M. Jed Kahane
- M. Raymond Tardif