Plaignant
Mme Christine Caron, mairesse de Saint-Simon-les-Mines
Mis en cause
Jean-François Fecteau, journaliste
L’hebdomadaire L’Éclaireur Progrès
Résumé de la plainte
Mme Christine Caron, mairesse de Saint-Simon-les-Mines, dépose une plainte le 28 mars 2017 contre le journaliste Jean-François Fecteau et l’hebdomadaire L’Éclaireur Progrès concernant l’article « Saint-Simon-Les-Mines n’a plus de directrice générale » publié le 21 février 2017. La plaignante dénonce de l’information inexacte et un refus d’apporter un correctif.
Dans l’article mis en cause, le journaliste rapporte que la municipalité a « limogé » la personne qui occupait la fonction de directrice générale depuis 36 ans.
Analyse
Grief 1 : information inexacte
Mme Christine Caron, mairesse de la municipalité de Saint-Simon-les-Mines, reproche au journaliste d’avoir erronément utilisé le terme « limogé » pour qualifier la fin d’emploi de la directrice générale de la municipalité de Saint-Simon-les-Mines, Mme Francine Poulin, dans la phrase suivante : « Le conseil municipal de Saint-Simon-Les-Mines a récemment limogé sa directrice générale, Francine Poulin, qui était au service de la localité depuis 36 ans. »
La plaignante affirme qu’il y a eu une « entente de fin d’emploi d’un commun accord » entre la municipalité et sa directrice générale, ainsi qu’une « entente de confidentialité pour toutes les parties impliquées et entourant les détails du dossier en question ».
La plaignante soumet une définition du mot limoger, tirée du Larousse : « priver un officier, un fonctionnaire de son emploi par révocation », ce dernier terme, ajoute-t-elle, a pour définition « sanction disciplinaire frappant un fonctionnaire et consistant en son éviction ».
Mme Caron estime que « l’utilisation du terme “limoger” pour décrire la fin des 36 ans de carrière de cette employée vivant dans une municipalité de 600 habitants vient ternir, pour ne pas dire discréditer, ses années de service ». De son avis, le terme, « laisse supposer une pratique de gestion cavalière de la part de la municipalité, alors que cette dernière s’est acquittée de ses responsabilités avec respect et diligence ».
Dans sa réplique, le journaliste Jean-François Fecteau, indique avoir écouté un extrait du conseil municipal de Saint-Simon-les-Mines dans lequel la mairesse Christine Caron dit : « Nous avons mis fin à l’entente (…) le lien d’emploi avec Mme Poulin. »
Le journaliste explique avoir parlé à la mairesse de Saint-Simon-les-Mines quelques jours plus tard. Il affirme que la mairesse n’a pas dévoilé les motifs qui ont poussé la municipalité à cesser ses liens avec Mme Poulin et n’a pas indiqué que le dossier s’était conclu d’un commun accord entre les parties.
M. Fecteau rapporte que lors d’un entretien avec le conseiller municipal M. Martin St-Laurent, celui-ci lui a affirmé que ses sources « étaient au courant de plusieurs erreurs graves commises par l’ex-directrice générale ». Le conseiller, « sans s’éparpiller sur le sujet, a reconnu qu’elle avait fait certains manquements importants », affirme-t-il. De plus, ajoute le journaliste, « selon le sens de la conversation, c’est la municipalité qui souhaitait rompre ses liens avec cette dernière ».
Le journaliste fournit, à son tour, une définition du mot limoger, d’après le Larousse en ligne : « priver quelqu’un de son poste, de ses fonctions, en le déplaçant ou en le destituant ». M. Fecteau se dit convaincu que ce terme correspond au contexte de fin d’emploi de Mme Francine Poulin.
La plaignante en réponse à la réplique du journaliste maintient que la municipalité n’avait pas à préciser les motifs du départ de Mme Poulin, puisqu’il y avait un « engagement de confidentialité entre les deux parties concernées ».
Mme Caron estime que tout employé peut commettre des erreurs qui ne mènent pas nécessairement à être « limogé ».
En matière d’exactitude, le Guide de déontologie journalistique, article 9, alinéa a) mentionne : « Les journalistes et les médias d’information produisent, selon les genres journalistiques, de l’information possédant les qualités suivantes : a) exactitude : fidélité à la réalité ».
Dans sa jurisprudence, le Conseil a maintes fois statué qu’il n’a pas à établir de lexique des termes que les médias ou les professionnels de l’information doivent employer ou éviter, les décisions à cet égard relevant de leur autorité et de leur discrétion rédactionnelles. Les médias et les journalistes doivent cependant peser l’emploi des mots qu’ils utilisent, être fidèles aux faits et faire preuve de rigueur dans l’information afin de ne pas induire le public en erreur sur la vraie nature des situations ou encore l’exacte signification des événements.
En considération de la jurisprudence et des différentes définitions du terme « limoger » : « Priver quelqu’un de son poste, de ses fonctions, en le déplaçant ou en le destituant (cf. Larousse en ligne 2018) »; « Frapper (une personne haut placée, et particulièrement un haut fonctionnaire) d’une mesure de disgrâce (déplacement d’office, mise à la retraite, etc.) (cf. Le Petit Robert 2002, p. 1286) » et « Destituer, rétrograder (une personne haut placée) (cf. Multidictionnaire 1997, p. 862) », le Conseil juge que le journaliste n’a pas tenu de propos inexacts.
Le grief d’information inexacte est rejeté.
Grief 2 : refus d’apporter un correctif
La plaignante souligne qu’une demande de rectificatif a été faite au journaliste qui « a proposé de faire un correctif en ligne, mais la demande a été de le faire par le biais d’un écrit dans le même hebdo ».
M. Fecteau mentionne qu’il a reçu un appel de la mairesse le 9 mars, et assure que contrairement aux allégations de la mairesse, il ne s’était pas engagé à publier un erratum : « Je n’ai jamais affirmé ni promis à Mme Caron qu’un erratum serait produit en lien avec l’article. J’ai seulement dit que l’article n’a pas été publié en ligne outre la version numérisée de l’édition papier. » Il ajoute que Mme Caron « n’a pas mentionné son désir d’émettre une précision en réponse de l’article dans notre journal ».
En réponse au journaliste, la mairesse souligne que la municipalité n’a pas fait de correctif par écrit parce que le journaliste avait été contacté et qu’il l’avait avisée qu’un erratum serait publié dans le journal, ce qui leur convenait. Elle ajoute que s’il avait été clair qu’il n’y aurait pas d’erratum, d’autres mesures auraient été prises pour apporter un correctif à la situation.
En matière de correction des erreurs, le Guide de déontologie journalistique énonce à l’article 27.1 : « Les journalistes et les médias d’information corrigent avec diligence leurs manquements et erreurs, que ce soit par rectification, rétractation ou en accordant un droit de réplique aux personnes ou groupes concernés, de manière à les réparer pleinement et rapidement. »
Le Conseil n’ayant constaté aucune faute déontologique au grief précédent, il juge que les mis en cause n’avaient pas l’obligation d’apporter un correctif.
Le grief de refus d’apporter un correctif est rejeté.
Décision
Au vu de ce qui précède, le Conseil de presse du Québec rejette la plainte de Mme Christine Caron, mairesse de Saint-Simon-les-Mines, contre le journaliste Jean-François Fecteau et l’hebdomadaire L’Éclaireur Progrès pour les griefs d’information inexacte et de refus d’apporter un correctif.
Jacques Gauthier
Président du comité des plaintes
La composition du comité des plaintes lors de la prise de décision :
Représentant du public :
- M. Jacques Gauthier
Représentants des journalistes :
- M. Simon Chabot
- Mme Lisa-Marie Gervais
Représentants des entreprises de presse :
- M. Pierre-Paul Noreau
- Mme Nicole Tardif