Plaignant
M. Roch Dubé
Mis en cause
M. Richard Martineau
Le Journal de Montréal
Résumé de la plainte
M. Roch Dubé dépose une plainte le 1er août 2017 contre le chroniqueur Richard Martineau et Le Journal de Montréal concernant les articles « L’excision du clitoris n’est pas barbare » et « Justin et le mot barbare », publiés le 27 juillet et le 1er août 2017. Le plaignant déplore de l’inexactitude et de l’incomplétude.
Dans la première chronique, le journaliste critique le fait que, dans le cadre de la refonte du guide Découvrir le Canada : Les droits et responsabilités liés à la citoyenneté, le premier ministre prévoit retirer le mot « barbare » du segment où l’on indique que les pratiques culturelles « barbares », comme les crimes d’honneur et l’excision, sont considérées comme des crimes au Canada.
Dans la deuxième chronique, M. Martineau revient sur des textes publiés en France dans le journal Le Monde et le magazine Marianne, en réaction à sa propre chronique. Le chroniqueur mentionne la source de ses propos concernant M. Trudeau et le mot « barbare ». Il conclut que la France est « contaminée » par la rectitude politique.
Analyse
Griefs non traités : atteinte à la réputation et intention de nuire
« La plainte ne peut constituer une plainte de diffamation, viser le contenu d’une publicité ou exprimer une divergence d’opinions avec l’auteur d’une publication ou d’une décision. » (Règlement No 2, article 13.04)
M. Dubé déplore de la diffamation, un grief que le Conseil ne traite pas, car la diffamation n’est pas considérée comme étant du ressort de la déontologie journalistique et relève plutôt de la sphère judiciaire.
Le plaignant soutient également que le chroniqueur avait l’intention de nuire à M. Trudeau, ce qui expliquerait les présumées fautes d’informations inexactes et incomplètes commises par le journaliste. Comme le Conseil n’examine pas les intentions ni les motifs des journalistes, mais le résultat de leur travail et les méthodes utilisées, il ne peut s’attarder, comme le souhaiterait le plaignant, à la cause comme telle des fautes présumées.
Grief 1 : inexactitude
Principe déontologique applicable
« Les journalistes et les médias d’information produisent, selon les genres journalistiques, de l’information possédant les qualités suivantes : a) exactitude : fidélité à la réalité » (qualités de l’information – article 9 alinéa a) du Guide de déontologie journalistique du Conseil de presse du Québec)
Le Conseil doit déterminer si le journaliste a produit de l’information inexacte relativement aux propos de Justin Trudeau sur l’emploi du mot « barbare ».
Décision
Le Conseil de presse juge que le journaliste n’a pas contrevenu à l’article 9 a) du Guide et rejette le grief d’inexactitude.
Analyse
Le plaignant écrit : « Martineau écrit un article affirmant que Justin Trudeau ne trouve pas qu’on devrait qualifier [l’excision] de “barbare”. Justin n’a évidemment jamais dit ça. Il parlait en terme général de ce qui est écrit dans un guide sur l’immigration ».
Le Conseil constate qu’il n’est pas écrit dans la chronique, que Justin Trudeau « ne qualifie pas l’excision de barbare », malgré que cela puisse sembler sous-entendu.
Richard Martineau fait un lien entre l’intention de retirer le passage sur les « pratiques culturelles barbares » du guide Découvrir le Canada : Les droits et responsabilités liés à la citoyenneté et le « malaise » que M. Trudeau avait exprimé en 2011 par rapport au mot « barbare ». Ce lien s’agit de son opinion et non d’un fait. Le chroniqueur avait toute la latitude pour l’exprimer.
Grief 2 : incomplétude
Principe déontologique applicable
« Les journalistes et les médias d’information produisent, selon les genres journalistiques, de l’information possédant les qualités suivantes : e) : dans le traitement d’un sujet, présentation des éléments essentiels à sa bonne compréhension, tout en respectant la liberté éditoriale du média. » (qualités de l’information – article 9 e) du Guide)
Le Conseil doit déterminer si le chroniqueur a omis de présenter des éléments essentiels à la bonne compréhension du sujet de son article en ne mentionnant pas la rétractation de M. Trudeau.
Décision
Le Conseil de presse juge que le journaliste n’a pas contrevenu à l’article 9 e) du Guide.
Le Conseil rejette à la majorité (5/7) le grief d’incomplétude.
Analyse
Bien que M. Dubé soutienne que le journaliste a fait preuve d’incomplétude en omettant d’écrire que M. Trudeau, en 2011, s’était rétracté par rapport à son « problème » avec l’utilisation du mot « barbare », le Conseil juge que cette information n’était pas essentielle à la compréhension des chroniques mises en cause. En effet, elle ne concerne pas directement le coeur de la chronique dont le sujet est la refonte du guide Découvrir le Canada : Les droits et responsabilités liés à la citoyenneté.
Ainsi, le Conseil juge que le chroniqueur n’est pas allé au-delà des limites du journaliste d’opinion.
Un membre fait valoir sa dissidence, estimant que la rétractation de M. Trudeau était essentielle la compréhension du lecteur, car l’angle de l’article était de critiquer le premier ministre dans son opinion politique et dans sa décision quant à l’utilisation du mot « barbare » dans le guide.
Note
Les mis en cause n’ont soumis aucune réplique à la présente plainte. Le Conseil regrette le manque de collaboration du Journal de Montréal.
Décision
CONCLUSION
Le Conseil de presse du Québec rejette la plainte de M. Roch Dubé contre Richard Martineau et Le Journal de Montréal. Le grief d’inexactitude est rejeté à l’unanimité alors que celui d’incomplétude est rejeté à la majorité (5/7).
Renée Lamontagne
Présidente du comité des plaintes
La composition du comité des plaintes lors de la prise de décision :
Représentants du public :
Mme Ericka Alnéus
M. Luc Grenier
Mme Renée Lamontagne
M. Richard Nardozza
Représentants des journalistes :
Mme Lisa-Marie Gervais
M. Luc Tremblay
Représentant des entreprises de presse :
M. Jed Kahane